La fin de la mafia mondiale. Rolf Nagel
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La secrétaire réserva un accueil particulièrement chaleureux à Karl et le félicita. Karl crut qu'elle voulait elle aussi se moquer de lui et il aurait voulu rentrer sous terre. « Monsieur Grosser, je dois vous faire entrer dès votre arrivée dans le bureau de Monsieur Schneider », dit-elle.
« Eh bien ! c'est parfait. Me voilà dans de beaux draps, licenciement sans préavis », voilà ce qu'il pensait en entrant dans le bureau de monsieur Schneider.
« Ah ! Monsieur Grosser, quelle joie, vous êtes déjà de retour ? Nous ne vous attendions que demain ou après-demain. Mais prenez donc place, je vous en prie. Voulez-vous un café ou un thé ? »
Karl était désespéré. Son supérieur mielleux, ce vieux schnock, se moquait lui aussi de son licenciement honteux. Mais c'était trop tard maintenant, il lui fallait en passer par là.
« J'étais un peu surpris lorsque le directeur en personne m'a informé, mon cher Grosser, que vous étiez désormais chargé de vous occuper exclusivement d'un client important de la banque. Il m'a notifié que vous étiez suspendu dès aujourd'hui de toute autre fonction et que vous n'étiez plus soumis au contrôle du temps de travail. En outre, la direction a doublé votre salaire et vous a alloué un budget conséquent pour vos frais de représentation. Vous devez avoir pêché un gros poisson. Qui l'eut cru ! » Tout en parlant, monsieur Schneider fronçait les sourcils, un peu sceptique.
Karl n'en crut pas ses oreilles lorsqu'il entendit son supérieur. On ne le licenciait pas, non, on lui octroyait une promotion. On le portait aux nues. Il n'en revenait pas. Il voulait toutefois jouer son nouveau rôle comme si de rien n'était, pour que personne ne puisse avoir le moindre doute. Son salaire multiplié par deux, un budget de représentation, exemption de travail et de présence. Monsieur Karl Grosser était tout ça, désormais. Lui qui, hier encore, était un petit directeur d'organisation qui devait presque se mettre à genoux devant Monsieur Schneider pour l'achat d'une nouvelle chaise. Lui, conseiller personnel d'un client important ? Alors que la banque avait des conseillers nettement plus qualifiés et qu'il était directeur d'organisation, et non conseiller, en réalité. Quelle rapide ascension !
« Bien, je voudrais me remettre sans tarder au travail pour mon client ! » Karl prit poliment, mais sûrement, congé de monsieur Schneider et sortit du bureau.
« Naturellement, Monsieur Grosser, et si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas à faire appel à moi », lui lança monsieur Schneider.
Tout cela sonnait comme une musique enivrante aux oreilles de Karl. Il se rendit à son bureau. Sa secrétaire l'accueillit : « Monsieur Grosser, une chance que vous soyez là ! Une Madame Rosso est à l'appareil. Souhaitez-vous que je transfère l'appel dans votre bureau ? » Karl répondit en passant devant elle : « Oui, et un thé, s'il vous plaît. » « Tout de suite, Monsieur Grosser. »
Karl décrocha le combiné et entendit la voix de Marian : « Allô, mon chéri, je suis déjà arrivée. Comment ça se passe pour toi ? Tu me manques déjà. »
« Tout est super, je ne peux pas te l'expliquer, je suis tout retourné. Je viens d'obtenir une augmentation et je suis détaché de mon lieu de travail pour te conseiller. Jour et nuit bien sûr, ma chérie. Marian, je flotte sur un nuage. Et passe le bonjour et mes sincères remerciements à Monsieur ton père, même si je ne le connais pas. J'espère le rencontrer bientôt en personne. Je t'embrasse. » Karl débordait de joie.
