Le Coeur Brisé D'Arelium. Alex Robins

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Le Coeur Brisé D'Arelium - Alex Robins

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corps des gardes et les dépouilles macabres. Ses yeux devinrent froids.

      — Ces hommes ne méritaient pas ce sort, dit-il calmement.

      Passant sa main par-dessus son épaule, il dégaina son impressionnante hache à double tranchant des anneaux métalliques qui la maintenaient au dos de son armure. Il tenait l'arme d'une main légère, comme si elle n'était qu'un jouet en bois.

      — Greylings ! lança-t-il, sa voix profonde et puissante traversant aisément la place. Vous avez profané les corps de ces hommes et tourné en dérision le Traité de Paix gravé dans la pierre par les Douze eux-mêmes. Cette trahison est inacceptable ! Je n'ai pas d'autre choix que de vous renvoyer à la Fosse. Apprêtez-vous !

      Levant sa hache, il la toucha légèrement au haut de son casque dans un salut de duelliste. Reed pouvait distinguer le mot « Brachyura » gravé en lettres d’argent sur le manche en bois.

      Les deux gardes avancèrent en titubant pour se placer aux côtés du chevalier, mais celui-ci leur fit signe de reculer et s’avança seul à la rencontre de l'ennemi.

      Cinq des créatures s’étaient rapprochées, se déployant à gauche et à droite pour se jeter sur lui des deux côtés. Aldarin, ralentissant à peine sa marche, fit tourner sa hache en un large arc de cercle. Les deux lames, tranchantes comme des rasoirs, décapitèrent le premier attaquant, entaillèrent profondément les torses de trois autres, et coupèrent le bras de la cinquième créature, envoyant sa main griffue virevolter à plusieurs mètres.

      Reed regardait le carnage bouche bée, incapable de comprendre ce qui venait de se passer. En quelques secondes, le chevalier avait tué plus de créatures qu'il n'en avait combattu lui-même au cours de la dernière heure.

      Il avait entendu les nombreuses rumeurs courant sur les Chevaliers des Douze. On racontait qu'ils vivaient dans l'isolement, loin des regards indiscrets, construisant et entretenant de grands temples sur des pics montagneux solitaires, des sables brûlants du désert ou des falaises d'îles balayées par le vent.

      On supposait qu'ils restaient là, enfermés dans l'isolement, affinant leurs corps et leurs esprits pour défendre le royaume, et que les Baronnies ne faisaient appel à eux qu'en cas de besoin. Tout comme la Vieille Garde, on pouvait autrefois trouver des chevaliers dans chaque grande province, au service des Barons et de leurs vassaux, mais c'était il y a bien longtemps. Reed ne connaissait personne ayant rencontré un Chevalier des Douze en chair et en os, pas même les plus anciens membres de la Garde.

      Jusqu'à maintenant.

      Aldarin avait atteint le centre de la place, entouré de tous côtés par les créatures. Sa hache s'élevait et s'abaissait dans des mouvements effilés et précis. Chaque coup était parfaitement coordonné, visant à infliger de lourds dégâts avec un minimum d'effort. Les Greylings ne portaient pas d'armure et n'avaient ni boucliers, ni armes pour parer les coups. Amassés sur la place, ils n'avaient nulle part où se replier, aucune ligne de retraite. Ils étaient en train de se faire massacrer.

      Reed vit certains d'entre eux essayer de se défendre, leurs griffes grattant l'armure du chevalier à la recherche d'une brèche, mais il n'y en avait pas. Les plaques segmentées glissaient les unes sur les autres à chaque mouvement d’Aldarin, ses aisselles et l'arrière de ses genoux protégés par des fins filets argentés de cotte de mailles.

      Sous le regard de Reed, l'un des attaquants sauta sur le dos du chevalier, plongeant ses griffes dans son cou, mais, en heurtant les plaques de l’armure, les doigts et articulations se tordirent et se brisèrent en craquant. La créature tomba en hurlant et se perdit dans la cohue des corps.

