Manuel de la procédure d'asile et de renvoi. Constantin Hruschka

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Manuel de la procédure d'asile et de renvoi - Constantin Hruschka

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de recours en matière d’asile (CRA jusqu’en 2007, puis TAF), le dépôt d’une demande d’asile relève d’un « droit strictement personnel relatif ».7 Les droits strictement personnels au sens de l’art. 19b al. 2 CC sont des droits qu’une personne capable de discernement peut exercer sans le consentement de son représentant légal même si elle n’est pas majeure. Ils sont absolus lorsqu’ils excluent toute représentation et relatifs lorsque leur titulaire, incapable de discernement – par exemple un jeune enfant –, peut se faire représenter.8 Si une personne capable de discernement ne dépose pas personnellement sa demande d’asile, il est possible de réparer le vice au cours de la procédure. « Une réparation peut par exemple intervenir lorsque le contenu d’une demande d’asile déposée par représentation est confirmé lors d’une audition orale ou, en cas d’absence d’audition, par le dépôt d’une prise de position, rédigée ou au moins signée personnellement, portant sur le catalogue de questions du SEM. Il serait ainsi choquant que des personnes gravement malades ou en danger de mort se voient refuser le dépôt d’une demande d’asile par représentation parce que l’on retiendrait abstraitement que le signataire n’agirait pas dans le cadre de sa sphère strictement personnelle. »9

      En Allemagne, la pratique veut qu’on envoie généralement les mineurs non accompagnés d’abord dans un office d’assistance aux jeunes qui les prend en charge (mesures de protection à court terme). Un tuteur/assistant est immédiatement nommé et une procédure de clarification est introduite pour définir quelles mesures correspondraient le mieux à l’intérêt supérieur de l’enfant. Dès la fin du premier entretien avec le mineur non-accompagné (MNA), il est décidé si une [60]demande d’asile doit être déposée.10 Ces mesures semblent appropriées pour sauvegarder les intérêts de l’enfant ; compte tenu du caractère primordial de la prise en considération de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toutes les mesures étatiques qui le concernent, il semble même qu’il faille s’en inspirer (voir art. 3 CDE).11

      Lorsqu’une nouvelle demande d’asile est déposée dans les cinq ans qui suivent l’entrée en force d’une décision d’asile et de renvoi, il s’agit d’une demande multiple au sens de l’art. 111c LAsi. Elle doit être présentée par écrit et être motivée.12 Le requérant n’est alors pas hébergé dans un CEP (pt 4). Si la demande est faite oralement dans un CEP, elle n’est ni prise en considération ni enregistrée. Le requérant reçoit uniquement un aide-mémoire lui indiquant que tant qu’il n’a pas déposé de demande d’asile écrite, il a le statut d’étranger sans autorisation de séjour et que les autorités du canton compétent lors de la précédente procédure d’asile peuvent éventuellement exécuter le renvoi dans son pays d’origine. Ce document lui signale aussi qu’il peut s’adresser au canton compétent13 parce qu’il n’a pas accès au CEP.14 L’art. 111c LAsi constitue une lex specialis par rapport à l’art. 18 LAsi, car la demande multiple est soumise à des exigences de forme spécifiques.15

      Dès que la demande écrite parvient au SEM, elle est enregistrée dans le SYMIC16 et le canton compétent en est avisé. L’exécution du renvoi est alors suspendue d’office (art. 42 LAsi).17

      Les obstacles d’ordre formel ne sauraient entraîner que des personnes persécutées ne puissent plus invoquer leurs motifs de fuite. Il est tout à fait concevable que des requérants qui reviennent en Suisse après un retour accompli dans leur pays d’origine – le pays persécuteur potentiel – aient de nouveaux motifs d’asile, mais qu’ils ne puissent pas les faire valoir de manière adéquate faute de connaissances linguistiques et juridiques. Comme le nouveau droit continue d’exiger que toutes les demandes soient examinées [61]avec diligence,18 le SEM est tenu, dans ces cas, de donner au requérant l’occasion de préciser et de compléter sa demande ou de l’entendre sur cette demande.19 A notre avis, tel devrait toujours être le cas lorsque les arguments du requérant sont, à première vue, de nature à fonder la qualité de réfugié.

