Le Grand Ski-Lift. Anton Soliman
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On frappa à la porte et Clara entra avec le plateau du petit déjeuner.
â Bonjour ! Bien dormi ? Je tâai apporté le petit déjeuner au lit parce que tu es un hôte important pour nous. Mon père mâa chargée de prendre soin de toi, dit-elle dâun air malicieux.
Il fut surpris de cet accueil. Il repensa à la mélancolie du paysage de la veille, à lâesplanade désolée du téléphérique sous le grésil. Sans savoir pourquoi, il pensa au premier jour dâécole dâun enfant pauvreâ¦
Il avait été accueilli à lâhôtel comme un parent dans le besoin. Ce quâil vivait nâétait pas une situation qui pourrait durer pendant toute sa période de vacances. Il avait déjà ressenti ces sensations de froid et chaud ailleurs, auprès dâautres. Mais il était arrivé dans cet endroit dans un état dâesprit particulier, qui était dâune certaine façon lié au Changement. Oskar resta au lit en savourant son petit déjeuner.
â Tu me parlais hier dâun directeur des installations à qui je pourrais demander des informations.
â Oui, bien sûr, je tâemmènerai le voir ce matin.
Le ciel était couvert, on ne voyait que de rares passants en chemin. Certains transportaient du foin, dâautres nettoyaient, ou réparaient un outil. Mais ils faisaient tout avec lenteur. Oskar pensa à certains automates que lâon trouve sur les horloges des clochers gothiques.
Le bureau du directeur se trouvait à lâautre bout du village. Câétait une construction récente dâun seul étage, sans attrait particulier. Clara frappa à la porte, et on vint aussitôt ouvrir.
â Bonjour Monsieur Franchi ! Mon père vous transmet ses salutations -dit-elle, avant dâajouter en regardant Oskar- je vous présente un de nos clients qui est ici en vacances. Il connaît lâexistence du téléphérique et souhaitait obtenir quelques informations.
Les présentations terminées, la jeune femme salua, annonça quâelle devait faire quelques courses au village et sortit rapidement.
Le directeur était dâapparence timide. Il fit installer Oskar dans un fauteuil face à son bureau et demanda à un employé, qui travaillait dans la pièce à côté, de préparer du café.
â Vous prendrez une tasse de café ? demanda-t-il avec un sourire. Dites-moi, Monsieur, comment avez-vous connu notre petite installation de montagne ?
â Je voudrais dâabord me présenter, je mâappelle Oskar Zerbi. Câest un de mes amis, passionné de montagne, qui mâa parlé de cette installation. à vrai dire, il mâa parlé dâune station de ski, ici à Valle Chiara, qui serait reliée au circuit du Grand Ski-lift.
Il hocha la tête et ajouta :
â Voyez-vous, Monsieur le directeur, je suis arrivé hier et la curiosité mâa poussé vers lâesplanade dâoù devraient partir les remontées. Croyez-moi, jâai été impressionné par lâétat dâabandon. Je peux même vous dire que jâai du mal à croire que ce que jâai vu puisse être une station de ski.
Le directeur avait écouté en faisant des signes dâapprobation continus. Dès quâOskar eut fini, il lui dit avec un demi-sourire :
â Monsieur Zerbi, quâest-ce que vous a vraiment raconté votre ami ? Cela vous semblera peut-être étrange que le responsable dâune station de sports dâhiver pose ce genre de questions à un client, mais au-delà de tout jugement, je dois quoi quâil en soit reconnaître que pour le moment, il faut considérer le téléphérique comme étant⦠expérimental.
Cette version plut à Oskar ; il se sentait enfin tiré dâune situation dâirréalité totale.
â Cet ami, qui, je le répète, est passionné de montagne, a mentionné le nom de ce village. Maintenant, je ne me souviens plus précisément sâil avait utilisé votre installation pour rejoindre les pistes ou au contraire pour redescendre dans la vallée. Mais, dâaprès ce que jâai pu voir pour le moment, il me semble que câest un détail important.
â Vous avez raison de souligner cet aspect. Il est plus probable que votre ami soit redescendu par notre téléphérique. Voyez-vous, dâaprès mes souvenirs, il ne me semble pas quâun usager inconnu de moi soit passé par ici. Nous nâavons pour le moment utilisé lâinstallation quâavec les techniciens, pour les tests.
Le directeur réfléchit un instant, comme pour mieux peser ses propos, puis il affirma énergiquement :
â Notre société a justement décidé dâouvrir la liaison au public à partir de cet hiver !
â Alors je serai le premier touriste à utiliser lâinstallation ?
â Pas tout à fait. Disons quâà part les techniciens, trois ou quatre autres usagers sont montés. Des personnes de confiance, croyez-moi.
Son expression trahit son embarras, et il sâexclama :
âJe vous en prie, je ne peux rien vous dire de plus.
Oskar pensa à son ami qui, dâaprès ce quâil comprenait, nâétait pas du tout arrivé aux plateaux dâaltitude en partant de lâesplanade ; il semblait plus vraisemblable quâil ait utilisé le téléphérique pour redescendre. Peut-être était-il arrivé par hasard sur les plateaux en venant dâune autre station connue. Et, passant dâune installation à lâautre, il était sûrement redescendu ensuite à Valle Chiara. Il se serait donc agi dâun événement fortuit : un événement singulier. Il imagina alors une arrivée dans la vallée totalement différente du scénario de la veille, quand il était arrivé sur lâesplanade aux dernières heures dâun après-midi pluvieux. Ãmotivement, une arrivée est bien différente dâun départ, même sâil sâagit de deux événements spéculaires, comme lâaube et le crépuscule.
â Monsieur le directeur, je voudrais vous poser une question : vous avez évoqué des usagers choisis qui ont utilisé lâinstallation pour monter ; vous mâavez également laissé entendre que dâautres personnes lâont utilisée pour descendre.
Un homme arriva de la pièce à côté avec une cafetière et deux tasses posées sur un plateau.
â Câest exact ! confirma le directeur, lâexpression sérieuse. Voyez-vous, Monsieur Zerbi, le téléphérique est tout juste terminé. Lâinstallation consiste en cabines qui permettent le transport de deux passagers sans skis aux pieds.