La San-Felice, Tome 08. Dumas Alexandre

Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу La San-Felice, Tome 08 - Dumas Alexandre страница 8

La San-Felice, Tome 08 - Dumas Alexandre

Скачать книгу

ah! fit maître Donato; et lui ne t'a pas manqué? Car je présume que c'est lui qui t'a donné ce fameux coup de sabre qui t'a balafré le visage.

      –Et celui-ci qui m'a coupé la main, répliqua le beccaïo montrant sa main mutilée et sanglante.

      –Oh! oh! voisin, dit maître Donato, laissez-moi panser cela. Vous savez que nous sommes un peu chirurgiens, nous autres.

      –Non, sang du Christ! non! dit le beccaïo. Quand il sera mort, à la bonne heure; mais, tant qu'il sera vivant, saigne ma main, saigne. Allons, venez, maître: on vous attend.

      –On m'attend? C'est bientôt dit; mais qui me payera?

      –Moi.

      –Vous dites cela parce qu'il est vivant; mais quand il sera pendu?

      –Nous ne sommes qu'à un pas de ma boutique, nous nous y arrêterons, et je te conterai dix ducats.

      –Hum! fit maître Donato, c'est dix ducats pour les exécutions légales; mais, pour les exécutions illégales, cela en vaut vingt, et encore je ne sais pas si c'est bien prudent à moi.

      –Viens, et je t'en donnerai vingt; seulement, décide-toi; car, si tu ne veux pas le pendre, je le pendrai, moi, et ce sera vingt ducats de gagnés.

      Maître Donato réfléchit qu'en effet, ce n'était pas chose difficile que de pendre un homme, puisque tant de gens se pendent tout seuls, et, craignant que cette aubaine ne lui échappât:

      –C'est bien, dit-il: je ne veux pas désobliger un voisin.

      Et il alla prendre un rouleau de corde suspendu au mur par un clou.

      –Où allez-vous donc? demanda le beccaïo.

      –Vous le voyez bien, je vais prendre mes instruments.

      –Des cordes? Nous en avons de reste là-bas.

      –Mais elles ne sont point préparées; plus une corde a servi, mieux elle glisse, et, par conséquent, plus elle est douce au patient.

      –Plaisantes-tu? s'écria le beccaïo. Est-ce que je veux que sa mort soit douce? Une corde neuve, mordieu! une corde neuve!

      –Au fait, dit maître Bonato avec son sourire sinistre, c'est vous qui payez: c'est à vous de faire votre carte. Au revoir, père Tomeo!

      –Au revoir, répondit le vieux pêcheur, et bon courage, compère! J'ai idée que voilà votre mauvaise veine coupée.

      Puis, à lui-même:

      –Légale ou illégale, qu'importe! c'est toujours vingt ducats à compte sur la dot.

      On sortit de la rue des Soupirs-de-l'Abîme et l'on se rendit chez le beccaïo.

      Celui-ci alla droit au tiroir du comptoir et y prit vingt ducats, qu'il allait donner à maître Donato, quand tout à coup, se ravisant:

      –Voilà dix ducats, maître, lui dit-il; le reste après l'exécution.

      –L'exécution de qui? demanda la femme du beccaïo en sortant de la chambre du fond.

      –Si on te le demande, tu diras que tu ne l'as jamais su ou que tu l'as oublié.

      S'apercevant alors seulement de l'état dans lequel était la main de son mari:

      –Jésus Dieu! dit-elle, qu'est-ce que cela?

      –Rien.

      –Comment, rien? Trois doigts coupés, tu appelles cela rien!

      –Bon! dit le beccaïo, s'il faisait du vent, ce serait déjà séché. Venez, maître.

      Et il sortit de sa boutique: le bourreau le suivit.

      Les deux hommes gagnèrent la rue de Lavinago, le beccaïo guidant maître Donato, et marchant si vite, que maître Donato avait de la peine à le suivre.

      Lorsque le beccaïo rentra, tout était dans la même situation que lorsqu'il était parti. Le prisonnier, toujours couché sur la table, insulté et frappé par les lazzaroni, n'avait pas fait un seul mouvement et semblait plongé dans une immobilité complète.

      Au reste, il avait fallu presque autant de force morale pour supporter les injures, qu'il avait fallu de force physique pour supporter les coups et les blessures même à l'aide desquels on avait, à vingt reprises différentes, essayé de réveiller ce dormeur obstiné. Injures et coups, nous l'avons dit, tout avait été inutile.

      Des cris de joie et des acclamations de triomphe saluèrent l'apparition du tueur de boucs et du tueur d'hommes, et les cris: Il boïa! il boïa! s'élancèrent de toutes les bouches.

      Si ferme que fût Salvato, il tressaillit à ce cri; car il venait de comprendre la véritable cause du succès qu'il avait obtenu. Non-seulement, dans sa vengeance, le beccaïo voulait sa mort, mais il voulait qu'il mourût d'une main infâme.

      Il réfléchit, toutefois, que sa mort, résultat d'une main exercée, serait plus prompte et moins douloureuse.

      L'oeil qu'il avait entr'ouvert se referma, et il retomba dans son impassibilité, dont personne, d'ailleurs, ne s'était aperçu qu'il fût sorti.

      Le beccaïo s'approcha de lui, et, le montrant à maître Donato:

      –Tenez, dit-il, voici votre homme.

      Maître Donato jeta les yeux autour de lui pour chercher un endroit convenable où établir un gibet provisoire; mais le beccaïo lui montra l'anneau et la corde.

      –On t'a préparé la besogne, lui dit-il. Cependant, ne te presse pas, tu as le temps.

      Maître Donato monta sur la table; mais, plus respectueux que le beccaïo pour le pauvre bipède qui se prétend fait à la ressemblance de Dieu et que l'on appelle l'homme, il n'osa monter sur le corps du patient, comme avait fait le beccaïo.

      Il monta sur une chaise pour s'assurer que l'anneau était solide et le noeud coulant bien fait.

      L'anneau était solide; mais le noeud coulant ne coulait pas.

      Maître Donato haussa les épaules, murmura quelques paroles railleuses à l'adresse de ceux qui se mêlaient de choses qu'ils ne savaient pas, et refit le noeud mal fait.

      Pendant ce temps, le beccaïo insultait de son mieux le prisonnier, toujours muet et immobile comme s'il eût été mort.

      La pendule sonna sept heures.

      –Compte maintenant les minutes, dit le tueur de boucs à Salvato; car tu as fini de compter les heures.

      La nuit n'était point encore venue; mais, dans les rues étroites et aux hautes maisons de Naples, l'obscurité commence à descendre bien avant que se couche le soleil.

      On commençait à voir un peu confusément dans cette salle à manger, où se préparait un spectacle dont personne ne voulait perdre le moindre détail.

      Plusieurs voix s'écrièrent:

      –Des torches! des torches!

      Il était

Скачать книгу