Manuel de la procédure d'asile et de renvoi. Constantin Hruschka

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Manuel de la procédure d'asile et de renvoi - Constantin Hruschka

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quand bien même le requérant n’aurait pas encore été entendu sur ses motifs d’asile. Le requérant doit avoir un intérêt digne de protection au moment du dépôt de la requête et pouvoir démontrer la bonne foi de sa démarche.40 Les mesures entreprises pour inciter le SEM à statuer au plus vite ne sont pas une condition formelle d’entrée en matière, mais il convient d’en tenir compte. Dans le cadre d’un recours pour déni de justice formel, la jurisprudence du TF exige que le recours soit déposé dans les 30 jours qui suivent le refus de l’autorité de se prononcer sur la question.41 Quant au mémoire de recours, il doit répondre aux exigences de forme générales prescrites par la PA (art. 52 PA).

      Conséquences juridiques – Lorsque le TAF entre en matière sur le recours, il n’examine pas le fond de l’affaire, mais se détermine uniquement sur le caractère raisonnable de la durée de la procédure. Si le déni de justice est admis, il renvoie généralement le dossier à l’autorité inférieure qu’il exhorte à statuer dans les meilleurs [117]délais. L’examen de la demande se poursuit idéalement plus rapidement, bien que le Tribunal ne fixe généralement pas de délai contraignant pour agir.42

      Délais de traitement du TAF – En tant qu’autorité de surveillance administrative,43 le Tribunal fédéral peut recevoir des plaintes lorsque le TAF s’abstient indûment de rendre une décision ou tarde à le faire (art. 71 PA). Cette dénonciation ne confère aucun droit au dénonciateur qui ne dispose pas des droits de partie (art. 71 al. 2 PA). Le Tribunal fédéral examine alors uniquement si le cours de la procédure devant le TAF correspond au déroulement régulier d’une affaire. Les critères développés par la jurisprudence dans le cadre du recours pour retard injustifié s’appliquent par analogie.44 En pratique, une procédure de trois ans et neuf mois (45 mois) ne correspond objectivement pas au déroulement ordinaire d’une affaire.45 Le TAF a également été condamné pour violation du devoir de célérité dans le cadre d’une procédure d’asile (menée en parallèle à une procédure d’extradition) ayant duré 21 mois, dont 9 d’inactivité complète,46 ainsi que dans le cadre d’une demande de révision durant laquelle aucune mesure d’instruction n’a été prise pendant 21

      mois.47

      Conformément au droit administratif général, une demande est radiée du rôle lorsqu’elle devient sans objet ou qu’un intérêt juridique fait défaut.48 Cela arrive notamment lorsque le requérant d’asile retire sa demande dans la perspective d’une autre autorisation de séjour, par exemple à la suite d’un mariage, ou lorsque le requérant est devenu introuvable. Lors de la révision du 14 décembre 2012,49 Le législateur a introduit de nouveaux motifs de classement propres aux procédures d’asile. Le SEM est ainsi autorisé à classer une demande sans décision formelle dans les cas suivants :

       [118]Le requérant, sans raison valable, ne respecte pas son obligation de collaborer ou ne se tient pas à la disposition des autorités compétentes en matière d’asile pendant plus de vingt jours, sous réserve de la Convention de Genève (art. 8 al. 3bis LAsi ; voir chap. XII, pt 3.2)

       Suite à l’entretien de conseil, le requérant retire une demande d’asile qui n’est pas conforme à la loi ni suffisamment justifiée (art. 25a LAsi)

       La demande de réexamen (art. 111b LAsi) ou la demande multiple (art. 111c LAsi) est infondée ou présente de manière répétée les mêmes motivations (voir chap. XIII, pt 7.2 s).

