Les terres d'or. Gustave Aimard

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Les terres d'or - Gustave  Aimard

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du dîner: Ed n’a presque rien mangé ce matin; or, la faim est un puissant réactif pour amener l’ennemi à composition, répondit Doc philosophiquement.

      – Eh bien! adieu mes amis, il faut que je parte, dit Flag en se levant et faisant ses préparatifs: Ayez soin de vous, Doc; prenez bien garde que Ed ne nous fasse aucune cuisine d’ici à quinze jours; il nous empoisonnerait pour tout de bon.

      A ces mots, le jeune arpenteur tourna les talons et s’éloigna en sifflant.

      – Flag est un bon garçon, observa Doc; ce serait dommage qu’il ne réussît pas.

      CHAPITRE III. UNE TRAGÉDIE DANS LES BOIS

      Les splendeurs joyeuses d’une belle matinée printanière semblaient avoir donné à toute chose une vie et une animation particulières. Partout, dans les bois, retentissaient le chant des oiseaux, le murmure des insectes, l’harmonie charmante et inexprimable de ces mille petites voix confuses qui se réunissent pour former l’hymne grandiose de la nature heureuse dans sa solitude. Dans les clairières on voyait çà et là, folâtrer gracieusement les jeunes loups des prairies, glisser de monstrueux serpents roulés en anneaux étincelants, voler des papillons, courir des écureuils aux branches les plus aériennes des arbres.

      Henry Edwards et Frédéric Allen (Doc et Squire du précédent chapitre) ne pouvaient contenir leur admiration à l’aspect du ravissant spectacle qui émerveillait à chaque pas leurs regards.

      Leur route côtoyait les bois des collines, en suivant un sentier qui séparait la prairie des régions boisées: d’un côté ondulait l’Océan de la verte plaine; de l’autre, la forêt profonde, comme une toison luxuriante, couvrait à perte de vue les croupes fuyantes des collines dont les pentes douces descendaient jusqu’au Missouri. Par intervalles quelques longues avenues livraient passage aux regards, et dans le fond lumineux de ces voûtes ombreuses, on voyait scintiller les flots majestueux du Père des Eaux.

      Un ciel dont l’azur sans tache annonçait une atmosphère pure, un soleil radieux, dans l’air et sur la terre les effluves balsamiques du jeune printemps, le bonheur de vivre, la force, la santé, le courage, l’espoir, tout souriait aux jeunes voyageurs.

      La hache sur leurs robustes épaules, alertes, gais, heureux, ils cheminaient enchantant, parlant et riant.

      O verte jeunesse! sourire de la vie! fleur de l’existence! que ton âme reste joyeuse! ton soleil brillant! ton ciel sans nuages!…

      Et pourtant, par cette douce matinée, il y avait une jeune et charmante créature qui «ployait tristement la tête sous le fardeau de la vie.» Après avoir préparé le repas de son père, et mis tout en ordre dans sa pauvre cabane, Alice était sortie à pas lents avec une corbeille pour cueillir les fraises qui, par millions, tapissaient le sol humide des bois.

      Elle était, au milieu de ce paysage enchanteur, une ravissante apparition, avec son blanc chapeau de paille que débordaient de partout les boucles soyeuses de ses cheveux blonds, son châle écarlate croisé sur la poitrine et noué derrière la taille, sa robe gris-perle flottant au gré de la brise matinale.

      Doc et Squire, en l’apercevant au sortir d’un bosquet, ne purent retenir une exclamation admirative; leurs regards la suivirent avec une sympathie facile à concevoir. Ils ne songeaient déjà plus qu’ils étaient partis pour aller disputer, pied à pied, leur territoire à son père.

      Alice Newcome leur était personnellement inconnue, mais sa réputation de beauté, bien répandue parmi les settlers, était depuis longtemps parvenue jusqu’à eux. Il leur suffit d’un coup d’œil pour deviner qu’elle était cette charmante glaneuse de fraises, près de laquelle ils allaient passer.

