Les Néo-Ruraux Tome 1: Le Berger. Wolfgang Bendick

Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу Les Néo-Ruraux Tome 1: Le Berger - Wolfgang Bendick страница 7

Les Néo-Ruraux Tome 1: Le Berger - Wolfgang Bendick Les Néo-Ruraux

Скачать книгу

« Pernod » et « Ricard ». Pour nous, tous avaient le même goût. Mais pas pour un Français ! Le serveur devait bien mémoriser quoi resservir à qui. Et ça se faisait avec des bouteilles portant un versoir-doseur au goulot, une espèce de goitre avec un bec. Enfin, tant que le verre était encore à moitié plein, le dosage s’avérait plus facile. Si le barman avait saisi la mauvaise bouteille par erreur et un des porte-verres se mettait à râler, le barman bouchait le trou du verseur et faisait revenir la dose dans la bouteille par un mouvement de rotation.

      *

      Pendant une de ces soirées interminables nous apprîmes que l’un des chasseurs présents, qui occupait le poste de maire du village, possédait un vieux camion GMC, un de ces anciens véhicules de guerre américains, abandonné par les Alliés. Celui-ci avait trois ponts moteurs et était capable de porter 4 à 6 tonnes, en fonction de la pente. Il nous proposa de monter du sable et du gravier jusqu’à la bifurcation avant notre « station aval ». Avec notre combi et la remorque nous ne pouvions porter qu’une tonne à la fois. Le lendemain vers midi nous entendîmes au loin le vrombissement du camion. En reculant il peina à grimper l’étroit chemin délavé, qui lui avait été indiqué par un autre chasseur que nous avions aperçu l’autre soir au bistrot. Ce dernier avait à peu près mon âge. Bien qu’étant du village, il avait travaillé à Dunkerque, tout à fait dans le nord. Maintenant il avait eu la chance d’avoir trouvé du travail à St-Girons et était revenu. Nous n’étions donc pas les seuls « néos » au village. Ils bennèrent le sable dans le virage. Bien sûr qu’ils voulaient voir le chantier. Je me demandais si le transport n’avait pas été qu’un prétexte. Nous montâmes tous la côte et inspectâmes notre ruine. Yvon, le conducteur, étant lui-même maçon, pouvait me donner quelques conseils précieux. De toute manière la « table ronde » de ce soir aurait de l’information en direct !

      Nous chargeâmes la remorque à la pelle et la tractâmes avec le combi jusqu’à notre « station en aval » où nous transvasâmes le sable dans notre chariot en forme de cercueil. Environ 300 à 350 kilos par voyage. Parfois un peu moins, et par-dessus nous posâmes des longues sections de bois dans des supports escamotables pour transporter des poutres ou des fagots de parquet pour le plancher. Avec le sable lourd au fond nous risquions moins de tout renverser. Nous stockâmes séparément le gravier et le sable à droite du bâtiment, contre le mur de la grange, où nous installâmes aussi la bétonnière, qui était actionnée par ma vieille mobylette. J’avais trouvé la bétonnière chez un ferrailleur en Allemagne et elle pouvait contenir trois brouettes. Le moteur électrique étant cassé, elle n’avait pas coûté cher. Et parce qu’à la maison il n’y avait pas de courant, j’avais soudé une deuxième couronne sur la roue arrière de ma ‘Zündapp’, et sur la bétonnière un support pour la mobylette. Une longue chaîne faisait la transmission. J’alourdis la poignée d’accélération avec une pince à étau et c’était parti ! Maintenant nous avions besoin de plus d’eau. La source étant limitée, nous coupâmes un fût en plastique en deux et fîmes rentrer le tuyau. Pendant que nous faisions le mélange le fût avait le temps de se remplir à nouveau.

chapter5Image7.jpeg

      Nous avions prévu deux chantiers : par beau temps un à l’extérieur et un autre à l’intérieur en cas de pluie. Tous les matériaux avaient été transportés en haut. Le mur de devant la maison penchait légèrement vers l’extérieur. On le voyait bien dans le grenier aux entraits, ces poutres qui traversent la maison, liant les deux sablières qui sont posées sur les murs. Ceux-ci servaient à rattraper la poussée latérale des chevrons par manque de fermes dans la construction. Mais ceux-ci s’étaient défaits de leur fixation. Comme on pouvait le voir à la couleur du bois, quelqu’un avait à deux reprises essayé de corriger ce défaut en ajoutant un nouvel entrait. Mais ceux-ci avaient lâché à leur tour. Nous essayâmes à notre tour d’empêcher ce mouvement des murs avec un vieux câble que nous entourions autour des sablières à l’aide des serre-câbles et d’un ridoir. Plus tard, quand nous aménageâmes le grenier nous coulâmes du béton armé sur le mur transversal et autour du câble pour consolider le toit une fois de plus et pour toujours…

