Vingt ans après. Dumas Alexandre

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Vingt ans après - Dumas Alexandre

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effet, dit un des gardes qui avait couché dans la chambre et qui n'avait pas pu dormir à cause d'un mal de dents que lui avait donné l'humidité, Monseigneur a eu une nuit agitée et deux ou trois fois dans ses rêves a appelé au secours.

      – Qu'a donc Monseigneur? demanda La Ramée.

      – Eh! c'est toi, imbécile, dit le duc, qui avec toutes tes billevesées d'évasion m'as rompu la tête hier, et qui es cause que j'ai rêvé que je me sauvais, et qu'en me sauvant je me cassais le cou.

      La Ramée éclata de rire.

      – Vous le voyez, Monseigneur, dit La Ramée, C'est un avertissement du ciel; aussi j'espère que Monseigneur ne commettra jamais de pareilles imprudences qu'en rêve.

      – Et vous avez raison, mon cher La Ramée, dit le duc en essuyant la sueur qui coulait encore sur son front, tout éveillé qu'il était, je ne veux plus songer qu'à boire et à manger.

      – Chut! dit La Ramée.

      Et il éloigna les gardes les uns après les autres sous un prétexte quelconque.

      – Eh bien? demanda le duc quand ils furent seuls.

      – Eh bien! dit La Ramée, votre souper est commandé.

      – Ah! fit le prince, et de quoi se composera-t-il? Voyons, monsieur mon majordome.

      – Monseigneur a promis de s'en rapporter à moi.

      – Et il y aura un pâté?

      – Je crois bien! comme une tour.

      – Fait par le successeur du père Marteau?

      – Il est commandé.

      – Et tu lui as dit que c'était pour moi?

      – Je le lui ai dit.

      – Et il a répondu?

      – Qu'il ferait de son mieux pour contenter Votre Altesse.

      – À la bonne heure! dit le duc en se frottant les mains.

      – Peste! Monseigneur, dit La Ramée, comme vous mordez à la gourmandise! je ne vous ai pas encore vu, depuis cinq ans, si joyeux visage qu'en ce moment.

      Le duc vit qu'il n'avait point été assez maître de lui; mais en ce moment, comme s'il eût écouté à la porte et qu'il eût compris qu'une distraction aux idées de La Ramée était urgente, Grimaud entra et fit signe à La Ramée qu'il avait quelque chose à lui dire.

      La Ramée s'approcha de Grimaud, qui lui parla tout bas. Le duc se remit pendant ce temps.

      – J'ai déjà défendu à cet homme, dit-il, de se présenter ici sans ma permission.

      – Monseigneur, dit La Ramée, il faut lui pardonner, car c'est moi qui l'ai mandé.

      – Et pourquoi l'avez-vous mandé, puisque vous savez qu'il me déplaît?

      – Monseigneur se rappelle ce qui a été convenu, dit La Ramée, et qu'il doit nous servir à ce fameux souper. Monseigneur a oublié le souper.

      – Non; mais j'avais oublié M. Grimaud.

      – Monseigneur sait qu'il n'y a pas de souper sans lui.

      – Allons donc, faites à votre guise.

      – Approchez, mon garçon, dit La Ramée, et écoutez ce que je vais vous dire.

      Grimaud s'approcha avec son visage le plus renfrogné.

      La Ramée continua:

      – Monseigneur me fait l'honneur de m'inviter à souper demain en tête à tête.

      Grimaud fit un signe qui voulait dire qu'il ne voyait pas en quoi la chose pouvait le regarder.

      – Si fait, si fait, dit La Ramée, la chose vous regarde, au contraire, car vous aurez l'honneur de nous servir, sans compter que, si bon appétit et si grande soif que nous ayons, il restera bien quelque chose au fond des plats et au fond des bouteilles, et que ce quelque chose sera pour vous.

      Grimaud s'inclina en signe de remerciement.

      – Et maintenant, Monseigneur, dit La Ramée, j'en demande pardon à Votre Altesse, il paraît que M. de Chavigny s'absente pour quelques jours, et avant son départ il me prévient qu'il a des ordres à me donner.

      Le duc essaya d'échanger un regard avec Grimaud, mais l'oeil de

      Grimaud était sans regard.

      – Allez, dit le duc à La Ramée, et revenez le plus tôt possible.

      – Monseigneur veut-il donc prendre sa revanche de la partie de paume d'hier?

      Grimaud fit un signe de tête imperceptible de haut en bas.

      – Oui, dit le duc; mais prenez garde, mon cher La Ramée, les jours se suivent et ne se ressemblent pas, de sorte qu'aujourd'hui je suis décidé à vous battre d'importance.

      La Ramée sortit: Grimaud le suivit des yeux, sans que le reste de son corps déviât d'une ligne; puis, lorsqu'il vit la porte refermée, il tira vivement de sa poche un crayon et un carré de papier.

      – Écrivez, Monseigneur, lui dit-il.

      – Et que faut-il que j'écrive?

      Grimaud fit un signe du doigt et dicta:

      «Tout est prêt pour demain soir, tenez-vous sur vos gardes de sept à neuf heures, ayez deux chevaux de main tout prêts, nous descendrons par la première fenêtre de la galerie.»

      – Après? dit le duc.

      – Après, Monseigneur? reprit Grimaud étonné. Après, signez.

      – Et c'est tout?

      – Que voulez-vous de plus, Monseigneur? reprit Grimaud, qui était pour la plus austère concision.

      Le duc signa.

      – Maintenant, dit Grimaud, Monseigneur a-t-il perdu la balle?

      – Quelle balle?

      – Celle qui contenait la lettre.

      – Non, j'ai pensé qu'elle pouvait nous être utile. La voici.

      Et le duc prit la balle sous son oreiller et la présenta à

      Grimaud.

      Grimaud sourit le plus agréablement qu'il lui fut possible.

      – Eh bien? demanda le duc.

      – Eh bien! Monseigneur, dit Grimaud, je recouds le papier dans la balle, en jouant à la paume vous envoyez la balle dans le fossé.

      – Mais peut-être sera-t-elle perdue?

      – Soyez tranquille, Monseigneur, il y aura quelqu'un pour la

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