En dialogue avec le monde. Andrea Franc
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La Révolution française se traduit non seulement par un afflux de milliers de réfugiés en quelques années – comme chaque révolution européenne – mais aussi par l’émergence d’idées nouvelles. Soutenues par les politiciens suisses, elles sont mises en œuvre en certains endroits de plein gré, à d’autres sous la contrainte, après l’invasion des troupes françaises. En avril 1798, la République helvétique remplace l’ancienne Confédération. La nouvelle constitution instaure l’égalité politique entre tous les cantons fédéraux et accorde le droit de suffrage aux hommes dès 20 ans – à l’exception des juifs. L’époque dite de l’Helvétique, période de transition entre 1798 et l’acte de Médiation de Napoléon en 1803, met abruptement fin aux multiples dépendances politiques régionales établies au cours des siècles ainsi qu’aux juridictions disparates. La République helvétique manque se désintégrer durant la guerre civile. Selon de toutes récentes affirmations d’historiens, l’affirmation de la Suisse comme entité étatique au sein de l’Europe doit beaucoup à la Médiation de Napoléon en 1803. Ce dernier supprime surtout la centralisation des pouvoirs de la constitution helvétique et affirme à la place une organisation fédérale s’appuyant sur la souveraineté des cantons. Ironie de l’histoire, le fédéralisme, caractéristique distinctive de l’État suisse, a donc été décidé par l’un des dictateurs les plus sanguinaires dans la genèse de l’Europe.
Subsidiarité, souveraineté, autodétermination
Subsidiarité est le terme juridique désignant le principe de l’autonomie au niveau le plus bas possible. À l’époque moderne, la théorie de la subsidiarité est d’abord formulée par le pape Pie XI, en 1931, dans la doctrine sociale catholique. Dans ce contexte, elle se veut un code de conduite éthique, qui incite les individus à assumer la responsabilité de leurs actes. Elle est ensuite développée par des économistes libéraux comme Friedrich August von Hayek qui soulignent le droit de l’individu à la liberté ainsi que l’importance de cette théorie pour la performance économique et la préservation du marché en tant que processus de découverte. Le principe de subsidiarité est au cœur du concept réglementaire de l’économie sociale de marché tel qu’appliqué en Allemagne après la Seconde Guerre mondiale. Il est inscrit à l’article 5 du traité de Maastricht sur l’Union européenne de 1992 et à l’article 5a de la nouvelle Constitution fédérale de 1999. L’article 5 est donc commun à la Constitution fédérale de la Confédération suisse et au traité sur l’Union européenne. La souveraineté, ou plus communément l’autodétermination, désigne l’autodétermination juridique exclusive.
Directoire commercial de Saint-Gall-Appenzell
La chambre de commerce de loin la plus ancienne de Suisse est la Chambre de commerce et d’industrie de Saint-Gall-Appenzell. À la fin du Moyen-Âge, des marchands saint-gallois se réunissent au sein de la société du Notenstein pour organiser leur commerce de toile de lin à l’échelle européenne. L’un des premiers registres des membres date du 15 août 1466. La famille de commerçants Zyli, membre de la société du Notenstein dès le début, se lance dans l’activité bancaire au XVIIIe siècle. Le siège de l’entreprise se trouve dans la « Haus zum Notenstein », près de la porte Brühl, en bordure des vieux quartiers de Saint-Gall. Dans les années 1630, la société moyenâgeuse du Notenstein est dépassée avec ses quelques familles membres. Les entrepreneurs de la ville se constituent alors en assemblée générale et, quelques années plus tard, c’est la naissance de la corporation commerciale de Saint-Gall, dirigée par un directoire. Le Directoire commercial de Saint-Gall - ainsi dénommé à partir de ce moment-là et jusque dans les années 1990 - assume localement des tâches de politique financière et de marché et défend les intérêts des négociants saint-gallois à l’encontre des cantons fédéraux