Le Vicaire de Wakefield. Oliver Goldsmith

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Le Vicaire de Wakefield - Oliver Goldsmith

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nous avons été volontairement corrompus ou très négligents en les formant, nous n’en méritons pas moins un châtiment pour notre faute, ou du mépris pour notre folie.»

      Ma femme reprit alors la conversation, mais non le raisonnement. Elle fit remarquer que plusieurs très honnêtes gens de notre connaissance étaient des libres penseurs et faisaient de très bons maris; elle connaissait même certaines jeunes filles de sens qui auraient assez d’habileté pour faire de leurs époux des convertis. «Et qui sait, mon ami, continua-t-elle, ce qu’Olivia peut être capable d’accomplir? L’enfant n’est jamais à court sur aucun sujet, et, à ma connaissance, elle est très forte en controverse.

      – Eh! ma chère, que peut-elle avoir lu en fait de controverse? m’écriai-je. Il ne me souvient pas que j’aie jamais mis des livres de ce genre entre ses mains. Certainement vous exagérez ses mérites. – En vérité non, papa, répondit Olivia. J’ai lu une grande quantité de controverse. J’ai lu les discussions entre Thwackum et Square3; la controverse entre Robinson Crusoe et Vendredi, le sauvage, et je m’occupe en ce moment à lire la controverse qui se trouve dans la Cour dévote4. – Très bien! m’écriai-je. Voilà une bonne fille. Je vous trouve toutes les qualités requises pour faire des convertis; donc, allez aider votre mère à confectionner la tarte aux groseilles.»

      CHAPITRE VIII

Un amour qui ne promet guère de fortune peut cependant en amener beaucoup

      LE lendemain matin; nous eûmes de nouveau la visite de M. Burchell. Je commençais, pour certaines raisons, à trouver déplaisante la fréquence de ses retours; mais je ne pouvais lui refuser ma compagnie ni mon foyer. Il est vrai que son travail payait plus que son entretien; car il s’employait vigoureusement parmi nous, et, soit dans la prairie, soit à la meule, il se mettait au premier rang. En outre, il avait toujours quelque chose d’amusant à dire, qui allégeait notre labeur, et il était à la fois si bizarre et si sensé que je l’aimais, riais de lui et le prenais en pitié tout ensemble. Mon seul grief venait de l’attachement qu’il montrait pour ma fille: il l’appelait, en manière de plaisanterie, sa petite maîtresse, et quand il achetait pour chacune d’elles une parure de rubans, celle de Sophia était la plus jolie. Je ne savais comment, mais chaque jour il semblait devenir plus aimable; son esprit paraissait augmenter, et sa simplicité prendre l’air supérieur de la sagesse.

      Nous dînâmes en famille, dans le champ, assis, ou plutôt couchés, autour d’un modeste repas, la nappe étendue sur le foin. M. Burchell donnait au festin de la gaieté. Pour surcroît de satisfaction, deux merles se répondaient de deux haies opposées, le rouge-gorge familier venait picorer les miettes dans nos mains, et il n’était pas un bruit qui ne parût un écho de la tranquillité. «Je ne me trouve jamais assise ainsi, dit Sophia, sans penser aux deux amants si suavement décrits par M. Gay, et que la mort frappa dans les bras l’un de l’autre. Il y a, dans cette description quelque chose de si pathétique, que je l’ai lue cent fois avec un nouveau ravissement. – A mon avis, s’écria mon fils, les plus beaux traits de cette description sont bien au-dessous de ceux que l’on trouve dans Acis et Galatée, d’Ovide. Le poète romain entend mieux l’emploi de l’antithèse, et c’est de cette figure habilement mise en œuvre que dépend toute la force du pathétique. – Il est remarquable, s’écria M. Burchell, que les deux poètes que vous citez aient également contribué à introduire un goût faux dans leurs pays respectifs, en chargeant tous leurs vers d’épithètes. Des hommes d’un médiocre génie trouvèrent que c’était dans leurs défauts qu’on les pouvait le plus aisément imiter, et la poésie anglaise, comme celle des derniers temps de l’empire de Rome, n’est plus rien aujourd’hui qu’une combinaison d’images luxuriantes, sans plan et sans lien, qu’un chapelet d’épithètes qui embellissent le son sans exprimer de sens. Mais peut-être, madame, tandis que je reprends ainsi les autres, trouverez-vous juste que je leur donne l’occasion de se venger; et précisément je n’ai fait cette remarque que pour avoir l’occasion moi-même de présenter à la société une ballade qui, quels que soient ses autres défauts, est du moins exempte, je le crois, de ceux que j’ai indiqués.»

BALLADE

      «Viens à moi, bon Ermite du vallon,

      Et guide ma route solitaire

      Là-bas, où cette lumière égaye le val

      D’un hospitalier rayon.

      «Car ici, abandonné, perdu, je chemine

      A pas languissants et lents,

      Au milieu de déserts qui s’étendent, incommensurables.

      Semblant s’allonger à mesure que je vais.

      – Garde-toi, mon fils, s’écrie l’Ermite,

      De tenter les dangereuses ténèbres;

      Car ce fantôme perfide fuit là-bas

      Pour t’attirer à ta perte.

      «Ici, à l’enfant du besoin sans abri

      Ma porte toujours est ouverte;

      Et quoique ma part soit bien petite,

      Je la donne de bonne volonté.

      «Arrête-toi donc ce soir, et librement partage

      Tout ce qu’offre ma cellule,

      Ma couche de joncs et ma chère frugale,

      Mon bonheur et mon repos.

      «Les troupeaux qui parcourent en liberté la vallée.

      Je ne les condamne pas à l’abattoir;

      Instruit par ce Pouvoir qui a pitié de moi,

      J’apprends à avoir pitié d’eux.

      «Mais du flanc herbeux de la montagne

      J’emporte un innocent festin:

      Une besace garnie d’herbes et de fruits,

      Avec de l’eau de la source.

      «Donc, pèlerin, arrête; oublie tes soucis:

      Tous les soucis de la terre sont faux;

      L’homme n’a besoin que de peu ici-bas,

      Et il n’en a besoin que peu de temps.»

      Doucement, comme la rosée descend du ciel,

      Tombaient ses tranquilles accents.

      L’étranger modeste s’incline bas

      Et le suit dans la cellule.

      Au loin, dans l’étendue obscure et désolée,

      Se trouvait la demeure solitaire,

      Refuge pour le pauvre du voisinage

      Et pour l’étranger égaré.

      Nulles richesses sous son humble chaume

      N’exigeaient la garde d’un maître.

      La petite porte s’ouvrant au loquet

      Reçut le couple inoffensif.

      Et, alors que les foules affairées se retirent

      Pour prendre leur repos du soir,

      L’Ermite attisait son petit feu

      Et fêtait son hôte pensif.

      Il étalait ses provisions rustiques,

      Le pressait gaiement et souriait;

      Et, versé dans la connaissance des légendes,

      Il trompait les heures tardives.

      Autour de lui, dans une gaieté sympathique,

      Le petit chat essayait ses tours,

      Le

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<p>3</p>

Personnages disputeurs et grotesques du roman de Fielding intitulé Tom Jones.

<p>4</p>

Religious Courtship, or Historical Discourses on the necessity of marrying religious Husbands and Wives and of their being of the same opinion. «La Cour dévote, ou nécessité d’unir des maris et des femmes ayant de la religion et dont les opinions sont les mêmes.»