Le Chevalier de Maison-Rouge. Alexandre Dumas

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Le Chevalier de Maison-Rouge - Alexandre  Dumas

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ce que voulait dire son ami, mais qui seulement faisait semblant de ne point comprendre, la femme inconnue!

      – Eh bien, qui était-ce?

      – Je n’en sais rien.

      – Était-elle jolie?

      – Peuh! fit Maurice en allongeant dédaigneusement les lèvres.

      – Une pauvre femme oubliée dans quelque rendez-vous amoureux.

      …Oui, faibles que nous sommes,

      C’est toujours cet amour qui tourmente les hommes.

      – C’est possible, murmura Maurice, auquel cette idée, qu’il avait eue d’abord, répugnait fort à cette heure, et qui préférait plutôt voir dans sa belle inconnue une conspiratrice qu’une femme amoureuse.

      – Et où demeure-t-elle?

      – Je n’en sais rien.

      – Allons donc! tu n’en sais rien! impossible!

      – Pourquoi cela?

      – Tu l’as reconduite.

      – Elle m’a échappé au pont Marie…

      – T’échapper, à toi? s’écria Lorin avec un éclat de rire énorme. Une femme t’échapper, allons donc!

      Est-ce que la colombe échappe

      Au vautour, ce tyran des airs,

      Et la gazelle au tigre du désert

      Qui la tient déjà sous la patte?

      – Lorin, dit Maurice, ne t’habitueras-tu donc jamais à parler comme tout le monde? Tu m’agaces horriblement avec ton atroce poésie.

      – Comment! à parler comme tout le monde! mais je parle mieux que tout le monde, ce me semble. Je parle comme le citoyen Demoustier, en prose et en vers. Quant à ma poésie, mon cher! je sais une Émilie qui ne la trouve pas mauvaise; mais revenons à la tienne.

      – À ma poésie?

      – Non, à ton Émilie.

      – Est-ce que j’ai une Émilie?

      – Allons! allons! ta gazelle se sera faite tigresse et t’aura montré les dents; de sorte que tu es vexé, mais amoureux.

      – Moi, amoureux dit Maurice en secouant la tête.

      – Oui, toi, amoureux.

      N’en fais pas un plus long mystère;

      Les coups qui partent de Cythère

      Frappent au cœur plus sûrement

      Que ceux de Jupiter tonnant.

      – Lorin, dit Maurice en s’armant d’une clef forée qui était sur sa table de nuit, je te déclare que tu ne diras plus un seul vers que je ne siffle.

      – Alors, parlons politique. D’ailleurs, j’étais venu pour cela; sais-tu la nouvelle?

      – Je sais que la veuve Capet a voulu s’évader.

      – Bah! ce n’est rien que cela.

      – Qu’y a-t-il donc de plus?

      – Le fameux chevalier de Maison-Rouge est à Paris.

      – En vérité! s’écria Maurice en se levant sur son séant.

      – Lui-même en personne.

      – Mais quand est-il entré?

      – Hier au soir.

      – Comment cela?

      – Déguisé en chasseur de la garde nationale. Une femme, qu’on croit être une aristocrate déguisée en femme du peuple, lui a porté des habits à la barrière; puis un instant après, ils sont rentrés bras dessus bras dessous. Ce n’est que quand ils ont été passés que la sentinelle a eu quelques soupçons. Il avait vu passer la femme avec un paquet, il la voyait repasser avec une espèce de militaire sous le bras; c’était louche; il a donné l’éveil, on a couru après eux. Ils ont disparu dans un hôtel de la rue Saint-Honoré dont la porte s’est ouverte comme par enchantement. L’hôtel avait une seconde sortie sur les Champs-Élysées; bonsoir! le chevalier de Maison-Rouge et sa complice se sont évanouis. On démolira l’hôtel et l’on guillotinera le propriétaire; mais cela n’empêchera pas le chevalier de recommencer la tentative qui a déjà échoué, il y a quatre mois pour la première fois, et hier pour la seconde.

      – Et il n’est point arrêté? demanda Maurice.

      – Ah! bien oui, arrête Protée, mon cher, arrête donc Protée; tu sais le mal qu’a eu Aristide à en venir à bout.

      Pastor Aristœus fugiens Pencia Tempe…

      – Prends garde, dit Maurice en portant sa clef à sa bouche.

      – Prends garde toi-même, morbleu! car cette fois ce n’est pas moi que tu siffleras, c’est Virgile.

      – C’est juste, et tant que tu ne le traduiras point, je n’ai rien à dire. Mais revenons au chevalier de Maison-Rouge.

      – Oui, convenons que c’est un fier homme.

      – Le fait est que, pour entreprendre de pareilles choses, il faut un grand courage.

      – Ou un grand amour.

      – Crois-tu donc à cet amour du chevalier pour la reine?

      – Je n’y crois pas; je le dis comme tout le monde. D’ailleurs, elle en a rendu amoureux bien d’autres; qu’y aurait-il d’étonnant à ce qu’elle l’eût séduit? Elle a bien séduit Barnave, à ce qu’on dit.

      – N’importe, il faut que le chevalier ait des intelligences dans le Temple même.

      – C’est possible:

      L’amour brise les grilles

      Et se rit des verrous.

      – Lorin!

      – Ah! c’est vrai.

      – Alors, tu crois cela comme les autres?

      – Pourquoi pas?

      – Parce qu’à ton compte la reine aurait eu deux cents amoureux.

      – Deux cents, trois cents, quatre cents. Elle est assez belle pour cela. Je ne dis pas qu’elle les ait aimés; mais enfin, ils l’ont aimée, elle. Tout le monde voit le soleil, et le soleil ne voit pas tout le monde.

      – Alors, tu dis donc que le chevalier de Maison-Rouge…?

      – Je dis qu’on le traque un peu en ce moment-ci, et que s’il échappe aux limiers de la République, ce sera un fin renard.

      – Et que fait la Commune dans tout

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