chapter5Image8.jpeg

      Mais une question restait ouverte – est-ce que c’était uniquement la poussée du toit qui écartait les murs ou est-ce que ça venait aussi des fondations et du poids des murs ? La façade de la maison, 25 mètres de long, construite uniquement avec des pierres brutes et avec des blocs en ardoise, faisait six mètres de haut. Sur quelle base cette dernière avait-elle été construite ? Les interstices étaient remplis d’un mélange d’argile et de petits cailloux. Mais à la base, là où le mur touchait le sol, ces joints étaient partis, probablement à cause de l’eau qui s’écoulait du toit, offrant un abri à de multiples animaux. Quand le soleil chauffait le mur, ça se mettait à grouiller de partout. Nous y observâmes des souris, des lézards et aussi des serpents. Jean-Paul y avait même vu des vipères ! Il semblait bien connaître notre maison. Sans doute avait-il cuvé pas mal de cuites dans le vieux lit. Dans sa grange aux vaches il avait caché une bouteille de gnôle, de la ‘prune’, dont il nous avait déjà offert une gorgée. Même sa mère donnait l’impression d’aimer la boisson.

      Nous commençâmes par creuser le plus profond possible le long du mur afin de couler des sortes de fondations devant. Nous posâmes d’anciennes planches de parquet de chant en haut de cette tranchée et les calâmes avec des pierres. Puis nous coulâmes du béton derrière ce coffrage, en ajoutant une barre d’acier torsadé avant de remplir complètement. Puis nous compactâmes ce béton avec la masse, jusqu’à ce qu’un lait de ciment remontât en surface. Pour faire ce chantier il nous fallait beaucoup de matériel, et matériel veut dire beaucoup de main d’œuvre. Bouger le gravier trois fois avec la pelle : d’abord du tas dans la remorque, de là dans le chariot et puis dans la bétonnière. Et de là avec la brouette dans le coffrage. Après quelques beaux jours ensoleillés c’était fini. Mais il faudrait bientôt poser une gouttière !...

      Ensuite nous élevâmes les murs de la fosse septique, mais avec des parpaings. Puis nous creusâmes une rigole en-dessous du seuil de la porte d’entrée, par laquelle nous fîmes passer tous les tuyaux d’évacuation et d’adduction. Avec en plus un tuyau que nous laissâmes vide. Au cas où… Traverser les murs du rez-de-chaussée semblait impossible, car ceux-ci avaient une épaisseur de 80 centimètres à leur base. Pourquoi chercher compliqué, quand c’est possible de faire simple ! Qu’est-ce qu’ils ont trimé à l’époque, les paysans d’ici pour ériger cette maison ! Est-ce qu’ils ont calculé l’épaisseur des murs d’après la quantité de pierres dans les champs pour s’en débarrasser ? En tout cas, l’endroit où se trouvait la maison avait servi de carrière. Et selon l’épaisseur variable de la couche de suie du feu ouvert sur les murs intérieurs nous constations que toutes les parties n’avaient pas le même âge, il y en avait qui avaient été ajoutées plus tard. La maison était faite de plusieurs parties, au moins deux, comme on pouvait le constater à une jointure sur l’avant. Comparé à l’effort que les vieux avaient fourni pour construire cette quasi-forteresse, notre boulot ressemblait plutôt à du cosmétique.

      *

      Plus de deux semaines s’étaient écoulées. Des jeunes gens avec un gamin de deux ans qui avaient acheté une maison sur l’autre versant de la vallée l’an passé, étaient venus et nous avaient invité pour déjeuner le dimanche. Comme le samedi précédent, nous avions fait un plongeon dans la civilisation et visité le marché dans la ville qui se trouvait à 25 kilomètres. Comme auparavant nous nous étions arrêtés devant de multiples bistrots sur le chemin du retour. Dans chaque bled il y en avait au moins un, géré par de vieux hôteliers qui, bizarrement, étaient tous au courant d’où nous venions et où nous habitions. En dehors des

Скачать книгу