Manuel de la procédure d'asile et de renvoi. Constantin Hruschka
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Les coûts d’une durée de procédure excessive : La durée des procédures engendre des coûts notables, non seulement pour les autorités, mais également pour les requérants d’asile. Alors qu’une part de ces coûts se laisse facilement déduire des frais d’entretien et administratifs engendrés tout au long de la procédure, une autre partie, plus difficilement quantifiable, se rapporte aux coûts sociaux et économiques de la « désintégration » des demandeurs d’asile. L’incertitude sur l’avenir, et les problèmes de santé qui l’accompagnent, ralentissent considérablement le processus d’intégration, engendrant des coûts qui se répercutent alors sur le système de santé et des assurances sociales. Sur les coûts de la procédure d’asile et la répartition des frais entre cantons et Confédération, il est utile de se référer au rapport final du groupe de travail sur la restructuration, Planification générale de la restructuration du domaine de l’asile, du 18 février 2014.24
[114]4.3 Déni de justice et retard injustifié
L’obligation de célérité – Le requérant peut se prévaloir du traitement de sa demande « dans un délai raisonnable » en vertu des garanties de procédure de l’art. 29 al. 1 Cst. Un recours pour déni de justice peut être déposé auprès de l’autorité de recours lorsque le SEM s’abstient de rendre une décision sans en avoir le droit ou tarde à le faire (art. 46a PA). On parle de déni de justice formel (Rechtsverweigerung) lorsque l’autorité refuse expressément de statuer alors qu’elle en a l’obligation ou lorsqu’elle ne statue que partiellement. Le déni de justice matériel peut être, quant à lui, constaté en cas de retard injustifié (Rechtsverzögerung), lorsque l’autorité tarde sans droit à statuer ou décide à tort de suspendre la procédure.
Le délai raisonnable – Le délai au-delà duquel l’inaction de l’autorité contrevient à son obligation de statuer dépend de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce. Il s’apprécie au cas par cas sur la base d’éléments objectifs, tels que le degré de complexité de l’affaire, le temps qu’exige l’instruction de la procédure, l’enjeu que revêt le litige pour l’intéressé, ou encore le comportement de ce dernier et celui des autorités compétentes. L’importance du bien juridique défendu doit être prise en considération, tout comme les répercussions que peut avoir une attente excessive sur la santé du requérant.25 Il doit également être tenu compte des délais d’ordre de la LAsi (art. 37 et 37b LAsi). Dans des circonstances concrètes et objectives, le SEM peut justifier une prolongation de la procédure, mais ne peut s’appuyer sur des motifs liés à une organisation déficiente, à un manque de personnel ou à une surcharge structurelle.26 Il n’est pas important de savoir s’il a commis une faute, mais uniquement de déterminer s’il a agit dans un délai raisonnable.
Le TAF a estimé que l’autorité administrative a contrevenu à son devoir de célérité dans les cas suivant (déni de justice matériel)27 :
Procédure ordinaire :
Plus de deux ans se sont écoulés depuis le dernier acte de procédure sans que la requérante érythréenne n’ait été convoquée à l’audition sur les motifs [115]d’asile. La pénurie d’interprète en tigrigna ne justifie pas l’inactivité du SEM.28
Aucune mesure d’instruction reconnaissable n’a été entreprise pendant 25 mois.29
Demande de réexamen30 :
dans le cadre de la seconde demande de réexamen d’une femme éthiopienne accompagnée de son nouveau-né et traumatisée par les viols subis, le TAF a estimé qu’il était opportun de conclure rapidement la procédure de réexamen. Les quatorze mois d’inactivité du SEM depuis le dépôt de la demande de réexamen violent l’obligation de célérité.
Procédures d’ambassade et autorisations d’entrer en Suisse :
Au vu de la situation délicate des requérants d’asile érythréens au Soudan, le délai de 17 mois dépasse clairement le délai raisonnable pour statuer sur l’entrée en Suisse.31
L’attente de 11 mois pour la remise d’un formulaire type relatif aux motifs d’asile, malgré les demandes répétées des requérants, viole l’obligation de diligence de l’autorité.32
Mineurs non accompagnés – L’obligation de célérité prend une importance particulière dans le cadre des procédures de mineurs non accompagnés. L’incertitude quant à l’issue de la procédure fait peser sur le mineur une pression psychique considérable et la durée excessive de la procédure peut avoir des répercutions néfastes sur son intégration, en raison notamment des difficultés d’accès à la formation. Au moment de l’impression, le TAF n’avait pas encore défini de portée propre à la nouvelle disposition de l’art. 17 al. 2bis LAsi qui impose au SEM une diligence particulière dans le traitement prioritaire des demandes de MNA.33 En l’espèce, il a admis le déni de justice dans les cas de MNA suivants :
Déni de justice constaté le 19 mars 2015 pour une demande d’asile déposée le 22 février 2011 par trois frères et sœurs MNA. Le SEM a cessé ses échanges avec le HCR en vue de la clarification de l’état de fait en mars 2013 et n’a pas réagit aux demandes répétées des requérants envoyées dès le mois de mai 2014.34
[116]Déni de justice constaté le 10 janvier 2014, dans le cas d’un mineur devenu non accompagné au moment du décès de son père survenu après le dépôt d’une demande d’asile en novembre 2010. Malgré de nombreux rappels adressés au SEM, le garçon n’avait pas été entendu sur ses motifs d’asile plus de trois ans après le dépôt de la demande.35
L’absence de mesures de traitement d’une demande d’un MNA afghan pendant 24 mois a été jugé contraire à l’obligation de diligence de l’autorité.36 Le même constat a été tiré dans une autre affaire, alors que l’autorité est restée inactive pendant deux ans et demi.37
Déni de justice formel – Lorsque le SEM refuse indûment de statuer sur une question de droit ou ne statue que partiellement, le TAF admet un déni de justice formel et renvoie généralement le dossier à l’autorité inférieure. Dans un cas d’espèce, le SEM a contrevenu à son devoir de statuer en refusant de se prononcer sur la demande