La Cité Ravagée. Scott Kaelen

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La Cité Ravagée - Scott Kaelen

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a bougé !"

      "Tu as du le faire bouger, c'est tout."

      Sa bouche se remplit de salive. Il déglutit. "Ouais. Rien qu'un cadavre. Bien sûr. Un cadavre, bien sûr !" Il émit un rire, bref et hystérique. Surprenant le regard amusé de ses amis, il s'éclaircit la gorge et se calma.

      Le joyau était dans les mains d'Oriken. Il le tint à hauteur des yeux et l'observa, indifférent au macchabée qui les regardait. Jalis s'empara de la lampe posée sur le piédestal et l'éleva à la hauteur de l'épaule d'Oriken. La lumière étincelait sur les facettes du joyau. La face avant était circulaire, l'anneau d'argent serti fermement sur son pourtour semblant forgé dessus. De côté, l'objet était plus plat mais renflé en son centre autour d'un noyau de teinte sombre qui se brisait en prismes à la lueur de la lampe. La tâche noire évoquait pour Dagra les œufs aux jaunes noircis d'un balukha du soir, ou à une tâche d'encre prise dans une sculpture de verre. Il réévalua son estimation de la valeur esthétique du joyau.

      Oriken brossa l'arrière du bijou de sa main. Son visage montrait du dégoût. "On nettoiera ça plus tard. Il y a un peu de son visage collé dessus."

      L'estomac de Dagra se souleva et ses genoux fléchirent. Il s'agrippa au piédestal près de lui.

      Jalis ouvrit son sac à dos et donna une couverture à Oriken. Elle maintint le sac ouvert pendant qu'il enveloppait le bijou et le fourra à l'intérieur. Puis elle resserra la corde et fit un nœud, attacha les courroies et enfila le sac sur son dos.

      "J'espère que c'était ta couverture et pas la mienne," lui dit Dagra. Comme il relâchait le piédestal, ses yeux se posèrent sur la tête sans yeux, sans nez, et à présent sans mâchoire, de Cunaxa. Alors qu'il jetait à l'ancêtre des Chiddari un regard noir, la tête bougea à nouveau.

      "Douce mère des prophètes ! Ne me dites pas que j'ai vu ce que je viens de voir !" La tête était inclinée, comme un enfant attentif qui voulait savoir ce qu'était tout ce grabuge.

      "Tu peux lâcher mon bras, Dagra," dit Jalis.

      Il marmonna des excuses et tituba vers le mur, s'appuya contre le mur et vomit. Quand il eut finit, il essuya sa barbe de sa manche et se retourna pour voir Jalis et Oriken qui l'observaient, leurs visages semblant de cendre dans la lueur de la lampe.

      Dagra se força à rire. "Ah, je ne sais pas d'où ça m'est venu." D'un geste de la main, il refusa le mouchoir que Jalis lui offrait. "Non. Ça va aller, vraiment. Juste un..." Il pouvait sentir le cadavre qui le regardait mais maintint toute son attention fermement sur Jalis. "Nous avons ce que nous sommes venus chercher. Fichons le camp d'ici. Pas de raison de s'attarder, n'est-ce pas ?"

      Jalis acquiesça et se retourna pour partir mais Oriken mit une main sur son épaule. "Pourquoi ne nous faisons-nous pas un peu plaisir en partant ?" D'un geste de la main, il désigna les piédestaux et les alcôves où des pierres précieuses chatoyaient dans l'ombre. Alors que Jalis soupesait sa proposition, il insista. "On devrait au moins prendre celles sur les piédestaux pour notre cliente, puisqu'ils font manifestement partie du lot avec le joyau. Non ? Après si elle n'en veut pas..." il haussa les épaules.

      Jalis n'eut pas l'air convaincu.

      "Tais-toi et avance," dit Dagra. Il prit la lampe des mains de Jalis et s'engouffra dans le couloir ; ses amis lui emboîtèrent le pas, suivant la seule source de lumière.

      "Le contrat ne fait état que du joyau," dit Jalis. "Si nous prenons autre chose, ça pourrait être considéré comme sacrilège."

