Les nuits mexicaines. Aimard Gustave
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Le comte sourit à cette boutade.
– De convention ou non, moi je trouve cette vue admirable.
– Oui, oui, je vous le répète, c'est assez bien réussi. Songez combien ce paysage devait être beau, aux premiers jours du monde, puisque malgré tous leurs efforts maladroits, les hommes ne sont pas encore parvenus à le gâter entièrement.
Les rires du jeune homme redoublèrent à ces paroles.
– Sur ma foi! dit-il, vous êtes un charmant compagnon, monsieur Olivier, et lorsque je me serai séparé de vous, bien souvent je regretterai votre agréable compagnie.
– Alors préparez-vous à me regretter, monsieur le comte, répondit-il en souriant, car nous n'avons plus que quelques instants à passer ensemble.
– Comment cela?
– Une heure tout au plus, pas davantage, mais continuons notre route: le soleil commence à devenir chaud et l'ombrage des arbres qui sont là-bas nous sera fort agréable.
Ils lâchèrent la bride à leurs chevaux et reprirent au petit pas la descente presqu'insensible qui les devait conduire dans la plaine.
– Est-ce que vous ne commencez pas à éprouver le besoin de vous reposer de vos fatigues, monsieur le comte? demanda l'aventurier en tordant nonchalamment une cigarette.
– Ma foi non; grâce à vous ce voyage m'a paru charmant, bien qu'un peu monotone.
– Comment, monotone?
– Dame, en France on nous fait des récits effrayants des pays d'outremer, où dit-on on trouve à chaque pas des bandits embusqués, où l'on ne saurait faire dix lieues sans risquer vingt fois sa vie; aussi n'est-ce qu'avec une certaine appréhension que nous débarquons sur ces rivages. J'avais la tête farcie d'histoires à faire dresser les cheveux; je me préparais à des surprises, des guets-apens, des combats acharnés, que sais-je encore! Eh bien, pas du tout, j'ai fait le voyage le plus prosaïque du monde, sans le plus petit accident que je puisse raconter plus tard.
– Vous n'êtes pas encore hors du Mexique.
– C'est vrai, mais mes illusions sont détruites, je ne crois plus aux bandits mexicains, ni aux féroces Indiens; ce n'est pas la peine de venir si loin, pour ne rien voir de plus que ce qu'on verrait dans son pays. Au diable les voyages! Il y a quatre jours, je croyais que nous allions avoir une aventure; pendant que vous m'aviez laissé seul, je formais des projets de bataille à perte de vue, et puis, au bout de deux longues heures d'absence, vous revenez tout souriant m'annoncer que vous vous étiez trompé et que vous n'aviez rien vu; il m'a fallu renfoncer toutes mes intentions belliqueuses. Définitivement, c'est ne pas avoir de chance.
– Que voulez-vous? répondit l'aventurier avec un accent d'imperceptible ironie, la civilisation nous gagne tellement que nous ressemblons aujourd'hui, à part quelques légères nuances, aux peuples du vieux monde.
– Riez, riez, moquez-vous bien de moi, je vous en laisse parfaitement le droit; mais revenons s'il vous plaît à notre sujet.
– Revenons-y, je ne demande pas mieux, monsieur le comte. Ne m'avez-vous pas, en causant avec moi, dit, entre autres choses, que vous aviez l'intention de vous rendre à l'hacienda del Arenal, et que si vous ne vous détourniez pas de votre route, au lieu de pousser tout droit à México, c'était par la raison, que vous craigniez de vous égarer dans un pays que vous ne connaissez pas, et de ne point rencontrer des personnes capables de vous remettre dans le bon chemin?
– Je vous ai dit cela, en effet, monsieur.
– Oh! Puisqu'il en est ainsi, la question se simplifie extraordinairement.
– Comment cela?
– Tenez, monsieur le comte, regardez devant vous. Que voyez-vous?
– Un magnifique bâtiment qui ressemble à une forteresse.
– Eh bien, ce bâtiment est l'hacienda del Arenal.
Le comte jeta un cri d'étonnement.
– Il serait possible! Vous ne me trompez pas, dit-il?
– Dans quel but? répondit doucement l'aventurier.
– Oh! Mais de cette façon la surprise est bien plus charmante que je ne le supposais d'abord.
– Ah! A propos, j'oubliais un détail qui ne manque pas, cependant, que d'avoir pour vous une certaine importance: vos domestiques et tous vos bagages sont rendus depuis deux jours déjà à l'hacienda.
– Mais comment mes domestiques ont ils été informés?
– C'est moi qui les ai avertis.
– Vous ne m'avez presque pas quitté.
– C'est vrai, quelques instants seulement, mais cela a suffi.
– Vous êtes un aimable compagnon, monsieur Olivier; je vous remercie sincèrement de toutes vos attentions pour moi.
– Allons donc, vous plaisantez.
– Connaissez-vous le propriétaire de cette hacienda.
– Don Andrés de la Cruz? Très bien.
– Quel homme est-ce?
– Au moral ou au physique?
– Au moral.
– Un homme de cœur et d'intelligence; il fait beaucoup de bien, et est accessible aux pauvres comme aux riches.
– Hum! C'est un magnifique portrait que vous faites-là.
– Je reste au-dessous de la vérité; il a beaucoup d'ennemis.
– Des ennemis?
– Oui, tous les coquins du pays, et grâce à Dieu, ils foisonnent sur cette terre bénie.
– Et sa fille doña Dolores?
– C'est une délicieuse enfant de seize ans, bonne plus encore que belle; innocente et pure, ses yeux reflètent le ciel; c'est un ange que Dieu s'est plu à égarer sur la terre, pour faire honte aux hommes sans doute.
– Vous m'accompagnerez à l'hacienda, n'est-ce pas, monsieur? dit le comte.
– Non, je ne vois pas le señor don Andrés de la Cruz; dans quelques minutes j'aurai l'honneur de prendre congé de vous.
– Pour nous revoir bientôt, je l'espère.
– Je n'ose vous le promettre, monsieur le comte. Ils marchèrent encore pendant quelques instants silencieux aux côtés l'un de l'autre.
Ils avaient hâté le pas de leurs chevaux et approchaient