« Moi aussi, mon chéri. C'était une soirée magnifique et une nuit formidable. Pour rien au monde, je ne voudrais en être privée. Il me reste un peu de temps avant de voir mon père et je voudrais t'acheter un petit cadeau. Oui, je dirai bonjour à mon père de ta part. Alors, à plus tard, et prends soin de toi. Bisous ! »
Karl se régala à boire son thé tout en passant tranquillement en revue tout ce qui venait de lui arriver. Puis il quitta la banque et rejoignit le chauffeur sur le parking. « Conduisez-moi à mon appartement, s'il vous plaît, je désire me changer. »
La porte de l'appartement se referma et Karl se laissa tomber sur son lit avec un profond soupir. Cinq minutes de calme seulement, un peu de calme simplement. Après un certain temps, il alla dans la salle de bains pour enfin se doucher et se raser. Ensuite, il enfila une chemise propre et un costume. Il se rendit en sifflotant chez la fleuriste pour régler ses dettes et se procurer un nouveau bouquet de fleurs pour sa bien-aimée.
« Ah ! le gentleman d'hier ! Vous nous rendez visite tous les jours maintenant ? », le salua la jolie fleuriste. La veille, dans sa hâte, il n'avait pas remarqué à quel point c'était une jeune beauté, qui se démarquait avec ses longs cheveux noirs.
Karl répondit : « Il me faut un bouquet multicolore, mais un peu plus gros qu'hier, non, deux fois plus gros. »
« Volontiers, Monsieur », dit la fleuriste tout en rejetant habilement et sensuellement son abondante chevelure en arrière.
Il remarqua que la jeune demoiselle flirtait un peu avec lui. Cela n'avait jamais été le cas avant. Il se pouvait que l'amour rende sexy ou était-ce dû au fait qu'il avait auparavant toujours paru renfrogné et antipathique. Cela ne lui déplaisait pas qu'apparemment, cette jeune femme le trouve séduisant. Karl était étonné de la rapidité à laquelle les choses pouvaient changer. Hier encore, il était Marie-la-poisse et aujourd'hui, Marie-couverte-d'or.
Marian était arrivée plus tôt que prévu à Paris et flânait sur la célèbre avenue des Champs-Élysées. Une rue prestigieuse avec toutes les boutiques de luxe imaginables. Les rayons chauds du soleil brillaient sur l'artère commerçante et les gens se promenaient gaiement. Entre-temps, elle avait fait l'acquisition d'une chaîne en or, petite mais précieuse, avec un pendentif en forme de cœur pour son Karl bien-aimé.
Elle se dirigeait maintenant vers le café-restaurant d'exception qui se trouvait au coin. Par beau temps, on pouvait s'y asseoir dehors et regarder passer la foule bariolée. Tout comme son père, elle adorait simplement être assise là et laisser libre cours à ses pensées. En général, elle et son père avaient beaucoup de points communs.
Dans un pensionnat suisse, tous reçurent une éducation de première qualité
Comme son père auparavant, Marian avait passé sa jeunesse dans un pensionnat excessivement cher en Suisse.
Les pères du premier cercle et le père de Don Rosso avaient déjà fait preuve de clairvoyance et avaient envoyé leurs enfants dans cet internat privé. Ainsi, leurs descendants grandissaient ensemble et jouissaient d'une excellente éducation. L'autre avantage était que les enfants pouvaient ainsi construire une amitié solide et une relation de confiance forte le temps de leur scolarité. Ça aussi, les pères l'avaient souhaité. Le cercle premier devait constituer une communauté de confiance incontestable, et que pouvait-il y avoir de mieux que de commencer sur les bancs de l'école. Don Rosso avait fait de même avec sa fille.
Ce pensionnat strict était situé sur une colline, non loin de la merveilleuse ville suisse de Lucerne, au bord du Lac des Quatre-Cantons. Du haut de la colline, on avait vue sur la belle petite ville avec son fleuve et son célèbre emblème, le pont de la Chapelle.
En hiver, on allait à la montagne faire du ski et en été, on pouvait se baigner dans le lac. Bien évidemment, seuls les enfants des parents les