      Les morts s'accumulaient autour du chevalier, limitant ses mouvements et l'obligeant à distribuer des coups plus serrés. D'autres créatures lui sautaient sur les bras et le dos, le tirant vers l'avant et, pendant une interminable seconde, il tomba à genoux avant de les refouler avec un rugissement.

      Soudain, une clameur surnaturelle s’éleva de la Fosse, un hurlement pandémoniaque de colère et de mauvaiseté, décuplé par l'acoustique du gouffre. L’écho frappa Reed comme une vague de douleur physique, le faisant hurler et se boucher les oreilles. Un rapide coup d'œil sur le côté lui apprit que Yusifel faisait de même.

      Le son eut un effet immédiat sur les créatures restantes qui répondirent par des cris et des hurlements, s'éloignant d'Aldarin et détalant au-delà des remparts vers la Fosse.

      Aldarin se tenait debout, appuyé sur sa hache et grimaçant, mais il ne fit aucun mouvement pour les poursuivre. Avec un petit haussement d'épaules, il essuya les lames de son arme pour nettoyer le sang noir et les débris de chairs collés aux extrémités, puis il la rengaina soigneusement dans son dos, enfilant le manche dans les trois anneaux métalliques régulièrement espacés de l'épaule à la hanche.

      Il se retourna et lança un sourire aux gardes, ses dents blanches tranchant sur l'obscurité de son casque.

      — Louons les Douze ! dit-il avec révérence. Car Justice a été rendue aujourd'hui !

      — En effet ! répondit Yusifel en lui rendant son sourire. Que voulez-vous que nous fassions maintenant, Sire Chevalier ?

      — Vous pouvez m’appelez Aldarin. Je crains que l'ennemi n'abandonne pas pour autant ; ce n'est peut-être qu'un court sursis. Le soleil se lève, et les Greylings sont plus faibles en journée ; après tant d'années dans l'obscurité, la lumière de notre soleil heurte leurs yeux et brûle leur peau sèche. Ils ne s'aventureront pas dehors à nouveau aujourd'hui.

      Reed vit que le chevalier avait raison, une légère teinte bleutée pointait à l'horizon. L'aube ne devait pas être loin. Que les Douze soient remerciés.

      — Le temple a bien fait de m'envoyer ici, poursuit Aldarin, car il semble que leurs craintes soient fondées – les Greylings ont rompu le Pacte des Douze et ont refait surface.

      — Les Greylings ? demanda Reed. Il n'avait jamais entendu ce nom auparavant.

      — C'est exact, répondit Aldarin. Car c'est le nom qui a été donné à ces créatures il y a des centaines d'années. Vous devez avoir des questions, mais nous ne pouvons pas nous attarder ici, je dois retourner rapidement à Arelium. Je suggère que nous descendions du mur et allions aux écuries.

      Il souleva à nouveau la herse, ses bras et ses jambes musclés se mesurant au lourd métal. Les deux gardes survivants traversèrent la guérite et descendirent la centaine de marches sinueuses menant aux casernes, une longue et étroite structure de pierre construite contre la base du mur.

      En s'approchant, ils purent constater que, même si l'épaisse porte de bois était toujours fermée et intacte, de gros trous avaient été percés dans le chaume. Reed entra dans le bâtiment avec prudence, ses yeux scrutant la pièce. Elle était inoccupée mais tout ce qui aurait été utile avait été volé ou détruit.

      Le râtelier à armes était vide, tandis que les nombreuses tables et chaises étaient réduites en miettes contre le mur. Un gros tas de linge trempé d'urine se trouvait dans un coin, et dans un autre les petits lits de camp militaire en toile étaient déchirés et brisés. Une bannière rectangulaire représentant le rouge et l'or de la Vieille Garde avait été lacérée en son milieu par deux larges griffures, coupant le soleil cramoisi en deux comme une orange fendue. Les volets en bois arrachés de leurs gonds laissaient rentrer la douce lumière de l'aube par les fenêtres ouvertes, baignant la pièce d'une lueur tamisée.

      — Qu'ils brûlent

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