      Dagra proféra un juron. "Tout cet endroit est un sacrilège."

      Oriken railla. "Pourquoi est-ce acceptable de voler le plus grand des trésors et pas ceux plus petits ?"

      "Eh," dit Jalis, "ce n'est pas moi qui ai défini les règles."

      Oriken soupira. "C'est pas comme si Dagra n'avait pas empoché une pierre."

      "Oh, fais pas l'enfant !" Dagra se retourna d'un coup. "Sérieusement ? C'est une babiole sans valeur ! Un joli caillou qui vient d'une tombe pillée !"

      Jalis grogna entre ses dents. "C'est ce que tu penses, Dag, ou c'est ce que tu espères ?"

      "Ne commence pas avec ça. Pas maintenant. Allez, on rentre, la richesse et un bain chaud nous attendent."

      "Aucune contestation là-dessus," dit-elle. "Orik, les tombeaux dans cette crypte appartiennent aux ancêtres de notre cliente. Si nous dérangeons ne serait-ce que l'un d'entre eux - et la plupart semble de peu de valeur en comparaison, comme l'a fait remarquer Dagra - ce serait voler Cela elle-même, indépendamment de nos intentions, aussi bien motivées qu'elles puissent être." Elle regarda Oriken attentivement. "Dagra a trouvé sa pierre dans des décombres ; il peut la garder mais on laisse le reste."

      "C'est toi le patron," dit Oriken en poussant un soupir. "Et la cité ?"

      Jalis aspira l'air entre ses dents serrées et lui lança un regard de côté. "Nous parlerons de ça après avoir quitté le cimetière. Nous avons déjà perdu plus de la moitié la journée."

      Oriken la regarda un moment mais garda le silence. Leur conversation retomba dans le silence alors qu'ils revenaient sur leurs pas le long du couloir.

      Dagra se fichait de cette pierre de sang qu'il avait ramassée. Ses pensées étaient tournées vers le joyau funéraire qui allait leur rapporter une véritable petite fortune. Mais, plus que cela, il pensait à la matrone de la crypte, à son regard sans yeux qui les regardait partir de son lieu de repos.

      Bientôt, le trou de la sépulture profanée se profila. Les traces de pas, à présent recouvertes des empreintes de Dagra et de ses compagnons, menaient de la dalle cassée vers l'escalier...

      Afin de distraire son imagination fertile, Dagra dit, "Orik a raison sur un point, quand même. C'est discutable que nous puissions profaner une tombe parce que ça fait partie d'un contrat et qu'en dehors de ce contrat, ce soit répréhensible." Il émit un rire sec et fouilla dans sa poche à la recherche de la pierre de sang. "Vous savez quoi ? Je n'en veux même pas de cette camelote. Je pensais que ça aurait l'air joli sur mon glaive mais avec les sous que nous allons gagner, je pourrais même acheter les tétons scintillants de Khariali si je le voulais."

      "Vaut mieux les tétons de Khariali, plutôt que les cailloux de Cherak," plaisanta Oriken.

      D'un coup de poignet, Dagra balança la pierre de sang dans les ténèbres et écouta son écho retentir dans le couloir.

      "Dag," à côté de lui, Jalis lui fit un sourire. "Je n'ai pas dit que les autres cryptes dans le cimetière n'en valaient pas la peine, juste la crypte Chiddari. Tout cet endroit a déjà été ravagé par une déesse et abandonné depuis des siècles. Quelques petits mortels ne peuvent pas le profaner plus qu'il ne l'a déjà été."

      Dagra lui rendit son sourire, bien que le sien soit plus pâle. "C'est vrai. Mais je ne suis pas sûr que ça m'intéresse. C'est pas comme si on avait emmené des mules ; il nous faudrait trimbaler nous-mêmes tout ce qu'on aura trouvé à travers toute l'étendue du Plateau de Scapa et une partie de Caerheath. Merci, jeune fille, mais non. Je veux juste m'en aller de cet endroit maudit, mort et poussiéreux et respirer l'air frais, ravagé ou pas."

      Oriken marmonna alors qu'il marchait derrière eux, mais était-ce par approbation ou pas,

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