LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur. Морис Леблан
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– Je voudrais la voir.
Le comte eut un sourire assez étrange.
– Vous pouvez la voir, certainement.
Elle se trouvait justement dans une des pièces qu’on lui avait abandonnées.
Lupin fut surpris de trouver une mignonne créature, trop mince, trop pâle, mais presque jolie avec ses cheveux blonds et sa figure délicate. Ses yeux, d’un vert d’eau, avaient l’expression vague, rêveuse, des yeux d’aveugle.
Il lui posa quelques interrogations auxquelles Isilda ne répondit pas, et d’autres auxquelles elle répondit par des phrases incohérentes, comme si elle ne comprenait ni le sens des paroles qu’on lui adressait, ni celui des paroles qu’elle prononçait.
Il insista, lui prenant la main avec beaucoup de douceur et la questionnant, d’une voix affectueuse, sur l’époque où elle avait encore sa raison, sur son grand-père, sur les souvenirs que pouvait évoquer en elle sa vie d’enfant, en liberté parmi les ruines majestueuses du château.
Elle se taisait, les yeux fixes, impassible, émue peut-être, mais sans que son émotion pût éveiller son intelligence endormie.
Lupin demanda un crayon et du papier. Avec le crayon il inscrivit sur la feuille blanche « 813 »
Le comte sourit encore.
– Ah ! ça, qu’est-ce qui vous fait rire ? s’écria Lupin, agacé.
– Rien… rien… ça m’intéresse… ça m’intéresse beaucoup… La jeune fille regarda la feuille qu’on tendait devant elle, et elle tourna la tête d’un air distrait.
– Ça ne prend pas, fit le comte narquois.
Lupin écrivit les lettres « Apoon ».
Même inattention chez Isilda.
Il ne renonça pas à l’épreuve, et il traça à diverses reprises les mêmes lettres, mais en laissant chaque fois entre elles des intervalles qui variaient. Et chaque fois, il épiait le visage de la jeune fille.
Elle ne bougeait pas, les yeux attachés au papier avec une indifférence que rien ne paraissait troubler.
Mais soudain elle saisit le crayon, arracha la dernière feuille aux mains de Lupin, et, comme si elle était sous le coup d’une inspiration subite, elle inscrivit deux « l » au milieu de l’intervalle laissé par Lupin.
Celui-ci tressaillit.
Un mot se trouvait formé : Apollon.
Cependant elle n’avait point lâché le crayon ni la feuille, et, les doigts crispés, les traits tendus, elle s’efforçait de soumettre sa main à l’ordre hésitant de son pauvre cerveau.
Lupin attendait tout fiévreux.
Elle marqua rapidement, comme hallucinée, un mot, le mot :
Diane.
– Un autre mot !… ; un autre mot ! s’écria-t-il avec violence.
Elle tordit ses doigts autour du crayon, cassa la mine, dessina de la pointe un grand J, et lâcha le crayon, à bout de forces.
– Un autre mot ! Je le veux ! ordonna Lupin, en lui saisissant le bras.
Mais il vit à ses yeux, de nouveaux indifférents, que ce fugitif éclair de sensibilité ne pouvait plus luire.
– Allons-nous-en, dit-il.
Déjà il s’éloignait, quand elle se mit à courir et lui barra la route. Il s’arrêta.
– Que veux-tu ?
Elle tendit sa main ouverte.
– Quoi ! De l’argent ? Est-ce donc son habitude de mendier ? dit-il en s’adressant au comte.
– Non, dit celui-ci, et je ne m’explique pas du tout…
Isilda sortit de sa poche deux pièces d’or qu’elle fit tinter l’une contre l’autre joyeusement.
Lupin les examina.
C’étaient des pièces françaises, toutes neuves, au millésime de l’année.
– Où as-tu pris ça ? s’exclama Lupin, avec agitation… Des pièces françaises ! Qui te les a données ?… Et quand ?… Est-ce aujourd’hui ? Parle !… Réponds !
Il haussa les épaules.
– Imbécile que je suis ! Comme si elle pouvait me répondre ! Mon cher comte, veuillez me prêter quarante marks… Merci… Tiens Isilda, c’est pour toi…
Elle prit les deux pièces, les fit sonner avec les deux autres dans le creux de sa main, puis, tendant le bras, elle montra les ruines du palais Renaissance, d’un geste qui semblait désigner plus spécialement l’aile gauche et le sommet de cette aile.
était-ce un mouvement machinal ? Ou fallait-il le considérer comme un remerciement pour les deux pièces d’or ?
Il observa le comte. Celui-ci ne cessait de sourire.
– Qu’est-ce qu’il a donc à rigoler, cet animal-là ? se dit Lupin. On croirait qu’il se paye ma tête.
À tout hasard, il se dirigea vers le palais, suivi de son escorte.
Le rez-de-chaussée se composait d’immenses salles de réception, qui se commandaient les unes les autres, et où l’on avait réuni les quelques meubles échappés à l’incendie.
Au premier étage, c’était, du côté nord, une longue galerie sur laquelle s’ouvraient douze belles salles exactement pareilles.
La même galerie se répétait au second étage, mais avec vingt-quatre chambres, également semblables les unes aux autres. Tout cela vide, délabré, lamentable.
En haut, rien. Les mansardes avaient été brûlées.
Durant une heure, Lupin marcha, trotta, galopa, infatigable, l’œil aux aguets.
Au soir tombant, il courut vers l’une des douze salles du premier étage, comme s’il la choisissait pour des raisons particulières connues de lui seul.
Il fut assez surpris d’y trouver l’Empereur qui fumait, assis dans un fauteuil qu’il s’était fait apporter.
Sans se soucier de sa présence, Lupin commença l’inspection de la salle, selon les procédés qu’il avait coutume d’employer en pareil cas, divisant la pièce en secteurs qu’il examinait tour à tour. Au bout de vingt minutes, il dit :
– Je vous demanderai, Sire, de bien vouloir vous déranger. Il y a là une cheminée…
L’Empereur