Le Collier de la Reine, Tome II. Dumas Alexandre
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Читать онлайн книгу Le Collier de la Reine, Tome II - Dumas Alexandre страница 4
– Non, pas trop… J'ai osé parler du collier.
– Osé dire que j'ai pensé…
– À l'acheter pour elle, oui.
– Oh! comtesse, c'est sublime! Et elle a écouté?
– Mais oui.
– Vous lui avez dit que je lui offrais ces diamants?
– Elle a refusé net.
– Je suis perdu.
– Refusé d'accepter le don, oui; mais le prêt…
– Le prêt!.. Vous auriez tourné si délicatement l'offre?
– Si délicatement, qu'elle a accepté.
– Je prête à la reine, moi!.. Comtesse, est-il possible?
– C'est plus que si vous donniez, n'est-ce pas?
– Mille fois.
– Je le pensais bien. Toutefois Sa Majesté accepte.
Le cardinal se leva, puis se rassit. Il vint encore jusqu'à Jeanne, et, lui prenant les mains:
– Ne me trompez pas, dit-il, songez qu'avec un mot, vous pouvez faire de moi le dernier des hommes.
– On ne joue pas avec des passions, monseigneur; c'est bon avec le ridicule; et les hommes de votre rang et de votre mérite ne peuvent jamais être ridicules.
– C'est vrai. Alors ce que vous me dites…
– Est l'exacte vérité.
– J'ai un secret avec la reine?
– Un secret… mortel.
Le cardinal courut à Jeanne, et lui serra la main tendrement.
– J'aime cette poignée de main, dit la comtesse, elle est d'un homme à un homme.
– Elle est d'un homme heureux à un ange protecteur.
– Monseigneur, n'exagérez rien.
– Oh! si fait, ma joie, ma reconnaissance… jamais…
– Mais vous exagérez l'une et l'autre. Prêter un million et demi à la reine, n'est-ce pas cela qu'il vous fallait?
Le cardinal soupira.
– Buckingham eût demandé autre chose à Anne d'Autriche, monseigneur, après ses perles semées sur le parquet de la chambre royale.
– Ce que Buckingham a eu, comtesse, je ne veux pas même le souhaiter, fût-ce en rêve.
– Vous vous expliquerez de cela, monseigneur, avec la reine, car elle m'a donné ordre de vous avertir qu'elle vous verrait avec plaisir à Versailles.
L'imprudente n'eut pas plutôt laissé échapper ces mots, que le cardinal blanchit comme un adolescent sous le premier baiser d'amour.
Le fauteuil qui se trouvait à sa portée, il le prit en tâtonnant comme un homme ivre.
– Ah! ah! pensa Jeanne, c'est encore plus sérieux que je ne croyais; j'avais rêvé le duché, la pairie, cent mille livres de rente, j'irai jusqu'à la principauté, jusqu'au demi million de rente; car monsieur de Rohan ne travaille ni par ambition, ni par avarice, il travaille par amour!
Monsieur de Rohan se remit vite. La joie n'est pas une maladie qui dure longtemps, et comme c'était un esprit solide, il jugea convenable de parler affaire avec Jeanne, afin de lui faire oublier qu'il venait de parler amour.
Elle le laissa faire.
– Mon amie, dit-il en serrant Jeanne dans ses bras, que prétend faire la reine de ce prêt que vous lui avez supposé?
– Vous me demandez cela parce que la reine est censée n'avoir pas d'argent?
– Tout juste.
– Eh bien! elle prétend vous payer comme si elle payait Bœhmer, avec cette différence que si elle avait acheté de Bœhmer, tout Paris le saurait, chose impossible depuis le fameux mot du vaisseau, et que si elle faisait faire la moue au roi, toute la France ferait la grimace. La reine veut donc avoir en détail les diamants, et les payer en détail. Vous lui en fournirez l'occasion; vous êtes pour elle un caissier discret, un caissier solvable, dans le cas où elle se trouverait embarrassée, voilà tout; elle est heureuse et elle paie, n'en demandez pas davantage.
– Elle paie. Comment?
– La reine, femme qui comprend tout, sait bien que vous avez des dettes, monseigneur; et puis elle est fière, ce n'est pas une amie qui reçoive des présents… Quand je lui ai dit que vous aviez avancé deux cent cinquante mille livres…
– Vous le lui avez dit?
– Pourquoi pas?
– C'était lui rendre tout de suite l'affaire impossible.
– C'était lui procurer le moyen, la raison de l'accepter. Rien pour rien, voilà la devise de la reine.
– Mon Dieu!
Jeanne fouilla tranquillement dans sa poche et en tira le portefeuille de Sa Majesté.
– Qu'est cela? dit monsieur de Rohan.
– Un portefeuille qui renferme des billets de caisse pour deux cent cinquante mille livres.
– Mais…
– Et la reine vous les adresse avec un beau merci.
– Oh!
– Le compte y est. J'ai compté.
– Il s'agit bien de cela.
– Mais que regardez-vous?
– Je regarde ce portefeuille, que je ne vous connaissais pas.
– Il vous plaît. Cependant il n'est ni beau ni riche.
– Il me plaît, je ne sais pourquoi.
– Vous avez bon goût.
– Vous me raillez? En quoi dites-vous que j'ai bon goût?
– Sans doute, puisque vous avez le même goût que la reine.
– Ce portefeuille…
– Était à la reine, monseigneur…
– Y tenez-vous?
– Oh! beaucoup.
Monsieur de Rohan soupira.
– Cela se conçoit, dit-il.
– Cependant,