Le Coeur Brisé D'Arelium. Alex Robins
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Читать онлайн книгу Le Coeur Brisé D'Arelium - Alex Robins страница 11
— Approche, mon enfant, je ne vais pas te mordre !
Jelaïa fit une rapide révérence et se plaça devant lui, sentant qu’elle était jugée pour quelque chose dont elle n’avait pas connaissance.
— Praxis ! tonna le Baron. Comment va la récolte, mes sujets seront-ils bien nourris cet hiver ?
— Oui, mon Seigneur, en fait les silos débordent, peut-être que nous devrions…
— Débordent, hein ? Excellent, excellent. Vous auriez dû m’écouter et construire ce grenier à grains l’année dernière comme je vous l’avais conseillé, cela vous aurait évité bien des tracas.
— Oui, mon Seigneur, répondit Praxis avec un soupir résigné.
— Très bien. Maintenant, Jelaïa…
Avant que le Baron ne puisse continuer, une porte s’ouvrit de l’autre côté de la salle et la Baronne entra, ses dames d’honneur la suivant de près.
Elle était l’opposé de son mari à tous égards, une petite souris de femme au visage rond, aux cheveux courts, bouclés et grisonnants, et au sourire amical. Elle était facile à vivre, sociable et bavarde, appréciée des vassaux du Baron et de leurs épouses. Beaucoup d’entre eux avaient commis l’erreur de la trouver hédoniste et un peu simple d’esprit, lui disant en confidence des choses qu’ils n’auraient jamais songé à révéler au Baron lui-même.
Ce manque de jugement était parfaitement exploité par la Baronne, et par conséquent son mari était toujours bien informé des tractations les plus louches, et des alliances secrètes qui couvaient parmi ses nobles. Elle avait également une bonne connaissance des chiffres, se réunissant plusieurs fois par semaine avec Praxis pour discuter des finances de la Baronnie.
La Baronne adressa un sourire rapide à Jelaïa et s’assit à côté de son mari.
— Je vous demande pardon, mes dames et mes sires, dit-elle avec éclat. Les registres d’impôts m’ont tenue occupée.
Son mari roula des yeux et s’éclaircit la gorge.
— Ahem. En effet. Revenons au sujet qui nous préoccupe. Alors, par où commencer ? Bien. Jelaïa, tu es maintenant une jeune femme, dans la fleur de l’âge, pour ainsi dire, et ta mère et moi avons discuté…
Oh non, pensa Jelaïa.
— Et nous pensons qu’il est temps d’avancer dans notre projet de consolider nos alliances avec les Baronnies voisines.
Oh non non non.
— Morlak semble avoir plusieurs prétendants éligibles et une délégation de Kessrin arrivera ici demain–
— Non, Père, non ! Lâcha Jelaïa. Le Baron, peu habitué à être interrompu, fronça les sourcils.
— Je suis désolée, j’ai besoin d’air, dit-elle, désemparée, en s’enfuyant de la pièce, passant devant un Praxis surpris, le regard de son père brûlant dans son dos alors qu’elle s’échappa de l’enceinte étouffante du donjon et s’élança vers la ville.
Chapitre 4
LE RETOUR À JAELEM
“Je ne réfute pas l’importance des soldats. Il viendra un moment où chaque royaume aura besoin de se défendre. Je dirai simplement que les combattants, aussi nombreux ou bien entraînés soient-ils, ne sont qu’une petite partie de l’équation. Car que se passerait-il si le mur sur lequel ils se tiennent était trop fragile ? S’il s’effondrait sous son propre poids ? Si l’absence de fondations appropriées faisait qu’il s’enfonce dans la boue ou le sable ? Vous pouvez agir comme bon vous semble, ce sont vos temples et vos initiés. Mais je crois que le monde a déjà assez de soldats. Je vais former des bâtisseurs.”
Brachyura, Quatrième des Douze, 39 AD
*
Reed et Aldarin traversèrent rapidement le terrain plat entre la Fosse et Jaelem, suivant les pistes sinueuses créées par les animaux, serpentant entre des buissons d'épines et des acacias rabougris. Les vastes plaines s'étendaient devant eux sur des kilomètres dans toutes les directions, comme une mer d'ambre et de verdure, vide et sans vie, à l'exception de quelques troupeaux de chèvres sauvages et d'oiseaux de proie.
Ils parlèrent peu pendant leur première journée ensemble, chacun étant perdu dans ses propres pensées. Lorsqu'ils avaient besoin de parler, ils devaient crier pour se faire entendre par-dessus les rafales de vent incessantes qui leur projetaient du sable et de la terre au visage. Reed se frottait constamment les yeux, le nez, et la bouche, se maudissant d'avoir laissé son masque en cuir à la caserne. Après quelques heures, il déchira à contrecœur une bande de tissu de sa cape et l'attacha fermement autour du bas de son visage pour se protéger du plus gros de la saleté.
Aldarin ne semblait pas gêné par le vent, pas plus qu'il ne l'était par sa lourde armure. Ses longues foulées avalaient les kilomètres à un rythme régulier, ne ralentissant que lorsqu'il voyait que Reed était à la traîne ou pour vérifier qu'ils allaient dans la bonne direction.
La journée se prolongeait, le soleil qui s’était élevé haut dans le ciel descendait maintenant vers l'horizon, rafraîchissant l'air et étirant les ombres des arbres. Lorsqu'ils arrivèrent à un petit bosquet offrant un abri contre le vent, Reed, épuisé, suggéra de s’arrêter pour la nuit.
Aldarin accepta, et commença à enlever son armure. Le casque à cornes fut ôté en premier. Reed vit qu'il le pivota brusquement vers la gauche avant de le retirer comme s'il désengageait un système de verrouillage. Puis vinrent les gantelets, les grèves, les vambraces, les cuissardes et le plastron, chaque pièce empilée soigneusement sur le sol à côté de lui. Et enfin, une journée après leur première rencontre, Reed put découvrir le visage de Sire Aldarin, Chevalier des Douze.
Il avait la peau légèrement bronzée et des cheveux noirs, coupés très courts près du crâne. Des yeux bleu océan pénétrants sur un visage dur et anguleux. Son menton carré était rasé de près, une fine cicatrice traversant sa lèvre inférieure et descendant en zigzag vers son cou. Une deuxième cicatrice traversait l'arête d'un nez plat qui semblait s’être mal remis d’une ou deux fractures.
Sans son armure, la présence physique du chevalier n’avait en rien diminué. Au contraire, il était encore plus remarquable lorsqu'il était vêtu d'un simple jaque rembourré. Ses épaules fortes et larges et sa poitrine massive et râblée étaient accompagnées de bras musclés et athlétiques qui brillaient de transpiration après des heures de marche revêtu d’une armure de plates.
Il était différent, très différent, de ce que Reed avait imaginé. Dans son esprit, les Chevaliers des Douze devaient ressembler à des nobles au teint clair, aux cheveux longs, aux traits aquilins, et aux sourires parfaits. Aldarin, c'était autre chose.