      Ces nouveaux motifs de classement poursuivent des objectifs punitifs (en cas de violation du devoir de collaborer ou de demandes dites abusives) ou d’économie de procédure qui dépassent largement le cadre jusqu’ici admis du classement des demandes devenues sans objet. Or, en renonçant à l’examen matériel des motifs d’asile, la décision de classement est susceptible d’avoir de graves conséquences pour les personnes touchées. Elle doit donc répondre à des exigences procédurales strictes pour assurer sa conformité aux principes généraux du droit et aux engagements internationaux de la Suisse.50 Cela requiert l’existence de voies de contestation auprès d’une autorité judiciaire, l’examen subséquent d’éventuels obstacles à l’exécution du renvoi par une autorité de préférence fédérale et la possibilité de rouvrir un dossier, voire de déposer une seconde demande d’asile suite au classement.

      Voies de contestation – La possibilité de contester un classement sans décision formelle n’est pas encore totalement clarifiée. Le classement d’une demande doit selon nous pouvoir être contesté conformément aux dispositions des art. 105 ss LAsi, dans le respect des garanties de procédure de l’art. 29 Cst. et du droit à un recours effectif de l’art. 13 CEDH.51 Par le classement de la demande, l’autorité prive le requérant de l’examen de ses motifs d’asile et de la possibilité de se voir accorder une protection. L’intérêt juridique défendu est de haute importance et [119]l’appréciation de l’autorité soulève des questions de droit complexes.52 Ainsi, à titre d’exemple, le caractère suffisamment fondé ou non d’une demande de réexamen ne peut être soumis à la seule appréciation de l’autorité administrative, au risque de contrevenir aux droits fondamentaux des personnes concernées (voir chap. XIII, pt 7.2).53

      La proportionnalité d’une décision de renvoi sans examen préalable des motifs d’asile ou des obstacles à l’exécution du renvoi doit à notre sens également être soumise au contrôle juridictionnel d’une autorité de recours lorsqu’elle fait suite à une violation du devoir de collaborer. Déterminant quant aux droits et aux obligations dont peuvent se prévaloir les requérants, le classement constitue à notre sens une décision au sens de l’art. 5 PA et devrait à ce titre pouvoir être contesté directement auprès de l’instance de recours. Le SEM ne partage toutefois pas cet avis.54 Dans l’attente d’une clarification du TAF sur la nature juridique de la décision de classement, la possibilité de demander une décision en constatation au SEM conformément à l’art. 25 PA subsiste et permet d’assurer l’exercice du droit au recours.55

      Examen des obstacles à l’exécution du renvoi – Le renvoi ne peut être exécuté sans qu’il ne soit procédé à un examen préalable des obstacles qui s’y opposeraient (art. 83 et 84 LEtr). Dans le cadre de procédures de droit des étrangers, il revient actuellement aux cantons d’examiner en dernier lieu l’existence d’obstacles à l’exécution du renvoi selon la LEtr. Cette solution semble toutefois insatisfaisante au vue de la grande variabilité des pratiques cantonales et du manque d’expertise des autorités de police quant à la situation qui prévaut dans les pays d’origine.56 La possibilité laissée aux cantons de proposer l’admission provisoire au SEM (art. 83 [120]al. 6 LEtr) ne remplit pas les exigences légales nécessaires à garantir le respect du principe de non-refoulement.

      Garanties procédurales – Le requérant d’asile doit être entendu sur les motifs qui s’opposeraient au classement préalablement à la décision du SEM de classer le dossier (droit d’être entendu au sens de l’art. 29 Cst.). La décision de classement doit ensuite être communiquée par écrit afin que le requérant puisse s’y opposer utilement.57 A noter également les problèmes de systématique de la loi apparus lors de l’introduction hâtive des dispositions58 qui prévoient de manière contradictoire le classement de la demande en cas de violation non qualifiée du devoir de collaborer et l’absence d’audition sur les motifs d’asile lorsque la violation est qualifiée de grave.59

      Réouverture ou nouvelle demande – La réouverture de la procédure, voire le dépôt d’une nouvelle demande d’asile, doit être possible dès qu’apparaissent des indices de mise en danger qui –

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