Masques De Cristal. Terry Salvini

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Masques De Cristal - Terry Salvini

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alors! lui dit le chauffeur vexé dans un mauvais anglais, le véhicule encore à l'arrêt le long du trottoir. Il se tourna pour la regarder avec un petit sourire sarcastique. Ce n'est qu'à quelques kilomètres, vous savez.

      Elle ne bougea pas d'un cil.

      –Je le ferais bien, mais je vais à l'hôpital. Ça ne vous suggère rien?»

      Elle le pensait sérieusement. Sans son genou encore en mauvais état, elle serait vraiment allée à pied, et en aurait profité pour faire une promenade salutaire après quatre jours au lit.

      Le conducteur secoua la tête et engagea la voiture sur la route. Loreley s'appuya au dossier en essayant de se calmer: chaque fois qu'elle entrait de mauvais poil dans un taxi, elle se querellait avec le chauffeur, elle en était consciente; mais plus d'une demi-heure d'attente, c'était vraiment trop.

      Aller à Paris pour subir tout ça!

      Kilmer devait bien se moquer d'elle, se dit-elle en repensant au coup de fil qu'elle lui avait passé le jour suivant la sortie de l'hôpital.

      À l'accueil, elle demanda à voir le docteur Legrand, qui était occupé dans le service ce matin-là: selon l'infirmière, elle devrait se contenter du médecin de garde, mais elle n'avait aucunement l'intention de se laisser toucher par les mains d'un autre homme.

      Elle insista jusqu'à ce que, devant autant d'obstination, l'employée aux cheveux cuivrés et aux petites lunettes à chaînette fasse une tentative pour la satisfaire, ou pour s'en débarrasser: elle lui dit qu'elle demanderait au médecin ses disponibilités pour une visite privée si elle était disposée à la payer. Loreley n'eut pas besoin de réfléchir pour brandir sa carte de crédit.

      Elle fut obligée d'attendre plus d'une heure, mais le docteur Legrand trouva finalement le temps de la recevoir.

      Après avoir soigné sa blessure à la tête, il la fit s'installer dans son bureau, un endroit plus accueillant que le froid cabinet de consultation où il l'avait reçue, et plus approprié pour un entretien privé.

      «Vous partez aujourd'hui, alors, Miss Lehmann.

      –Paris est une ville superbe, mais je suis impatiente de rentrer à New York, après ceci… Elle indiqua le pansement sur le côté droit de sa tête, sous l'oreille.

      –J'imagine. Ça fait quelque temps que je me promets de retourner dans votre ville, mais je finis par aller totalement ailleurs, dans des endroits plus proches; je n'arrive pas à prendre assez de jours de congés pour me permettre un voyage aussi long. Il croisa les jambes et s'appuya au dossier de la chaise. Je devrais mieux m'organiser au travail, pour avoir au moins une semaine de temps et bien profiter des vacances.

      –Et bien, si vous venez, dites-le moi. Je serai contente de vous revoir et de pouvoir vous montrer des petits coins intéressants et peu connus, pour vous rendre votre disponibilité.»

      Il sourit et Loreley se remit à penser, pour la énième fois, qu'il ressemblait à Jack Leroy.

      Elle ouvrit son sac et sortit une petite carte rectangulaire imprimée de son portefeuille.

      «Voici ma carte de visite avec mon email et mon numéro de portable professionnel. Vous avez déjà le privé: mais pour éviter que vous ne deviez le chercher… Elle prit un stylo noir sur le bureau, tourna la carte et écrivit le numéro. Voilà. Vous m'appelez quand vous voulez: si je ne réponds pas tout de suite, laissez un message et je vous rappellerai.»

      Il tendit la main, prit la carte et lut l'intitulé, haussant un sourcil.

      «Vous êtes avocate, donc.

      –Oui, pénaliste.

      Legrand glissa la carte dans sa poche de chemise.

      –Si je viens à New York, je tiendrai compte de votre offre.» Il prit l'enveloppe blanche placée à côté au dossier des urgences et en sortit une feuille.

      «Miss Lehmann, venons-en au point: les hCG sont dans les limites normales, même si elles sont un peu élevées. Vu que votre grossesse n'en est qu'au tout début, vous n'avez pas besoin de courir tout de suite chez le médecin, surtout maintenant que nous avons fait les analyses et qu'elles sont régulières; dans un mois, quand les contrôles de routine commenceront, apportez ceci avec vous. Il lui donna la feuille.

      Loreley la rangea de nouveau dans l'enveloppe, qu'elle mit dans son sac.

      –À vrai dire, j'ai déjà pris un rendez-vous, pour la semaine prochaine. Un peu tôt, je sais, mais je voudrais des réponses à certaines de mes questions.

      –Si je peux vous aider…

      –Bien sûr que vous pourriez, mais je crains de voler trop de temps à vos patients.

      –Faisons ceci, lui répondit-il en jetant un coup d'oeil à l'horloge sur le mur. J'ai environ une heure de pause pour le repas. Il redressa son dos et se pencha vers elle. Si vous voulez, nous pouvons parler en mangeant quelque chose: qu'en pensez-vous?

      Loreley fit un rapide calcul: il restait environ trois heures avant le départ de l'avion, elle arriverait donc à le prendre si elle ne s'étendait pas trop sur le sujet.

      –C'est une excellente idée. Si cela vous convient, à moi aussi. Je vous promets d'être concise.»

***

      Assise dans le siège de l'avion, un verre de thé à la main, Loreley réfléchissait à ce que le docteur Legrand lui avait dit. Le fait qu'elle était tombée enceinte malgré la prise régulière de la pilule pouvait être dû à diverses raisons. Elle avait été malade durant quelques jours le mois précédent et avait vomi plusieurs fois. Le médecin lui avait donc prescrit des anti-infectieux intestinaux: sans parler des analgésiques qu'elle prenait pour le mal de tête. Tout cela pouvait avoir causé une mauvaise absorption des hormones contenues dans la pilule, avec pour conséquence une activité contraceptive insuffisante.

      La situation avait un sens maintenant. Mais le faire comprendre à Johnny ne serait pas simple du tout. Méritait-il une explication après son comportement à Paris? À tort ou à raison, il n'aurait pas dû réagir aussi mal et la laisser seule.

      Comment faire confiance à un homme qui fuyait au lieu d'affronter la situation?

      Elle porta le verre de thé à ses lèvres, mais elle eut un sursaut lors d'une légère secousse de l'avion et un filet de thé se renversa sur son pull.

      Bon sang, elle était plus maladroite que d'habitude! Elle s'essuya avec la serviette en papier que l'hôtesse lui avait apportée avec la boisson et ses pensées reprirent où elles s'étaient interrompues.

      Ces derniers temps, elle aussi avait eu un comportement similaire: ne s'était-elle pas enfuie, par deux fois, face à Sonny? Et est-ce qu'elle avait eu le courage d'avouer à Johnny ce qu'il s'était passé entre cet homme et elle?

      Elle appuya la tête sur le dossier du siège et soupira. Elle devait prendre des décisions importantes: par rapport à sa grossesse, à sa relation avec John et à la question en suspens avec Sonny. Elle ne pouvait pas espérer poursuivre sur cette voie et pointer les autres du doigt. Elle avait souvent entendu dire que les mensonges en attiraient d'autres, jusqu'au moment où on ne sait plus comment les gérer. Et on finit KO!

      Loreley tourna le visage vers le hublot, regarda en bas, mais n'arriva pas à apercevoir la terre sous elle.

      Il

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