      Après le dépôt d’une demande d’asile au sens de l’art. 18 LAsi, le requérant ne peut plus engager une procédure visant à l’obtention d’une autorisation de séjour relevant du droit des étrangers sauf s’il y a droit (art. 14 al. 1 LAsi)20 ou si le canton lui accorde une autorisation pour cas de rigueur au sens de l’art. 14 al. 2 LAsi. Si une procédure visant à l’octroi d’une autorisation de séjour est en cours au moment du dépôt de la demande d’asile, elle devient sans objet (art. 14 al. 5 LAsi).21 A l’instar de l’art. 14 al. 1, cette règle ne s’applique pas si le requérant bénéficie d’un droit à l’octroi d’une autorisation. La séparation des procédures vient surtout du fait que c’est la Confédération qui est compétente pour la reconnaissance de la qualité de réfugié et pour l’octroi de l’asile (art. 6a al. 1 LAsi), alors que ce sont les cantons qui octroient les autorisations relevant du droit des étrangers (art. 40 al. 1 LEtr).22

      En revanche, si le requérant d’asile est déjà au bénéfice d’une autorisation de séjour, celle-ci reste valable et peut même être prolongée selon les dispositions relevant du droit des étrangers (art. 14 al. 6 LAsi). Cette hypothèse peut se réaliser par exemple si des changements dans la situation politique du pays d’origine d’une personne séjournant en Suisse sont tels que cette personne pourrait être persécutée en cas de retour. La demande d’asile doit alors être déposée dans l’un des cinq centres d’enregistrement et de procédure, mais les requérants concernés pourront séjourner dans leur canton de domicile jusqu’à la fin de la procédure d’asile.23

      Les personnes qui cherchent à obtenir l’asile et qui se trouvent à la frontière, à proximité ou à l’intérieur du pays, sont envoyées par l’autorité cantonale ou fédérale dans un CEP. Cette autorité relève l’identité complète du requérant, avise le [62]CEP le plus proche et établit un laissez-passer pour que le requérant puisse s’y rendre. Une fois sur place, celui-ci doit s’annoncer au plus tard le jour ouvrable suivant (art. 8 OA 1). En 2014, il y a eu au total 23’765 demandes d’asile dont 19’111 (soit 80 %) qui ont été déposées directement dans un CEP.24 En raison de son importance pratique, la procédure au CEP fait l’objet d’un point séparé (voir pt 4).

      La majorité des requérants entre en Suisse en contournant les contrôles douaniers. L’entrée légale pour chercher protection en Suisse est rendue difficile notamment par le fait que les personnes persécutées ne disposent souvent pas de documents de voyage ni de visas. En outre, dans les pays touchés par la guerre ou la guerre civile, les structures étatiques ne sont souvent plus en mesure d’établir ou de délivrer les papiers en question.

      En Suisse, le seul fait d’entrer illégalement dans le pays n’engendre pas d’inconvénients de procédure pour les requérants d’asile. Si ceux-ci sont reconnus comme réfugiés, ils bénéficient de l’art. 31 CR selon lequel aucune sanction pénale ne saurait être appliquée aux réfugiés en cas d’entrée ou de séjour irrégulier dans le pays d’accueil. Mais il faut que la personne vienne directement d’un territoire où sa vie ou sa liberté au sens de l’art. 1 CR était menacée, qu’elle s’annonce sans retard aux autorités et leur expose les motifs pouvant justifier son entrée et/ou son séjour irréguliers. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, une personne se rend « immédiatement » du pays persécuteur en Suisse également lorsqu’elle n’a fait que passer par d’autres pays dans le but de venir en Suisse le plus rapidement possible.25

      De

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