et des pays étrangers. Les commerçants de Saint-Gall sont confrontés à la concurrence venant d’Appenzell. Au XVIIIe siècle, la famille Zellweger, réformée, façonne le commerce de toiles de lin, puis du coton brut et de tissus de coton. Cette famille dirige des entreprises textiles prospères et installe des filiales à Lyon, Gênes et Barcelone. Pendant le Blocus continental napoléonien au début du XIXe siècle, les commerçants suisses en général et ceux de Saint-Gall et d’Appenzell en particulier bataillent pour préserver le libreéchange. Président du Directoire de 1863 à 1886, le commerçant saint-gallois Carl Emil Viktor von Gonzenbach joue un rôle majeur lors de la création de l’Union suisse du commerce et de l’industrie. Comme cette corporation commerciale n’accepte que des citoyens de la ville de St-Gall, une chambre de commerce et de l’industrie se crée au niveau cantonal en 1875 ; à l’instar du Directoire commercial, elle devient également membre de l’USCI en 1887. Au XXe siècle, Ueli Forster, entrepreneur textile de Saint-Gall, est membre du Directoire commercial et, après la fusion de celui-ci avec la Chambre de commerce et d’industrie cantonale en la Chambre de commerce et d’industrie de Saint-Gall-Appenzell en 1991, il en devient le premier président. En 2001, Forster reprend la présidence d’Economiesuisse, nouvellement créée.
La maison de la société du Notenstein à côté de la porte Brühl à Saint-Gall, XVIIe siècle.
Le Blocus continental napoléonien (1803–1813)
La Suisse prise dans une guerre économique mondiale
Les guerres napoléoniennes coûtent la vie à des millions de personnes. La domination napoléonienne s’accompagne par ailleurs d’une longue guerre économique – surtout contre l’Angleterre – qui appauvrit l’ensemble du continent européen. La France ayant connu un état proche de la guerre civile pendant la décennie qui suit la Révolution française de 1789, le règne de Napoléon paraît souvent sous un jour positif dans l’historiographie. Napoléon Bonaparte devient en 1799 l’un des trois consuls à la tête de la France, se fait sacrer empereur en 1804 et est exilé par les Alliés sur l’île britannique d’Elbe en 1815.
Au XVIIIe siècle, la France, ancienne puissance économique, stagne et accumule les dettes sous le règne du Roi-Soleil Louis XIV et de ses successeurs. Pendant ce temps, l’Angleterre et les Pays-Bas se bâtissent un empire dans le Nouveau Monde, en Amérique et en Asie. La Suisse et certaines régions allemandes bénéficient de cette expansion politique au niveau économique en appuyant leur prospérité sur le commerce et la transformation industrielle de denrées coloniales. Au temps de la Révolution déjà, l’élite dirigeante de France considère cela d’un mauvais œil. Après sa prise du pouvoir, Napoléon s’attèle d’abord à briser la suprématie économique de l’Angleterre. Il annihile ensuite celle des Pays-Bas en les annexant purement et simplement et en intronisant son frère Louis comme roi. Napoléon exige des autres pays du continent européen qu’ils rompent tout contact avec l’Angleterre et s’inscrivent dès lors dans un système dit continental. Non seulement l’importation de marchandises anglaises est interdite, mais aucun Anglais n’est autorisé à fouler le sol du continent européen. Conscient qu’il n’a pas les moyens militaires de conquérir les colonies d’outre-mer des Anglais et des Néerlandais, il annexe sans autre forme de procès les Pays-Bas, puis coupe les flux commerciaux des colonies et des États-Unis d’Amérique – qui viennent d’acquérir leur indépendance – vers l’Angleterre. Il accepte que le Blocus précipite des millions d’européens dans la misère, d’autant plus qu’il sacrifie des centaines de milliers de soldats sur les champs de bataille. Napoléon a une piètre opinion de la Confédération et il l’exprime aux émissaires suisses dès 1802 : « Vous ne pouvez avoir de grandes finances. Vous êtes un pays pauvre. » Cela ne l’empêche pourtant pas de dilapider le trésor public de Berne qu’il s’est approprié pour financer