      Les deux jeunes gens lui adressèrent un respectueux salut, mais continuèrent leur route en ralentissant le pas et se creusant la tête pour trouver quelque bon prétexte qui leur permît de lui adresser la parole.

      De son côté, Alice leur avait adressé un timide regard, mais sans coquetterie. Elle ignorait tout artifice, la naïve enfant; ses beaux yeux, limpides comme l’azur, reflétaient son âme pure, franche, loyale.

      A peine les voyageurs eurent-ils fait quelques pas, qu’un cri de terreur se fit entendre: c’était la jeune fille qui l’avait poussé. Ils revinrent en toute hâte vers elle, et la trouvèrent immobile et comme pétrifiée par la terreur, les yeux fixés sur un grand buisson tout proche.

      Un coup d’œil suffit aux jeunes gens pour juger de la situation: deux énormes serpents enroulés ensemble froissaient les hautes herbes sous leurs monstrueux replis et s’avançaient vers le sentier.

      – N’ayez pas peur, ces animaux ne sont point d’une espèce dangereuse; miss… miss Newcome, je présume? dit Fred Allen.

      La jeune fille poussa un soupir de soulagement:

      – Merci, messieurs, répondit-elle, je vous demande mille pardons d’avoir interrompu votre course; je suis d’une poltronnerie extrême en présence des serpents, et je ne sais pas distinguer ceux qui sont inoffensifs de ceux qui sont venimeux.

      Tout en parlant, Alice et ses deux auxiliaires s’étaient rapidement éloignés de l’horrible groupe des reptiles.

      – Je ne m’étonne nullement de votre frayeur, miss, se hâta de dire le docteur, vos impressions sont exactement les miennes; je frissonne toujours des pieds à la tête quand j’aperçois un serpent, venimeux ou non. Mais, permettez-moi de pendre pour quelques instants votre corbeille, vous êtes encore toute tremblante.

      – Je vous remercie, sir; ma corbeille est trop petite pour me paraître lourde; d’ailleurs elle n’est qu’à moitié pleine, ajouta Alice en souriant, et je ne pense pas qu’il m’arrive de la remplir aujourd’hui.

      – Vous avez peur d’avoir peur encore?… répliqua gaîment Allen. Puis il ajouta, en prenant la corbeille: Voyons si vous en avez assez pour votre dîner: Ah! mais non! elle n’est qu’à moitié pleine. Écoutez, mon claim fourmille de fraises; le docteur et moi nous allons nous mettre à l’œuvre et vous compléter votre provision en un clin d’œil, si vous voulez nous le permettre.

      Une expression d’inquiétude vint aussitôt troubler le visage d’Alice; elle s’avança vivement, la main tendue, pour reprendre sa corbeille.

      – Non, non! répondit-elle précipitamment; vous êtes trop bon, je ne veux pas vous déranger plus longtemps.

      Les jeunes gens furent surpris du ton avec lequel fut dite cette phrase, et ne parvinrent pas à dissimuler leur étonnement. La jeune fille s’en aperçut fort bien, mais son trouble parut s’accroître, elle poursuivit avec une nuance d’amertume.

      – N’êtes-vous pas, je crois, les gentlemen avec lesquels mon père est en dispute relativement aux limites des claims? J’ignore de quel côté est le bon droit. En conscience, je suis obligée de reconnaître que mon père est violent, irascible; mais, sirs, je crains qu’il n’arrive quelque malheur si ces discussions se perpétuent.

      En finissant, la voix d’Alice était tremblante, des larmes roulaient sur ses paupières. Allen et son ami furent touchés; le chagrin d’une aussi charmante affligée ne pouvait manquer d’être contagieux.

      – Ne vous alarmez pas pour votre père, miss Newcome, lui dit Allen avec la plus grande douceur; je vous donne ma parole de ne jamais user de violence dans aucune occasion.

      – Je vous fais, de tout

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