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Quand Je fus habillée, je descendis les escaliers, presque effrayée par le silence profond tout autour. La vue de Millicent Mc Millian, joyeuse et bavardant comme toujours, effaça le brouillard et reporta le beau temps dans mon esprit tourbillonnant.
“Vous avez bien dormi, mademoiselle Bruno?” elle commença.
“Jamais si bien” répondis-je, surprise moi-même de celle nouveauté. Il y avait des années que je ne m’abandonnais si sereinement au sommeil, les pensées négatives mises à part pendant au moins quelques heures.
“Voulez-vous du café ou du thé?”
“Du thé, s’il-vous-plait” je la priai, en m’asseyant à la table de la cuisine.
“Allez dans le salon, je vous le serve de là”.
“Je préfère de faire le petit déjeuner avec vous” dis-je, en suffocant un bâillement.
La femme me parait satisfaite et elle commença à s’affairer au tour des réchauds. Elle reprit le bavardage habituel, et je fus libre de penser à Monique. Qu’est-ce qu’elle était en train de faire à cette heure? Avait-elle déjà préparé le petit déjeuner? Penser à ma sœur avait reporté le fardeau sur mes épaules minces, et j’accueillis volontiers l’arrivé de la tasse de thé.
“Merci, Madame Mc Millian”. Je sirotai avec plaisir la liquide chaude et agréablement parfumée, tandis que la gouvernant servait le pain grillé et une série de petits bols remplies avec diverses confitures invitantes.
“Prenez celle de framboises. Elle est fantastique”.
J’allongeai la main vers le plateau, le cœur déjà en fibrillation. Ma diversité retourna à m’inonder de boue, sombre et avec une mauvaise odeur. Pourquoi moi? Et dans tout le monde il y en avait d’autres comme moi? Ou j’étais une anomalie isolée, un aberrante erreur de la nature?
Je saisis un bol quelconque, en espérant que la vieille femme était trop concentrée à parler pour s’apercevoir d’une mienne erreur éventuelle. Les confitures étaient cinq, donc j’avais une possibilité sur cinq, deux sur dix, vingt sur cent de deviner la bonne à la première tentative.
Elle me corrigea rapidement, moins distraite que ce que je pensais. “Non, mademoiselle. Celle-là est d’oranges”. Elle sourit, pas du tout consciente de l’agitation qui me poussait dedans, et de mon front perlé de sueur. Elle me passa un petit bol. “Voilà, il est facile de la confondre avec celle de fraises ”.
Elle ne s’aperçoit pas de mon sourire forcé, et elle reprit l’histoire de ses aventures amoureuses avec un jeune florentin qui avait fini pour la laisser pour une sudaméricaine.
Je mangeai à contrecœur, encore nerveuse pour l’incident juste avant, et déjà repentante de n’avoir pas accepté la proposition de manger seule. Dans ce cas il n’y aurait pas été aucun problème. Eviter les situations potentiellement critiques: il était mon mantra. Depuis toujours. Je ne devais pas permettre que l’atmosphère délicieuse de celle maison me poussait à faire des actions hasardeuses, en oubliant la prudence nécessaire. Madame Mc Millian semblait une femme maline, intelligente et attentionnée, toutefois elle était excessivement bavarde. Je ne pouvais pas compter sur sa discrétion.
Elle fit une petite pause pour boire son thé, et j’en profitai pour lui poser quelques questions. “Vous travaillez il y a beaucoup d’années auprès de Monsieur Mc Laine?”
Elle s’éclaira, heureuse de pouvoir donner le prélude à de nouveaux anecdotes. “Je travaille ici il y a quinze ans. J’arrivai peu mois après l’accident survenu à Monsieur Mc Laine. Celui dans lequel... Eh bien, vous avez compris. Tous les employés de maison précédents furent éloignés. Il semble que Monsieur Mc Laine était un homme très gai, plein d’envie de vivre, toujours joyeux. Malheureusement maintenant les tout a changé ”.
“Comment s’est-t-il passé? Je veux dire... L’accident? C’est-à-dire... pardonnez ma curiosité, elle est impardonnable”. Je me mordis les lèvres, craintive d’être mal comprise.
Elle hocha la tête. “Il est normal de se poser des questions, il appartient à la nature humaine. Je ne sais pas ce qu’il s’est passé précisément. Au village ils m’ont dit que Monsieur Mc Laine devait se marier justement le jour après l’accident de voiture, et évidemment rien n’en est sorti. Certains disent qu’il était ivre, mais c’étaient des rumeurs sans aucun fondement, à mon avis. Ce dont on sait pertinemment est qu’il sortit de la route pour éviter un enfant”.
Ma curiosité se raviva, alimentée par ses mots. “Enfant? J’avais lu sur internet que l’accident s’est passé le nuit ”.
Elle haussa les épaules. “Oui, il semble qu’il s’agissait du fis de l’épicier. Il avait échappé de sa maison puisqu’il s’était mis dans la tête de de se joindre à la compagnie du cirque, en tournée dans la zone”.
Je revins sur celle nouvelle. Cela expliqua les changements brusques d’humeur de Monsieur Mc Laine, sa mauvaise humeur pérenne, son malheur. Comment ne pas le comprendre? Son monde s’était effrité, brisé, par effet d’un destin scélérat. Un homme jeune, riche, beau, écrivain de succès, en train d’accomplir son rêve d’amour... Et dans peu de secondes perdre la plupart de celui qu’il possédait. Je n’aurais jamais pu éprouver une telle malchance, je pouvais seulement l’imaginer. On ne peut pas perdre ce qu’on n’a pas. Ma seule compagnie était le Néant, il y a toujours.
Un coup d’œil rapide à la montre me confirma qu’il était temps de s’en aller. Mon premier jour de travail. Mon cœur accéléra, et dans une lueur de lucidité je me demandai s’il dépendait du nouveau travail, ou du mystérieux propriétaire de celle maison.
Je montai les marches deux par deux, dans la crainte irrationnelle d’arriver en retard. Dans le couloir je rencontrai Kyle, l’infirmier factotum. “Bonjour”.
Je ralentis, en ayant honte de mon empressement. Je devais lui sembler une insécure, ou pire une exaltée.
“Bonjour”.
“Mademoiselle Bruno, n’est-ce pas? Puis-je vous tutoyer? Mais enfin nous sommes dans le même bateau, à la merci d’un fou furieux ”. La grossière et brutale vilénie de ses mots me laissa surprise.
“Je le sais, Je suis irrespectueux envers mon employeur, etcétéra etcétéra. Tu apprendras très tôt à être d’accord avec moi. Comment t’appelles-tu?”
“Mélisande”.
Il ébaucha une révérence sinistre. “Heureux de faire ta connaissance, Mélisande aux cheveux rouges. Ton nom est vraiment étrange, il n’est pas écossais... Même si tu sembles plus écossaise que moi”.
Je fis un sourire par courtoisie, et je cherchai à le dépasser, ayant encore peur d’arriver en retard. Mais il me bloquait la voie, arrêté, avec ses jambes écartées, sur le palier. Il fut l’intervention arrivée à point nommé d’une troisième personne à démêler la situation.
“Mademoiselle Bruno! Je déteste les retards!” Le cri provenait indubitablement par mon nouvel employeur, et mes cheveux se dressèrent sur la nuque.
Kyle