Le vicomte de Bragelonne, Tome III.. Dumas Alexandre

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Le vicomte de Bragelonne, Tome III. - Dumas Alexandre

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sur ce doute de La Vallière, les baisers du roi devinrent si brûlants, que de Saint-Aignan crut qu'il était de son devoir de passer de l'autre côté de la tapisserie.

      Mais ces baisers, qu'elle n'avait pas eu la force de repousser d'abord, commencèrent à brûler la jeune fille.

      – Oh! Sire, s'écria-t-elle alors, ne me faites pas repentir d'avoir été si loyale, car ce serait me prouver que Votre Majesté me méprise encore.

      – Mademoiselle, dit soudain le roi en se reculant plein de respect, je n'aime et n'honore rien au monde plus que vous, et rien à ma cour ne sera, j'en jure Dieu, aussi estimé que vous ne le serez désormais; je vous demande donc pardon de mon emportement, mademoiselle, il venait d'un excès d'amour; mais je puis vous prouver que j'aimerai encore davantage, en vous respectant autant que vous pourrez le désirer.

      Puis, s'inclinant devant elle et lui prenant la main:

      – Mademoiselle, lui dit-il, voulez-vous me faire cet honneur d'agréer le baiser que je dépose sur votre main?

      Et la lèvre du roi se posa respectueuse et légère sur la main frissonnante de la jeune fille.

      – Désormais, ajouta Louis en se relevant et en couvrant La Vallière de son regard, désormais vous êtes sous ma protection. Ne parlez à personne du mal que je vous ai fait, pardonnez aux autres celui qu'ils ont pu vous faire. À l'avenir, vous serez tellement au-dessus de ceux-là, que, loin de vous inspirer de la crainte, ils ne vous feront plus même pitié.

      Et il salua religieusement comme au sortir d'un temple.

      Puis, appelant de Saint-Aignan, qui s'approcha tout humble:

      – Comte, dit-il, j'espère que Mademoiselle voudra bien vous accorder un peu de son amitié en retour de celle que je lui ai vouée à jamais.

      De Saint-Aignan fléchit le genou devant La Vallière.

      – Quelle joie pour moi, murmura-t-il, si Mademoiselle me fait un pareil honneur!

      – Je vais vous renvoyer votre compagne, dit le roi. Adieu, mademoiselle, ou plutôt au revoir: faites-moi la grâce de ne pas m'oublier dans votre prière.

      – Oh! Sire, dit La Vallière, soyez tranquille: vous êtes avec

      Dieu dans mon coeur.

      Ce dernier mot enivra le roi, qui, tout joyeux, entraîna de Saint-

      Aignan par les degrés.

      Madame n'avait pas prévu ce dénouement-là: ni naïade ni dryade n'en avaient parlé.

      Chapitre CXXXIV – Le nouveau général des jésuites

      Tandis que La Vallière et le roi confondaient dans leur premier aveu tous les chagrins du passé, tout le bonheur du présent, toutes les espérances de l'avenir, Fouquet, rentré chez lui, c'est-à-dire dans l'appartement qui lui avait été départi au château, Fouquet s'entretenait avec Aramis, justement de tout ce que le roi négligeait en ce moment.

      – Vous me direz, commença Fouquet, lorsqu'il eut installé son hôte dans un fauteuil et pris place lui-même à ses côtés, vous me direz, monsieur d'Herblay, où nous en sommes maintenant de l'affaire de Belle-Île, et si vous en avez reçu quelques nouvelles.

      – Monsieur le surintendant, répondit Aramis, tout va de ce côté comme nous le désirons; les dépenses ont été soldées, rien n'a transpiré de nos desseins.

      – Mais les garnisons que le roi voulait y mettre?

      – J'ai reçu ce matin la nouvelle qu'elles y étaient arrivées depuis quinze jours.

      – Et on les a traitées?

      – À merveille.

      – Mais l'ancienne garnison, qu'est-elle devenue?

      – Elle a repris terre à Sarzeau, et on l'a immédiatement dirigée sur Quimper.

      – Et les nouveaux garnisaires?

      – Sont à nous à cette heure.

      – Vous êtes sûr de ce que vous dites, mon cher monsieur de

      Vannes?

      – Sûr, et vous allez voir, d'ailleurs, comment les choses se sont passées.

      – Mais de toutes les garnisons, vous savez cela, Belle-Île est justement la plus mauvaise.

      – Je sais cela et j'agis en conséquence; pas d'espace, pas de communications, pas de femmes, pas de jeu; or, aujourd'hui, c'est grande pitié, ajouta Aramis avec un de ces sourires qui n'appartenaient qu'à lui, de voir combien les jeunes gens cherchent à se divertir, et combien, en conséquence, ils inclinent vers celui qui paie les divertissements.

      – Mais s'ils s'amusent à Belle-Île?

      – S'ils s'amusent de par le roi, ils aimeront le roi; mais s'ils s'ennuient de par le roi et s'amusent de par M. Fouquet, ils aimeront M. Fouquet.

      – Et vous avez prévenu mon intendant, afin qu'aussitôt leur arrivée…

      – Non pas: on les a laissés huit jours s'ennuyer tout à leur aise; mais, au bout de huit jours, ils ont réclamé, disant que les derniers officiers s'amusaient plus qu'eux. On leur a répondu alors que les anciens officiers avaient su se faire un ami de M. Fouquet, et que M. Fouquet, les connaissant pour des amis, leur avait dès lors voulu assez de bien pour qu'ils ne s'ennuyassent point sur ses terres. Alors ils ont réfléchi. Mais aussitôt l'intendant a ajouté que, sans préjuger les ordres de M. Fouquet, il connaissait assez son maître pour savoir que tout gentilhomme au service du roi l'intéressait, et qu'il ferait, bien qu'il ne connût pas les nouveaux venus, autant pour eux qu'il avait fait pour les autres.

      – À merveille! Et, là-dessus, les effets ont suivi les promesses, j'espère? Je désire, vous le savez, qu'on ne promette jamais en mon nom sans tenir.

      – Là-dessus, on a mis à la disposition des officiers nos deux corsaires et vos chevaux; on leur a donné les clefs de la maison principale; en sorte qu'ils y font des parties de chasse et des promenades avec ce qu'ils trouvent de dames à Belle-Île, et ce qu'ils ont pu en recruter ne craignant pas le mal de mer dans les environs.

      – Et il y en a bon nombre à Sarzeau et à Vannes, n'est-ce pas,

      Votre Grandeur?

      – Oh! sur toute la côte, répondit tranquillement Aramis.

      – Maintenant, pour les soldats?

      – Tout est relatif, vous comprenez; pour les soldats, du vin, des vivres excellents et une haute paie.

      – Très bien; en sorte?..

      – En sorte que nous pouvons compter sur cette garnison, qui est déjà meilleure que l'autre.

      – Bien.

      – Il en résulte que, si Dieu consent à ce que l'on nous renouvelle ainsi les garnisaires seulement tous les deux mois, au bout de trois ans l'armée y aura passé, si bien qu'au lieu d'avoir un régiment pour nous, nous aurons

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