La San-Felice, Tome 05. Dumas Alexandre

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La San-Felice, Tome 05 - Dumas Alexandre

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que vous avez reçu une lettre de lui, ou auparavant?

      –Auparavant et depuis.

      –Lui est-il arrivé quelque accident?

      –Aucun, Dieu merci!

      –Tant mieux, car c'est une noble et vigoureuse nature; un de ces hommes comme nous n'en aurons jamais assez dans notre pauvre royaume de Naples. Vous avez donc un autre sujet de chagrin?

      Luisa ne répondit point, mais ses yeux se mouillèrent.

      –Vous n'avez point à vous plaindre de San-Felice, je présume? demanda Cirillo.

      –Oh! s'écria Luisa en joignant les mains, c'est l'ange de la paternelle bonté.

      –Je comprends, il part et vous restez.

      –Il part, et je le suis.

      Cirillo regarda la jeune femme d'un oeil étonné qui, peu à peu, se mouilla de larmes.

      –Et vous, lui dit-il, quel ange êtes-vous? Je n'en connais pas au ciel un seul dont vous ne soyez digne de porter le nom, et qui soit digne de porter le vôtre.

      –Vous voyez bien que je ne suis pas un ange, puisque je pleure; les anges ne pleurent pas pour faire leur devoir.

      –Faites-le, et pleurez en le faisant, vous n'en aurez que plus de mérite; faites-le, et, moi, je ferai le mien en lui disant combien vous l'aimez, combien vous avez souffert. Allez! et, de temps en temps, dans vos prières, dites un mot de moi: ce sont les voix comme la vôtre qui ont l'oreille du Seigneur.

      Cirillo voulut lui baiser les mains; mais Luisa lui jeta ses bras au cou.

      –Oh! embrassez-moi comme un père embrasse sa fille, lui dit-elle.

      Et, comme l'illustre docteur l'embrassait avec un respect mêlé d'admiration:

      –Oh! vous le lui direz! vous le lui direz! n'est-ce pas? murmura-t-elle tout bas à son oreille.

      Cirillo lui serra la main en signe de promesse.

      San-Felice entra et trouva Luisa dans les bras de son ami.

      –Eh bien, lui dit-il en riant, c'est donc en les embrassant que vous donnez des consultations à vos malades, docteur?

      –Non; mais c'est en les embrassant que je prends congé de ceux que j'aime, de ceux que j'estime, de ceux que je vénère. Ah! chevalier, chevalier, vous êtes un homme heureux!

      –Il est si digne de l'être, dit Luisa tendant la main à son mari.

      –Ce n'est pas toujours une raison, dit Cirillo. Et maintenant, au revoir, chevalier, car j'espère que nous nous reverrons. Allez! et servez votre prince. Moi, je reste et vais tâcher de servir mon pays.

      Puis, réunissant la main du mari et celle de la femme dans la sienne:

      –Je voudrais être saint Janvier, leur dit-il, non pas pour faire un miracle deux fois par an, ce qui est bien joli cependant dans notre époque où les miracles sont rares, mais pour vous bénir comme vous méritez de l'être. Adieu!

      Et il s'élança hors de la maison.

      San-Felice le suivit jusqu'au perron, lui fit encore un signe d'adieu de la main; puis, revenant à sa femme:

      –A dix heures, lui dit-il, la voiture du prince vient nous prendre ici.

      –A dix heures, je serai prête, répondit Luisa.

      Elle l'était, en effet. Après avoir dit adieu à la chambre bien-aimée, après avoir pris congé de tous les objets qu'elle renfermait, après avoir coupé une boucle de ses beaux cheveux blonds, après avoir noué avec eux, aux pieds du crucifix, un billet sur lequel elle avait écrit ces quatre mots: «Mon frère, je t'aime!» elle prit le bras de son mari, et, éplorée comme la Madeleine, mais pure comme la Vierge, elle monta avec lui dans la voiture du prince.

      Michele monta sur le siége.

      Nina, les lèvres frémissantes de joie, baisa la main de sa maîtresse.

      Puis la portière se referma et la voiture partit.

      Nous avons dit le temps qu'il faisait. Le vent, la grêle et la pluie battaient les vitres de la voiture, et le golfe que, malgré l'obscurité, l'on apercevait dans toute son étendue, n'était qu'une nappe d'écume boursouflée par les vagues. San-Felice jeta un regard d'effroi sur cette mer furieuse, que Luisa, battue d'une tempête bien autrement violente, ne voyait même pas. L'idée du danger auquel il allait exposer la seule créature qu'il aimât au monde, l'épouvanta. Il tourna les yeux vers Luisa. Elle était pâle et immobile dans l'angle de la voiture. Ses yeux étaient fermés, et, ne croyant pas être vue dans l'obscurité, elle laissait couler des larmes sur ses joues. Alors, pour la première fois, l'idée vint au chevalier que sa femme lui faisait quelque grand sacrifice qu'il ignorait. Il prit sa main et la porta à ses lèvres. Luisa rouvrit les yeux, et, souriant à son mari à travers les larmes:

      –Que vous êtes bon, mon ami, lui dit-elle, et que je vous aime!

      Le chevalier passa un bras autour de son cou, appuya la tête de Luisa contre sa poitrine, et, relevant le capuchon de la mante de satin qui les couvrait, il baisa ses cheveux d'une lèvre frémissante et plus que paternelle cette fois.

      Luisa ne put retenir un gémissement.

      Le chevalier fit semblant de ne pas l'entendre.

      On arriva à la descente de la Vittoria.

      Une barque, montée de six rameurs, attendait, se maintenant à grand'peine contre les vagues qui la poussaient vers la plage.

      A peine les rameurs eurent-ils vu la voiture s'arrêter, que, comprenant que ceux qu'ils attendaient étaient dedans, ils crièrent:

      –Faites vite! la mer est mauvaise; à peine sommes-nous maîtres de la barque.

      Et, en effet, San-Felice n'eut qu'à jeter un coup d'oeil sur l'embarcation pour voir qu'elle et ceux qui la montaient étaient en danger de perdition.

      Le chevalier dit un mot tout bas au cocher, un mot tout bas à Michele, prit Luisa par le bras et descendit avec elle jusqu'à la plage.

      Avant qu'ils fussent arrivés au bord de la mer, une vague, en se brisant sur le sable, les avait couverts d'écume.

      Luisa jeta un cri.

      Le chevalier la prit entre ses bras et la pressa contre son coeur.

      Puis, appelant Michele d'un signe:

      –Attends, dit-il à Luisa; je descends dans la barque, et, une fois descendu, Michele et moi, nous t'aiderons à descendre à ton tour.

      Luisa en était à ce point de la douleur qui précède le complet anéantissement des forces et qui laisse à peine à la volonté la faculté de s'exprimer. Elle passa donc, presque sans s'en apercevoir, des bras du chevalier dans ceux de son frère de lait.

      Le chevalier s'approcha résolument de la barque, et, au moment où, à l'aide d'une gaffe, deux hommes la maintenaient, sinon immobile, du moins proche du rivage, il sauta dans l'embarcation en criant:

      –Au

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