En dialogue avec le monde. Andrea Franc
Чтение книги онлайн.
Читать онлайн книгу En dialogue avec le monde - Andrea Franc страница 13
Lors de la Seconde Guerre mondiale, les entrepreneurs suisses doivent relever un nouveau défi et choisir entre suivre le courant normal, c’est-à-dire maintenir les relations économiques avec l’Allemagne nazie, ou interrompre celles-ci pour des raisons éthiques, sachant que l’approvisionnement de la Suisse s’effondrerait. De fait, la neutralité politique s’avère plus facile que la neutralité économique, ce qui sera d’ailleurs sanctionné par les Alliés. Pour avoir choisi de suivre le courant normal et maintenu le commerce avec l’Allemagne, des entreprises suisses se retrouvent ainsi dès octobre 1943 sur une liste noire.
La première cité ouvrière de Suisse est construite par la filature Rieter à Winterthour, 1852.
Dans l’après-guerre et après le bouleversement mondial de 1968, la perception des multinationales et de leurs investissements étrangers ainsi que des grandes banques change subitement du tout au tout. Presque du jour au lendemain, le secteur privé devient une cible non seulement en Suisse, mais dans l’ensemble du monde occidental. Tandis que des militants s’engagent contre de grands projets industriels au Tiers-Monde et que l’influence des syndicats est à son apogée, des entreprises industrielles en Suisse traversent de profonds changements structurels sous la pression de la concurrence internationale. Même si elle échoue en 1984, l’initiative du PS sur la fuite des capitaux, qui s’oppose à ce que les fonds de dictateurs en fuite soient acceptés en Suisse, met l’économie suisse politiquement sous pression et la force à corriger son cap. Une pression qui se confirme lorsque quelques entreprises helvétiques invoquent la neutralité de la Suisse pour maintenir leurs activités en Afrique du Sud en dépit des sanctions internationales contre le régime d’apartheid. Cette fois-là, les entrepreneurs suisses exerçant en Afrique du Sud ne peuvent pas mettre en avant la survie de la population suisse comme ils l’ont fait pendant la Seconde Guerre mondiale. Bien au contraire, à cause de la prospérité et de la paix d’après-guerre en Europe occidentale, les citoyens exigent des multinationales un comportement « responsable » dans les pays du Tiers-Monde et au regard de l’environnement. Mais ces pourfendeurs, qu’entendent-ils exactement par « responsabilité des entreprises » ? Les attentes des ONG et des œuvres d’entraide face aux entreprises suisses changent depuis 1968 et ne sont pas toujours claires et cohérentes. Dans un premier temps, les auteurs de la Déclaration de Berne de 1968 exigent des entreprises suisses qu’elles investissent dans l’industrie des pays en développement pour y créer des emplois, y stimuler la croissance économique et y favoriser la modernisation. Puis, dans les années 1970, les entreprises se voient davantage obligées de défendre la création d’emplois et la croissance économique face aux reproches de pollution de l’environnement et de violation des droits de l’homme.
Lors de la consultation en 1975 au sujet de la loi fédérale sur la coopération au développement et l’aide humanitaire internationales, il s’avère qu’un groupe de travail des œuvres d’entraide rejette par principe les investissements directs privés de groupes d’entreprises suisses dans le Tiers-Monde. Au sein du Vorort, divers groupes de travail internes étudient dès 1974 les propositions des Nations Unies en vue de l’élaboration d’un code de conduite non contraignant pour les entrepreneurs. Ces travaux sont repris par l’OCDE et édictés en 1976 comme Principes directeurs à l’intention des entreprises multinationales, formant une annexe à sa Déclaration sur l’investissement international. Bien que la Suisse ne rejoigne l’ONU qu’en 2002, il est dans l’intérêt des multinationales basées en Suisse d’utiliser les normes de l’ONU, cohérentes et internationalement reconnues, comme base pour l’établissement de leurs rapports à l’intention du public. Les entreprises sont de plus en plus tenues de prouver activement qu’elles adhèrent à un certain code de conduite et les grandes parmi elles mettent en place des départements de responsabilité sociale de l’entreprise (RSE). Avec le mouvement mondial et très hétérogène contre la globalisation, la pression sociale sur les entreprises s’accroît dans les années 1990. Depuis 2000, de nombreuses entreprises suisses ont signé le Pacte mondial de l’ONU. Pour le Vorort et plus tard Economiesuisse, le principal défi à partir du Cycle d’Uruguay, ultime cycle du GATT à la fin des années 1980, consiste à veiller à ce que la politique économique extérieure suisse et la politique agricole suisse soient perçues par le public comme une seule entité. Dans les accords bilatéraux de libre-échange comme auprès de l’OMC, les entreprises suisses voient ainsi leurs opportunités à l’étranger limitées à cause de la protection des agriculteurs suisses.
Apprentis de l’entreprise Landis & Gyr après l’obtention de leur diplôme, 1933.
L’apprentissage
Au Moyen-Âge, la formation des artisans est du ressort de leurs corporations. L’apprentissage de plusieurs années s’achève par l’admission dans la corporation concernée. Les artisans non affiliés sont appelés « gâte-métier ». Un apprentissage simplifié, moins cher et moins long – échappant au contrôle des corporations – concurrence dès le XVIIe siècle l’apprentissage traditionnel. Dans les métiers non réglementés, il devient au XVIIIe siècle la norme là où fleurit le travail à domicile comme le tissage, le tressage de la paille ou le tricotage de bas. L’industrialisation du XIXe siècle marque l’apparition d’usines qui emploient des ouvriers non qualifiés et des enfants. Dans les années 1830, les modifications constitutionnelles cantonales brisent le pouvoir des corporations de l’industrie et, en 1874, la deuxième Constitution fédérale y met fin en instaurant la liberté du commerce et de l’industrie. Il faut attendre 1880 pour que l’apprentissage soit réformé et adapté à l’industrialisation précoce et prononcée de la Suisse. À l’instar de l’école primaire introduite par la plupart des cantons dès les années 1830, le modèle suisse de l’apprentissage se concentre sur les examens pédagogiques des recrues, lesquels sont organisés dès 1875. À la suite des résultats parfois mauvais obtenus lors de ces examens portant sur des matières comme les mathématiques, l’allemand ou l’instruction civique, le système scolaire est alors adapté. Il complète l’apprentissage en entreprise par des cours approfondissant le programme de l’école primaire et transmettant le savoir propre à chaque métier. L’arrêté fédéral de 1884 sur les subventions aux établissements de formation professionnelle devient la pierre angulaire du système dual reposant sur deux piliers : l’entreprise et l’école professionnelle ou l’école des arts et métiers. Depuis, le diplôme de fin d’apprentissage reconnu par la Confédération est considéré comme gage de qualité. Le peuple limite cependant l’influence des associations sur les désignations de métier et certificats d’aptitude en rejetant, par scrutin référendaire en 1954, l’arrêté fédéral instituant le régime du certificat de capacité.
La formule suisse est couronnée de succès et suscite un intérêt croissant à l’échelle internationale. Le risque de chômage est ainsi nettement plus faible pour les diplômés de fin d’apprentissage que pour les diplômés universitaires. Le chômage est sensiblement moins élevé dans des pays comme la Suisse ou l’Autriche, qui pratiquent le système dual et délivrent des diplômes de formation professionnelle. Au début du XXIe siècle, plus de la moitié des jeunes suisses ont accompli l’un des 230 apprentissages proposés.
Конец ознакомительного фрагмента.
Текст