Œuvres complètes de lord Byron, Tome 12. George Gordon Byron
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»Votre, etc.
»P. S. Vous dites qu'une moitié est très-bonne: vous avez tort; car, s'il en était ainsi, ce serait le plus beau poème du monde. Où donc est la poésie dont la moitié soit bonne? Est-ce l'Énéide? Sont-ce les vers de Milton? de Dryden? De qui donc, hormis Pope et Goldsmith, dont tout est bon? et encore ces deux derniers sont les poètes que vos poètes de marais voudraient fronder. Mais si, dans votre opinion, la moitié des deux nouveaux chants est bonne, que diable voulez-vous de plus? Non, non-nulle poésie n'est généralement bonne: – ce n'est jamais que par bonds et par élans, – et vous êtes heureux de trouver un éclair çà et là. Vous pourriez aussi bien demander toutes les étoiles en plein minuit que la perfection absolue en vers.
»Nous sommes ici à la veille d'un remue-ménage. La nuit dernière, on a placardé sur tous les murs de la ville: Vive la république! et Mort au pape! etc., etc. Ce ne serait rien à Londres, où les murs sont privilégiés; mais ici, c'est autre chose: on n'est pas accoutumé à de si terribles placards politiques. La police, est sur le qui-vive, et le cardinal paraît pâle à travers sa pourpre.»
24 avril 1820, huit heures du soir.
«La police a été tout le jour à la recherche des auteurs des placards, mais elle n'a rien pris encore. On doit avoir passé toute la nuit à afficher; car les Vive la république!-Mort au pape et aux prêtres! sont innombrables, et collés sur tous les palais: le nôtre en a une abondante quantité. Il y a aussi: A bas la noblesse! Quant à cela, elle est déjà assez bas. Vu la violence de la pluie et du vent qui sont survenus, je ne suis pas sorti pour battre le pays; mais je monterai à cheval demain, et prendrai mon galop parmi les paysans, qui sont sauvages et résolus, et chevauchent toujours le fusil en main. Je m'étonne qu'on ne soupçonne pas les donneurs de sérénades; car on joue ici de la guitare toute la nuit, comme en Espagne, sous les fenêtres de ses maîtresses.
»Parlant de politique, comme dit Caleb Quotem, regardez, je vous prie, la conclusion de mon Ode sur Waterloo, écrite en 1815; et, la rapprochant de la catastrophe du duc de Berry en 1820, dites-moi si je n'ai pas un assez bon droit au titre de vates31, dans les deux sens du mot, comme Fitzgerald et Coleridge.
»Je ne prétends pas prévoir à cette distance ce qui arrivera parmi vous autres Anglais, mais je prophétise un mouvement en Italie: dans ce cas, je ne sais pas si je n'y mettrai pas la main. Je déteste les Autrichiens, et crois les Italiens scandaleusement opprimés; et si l'on donne le signal, pourquoi pas? Je recommanderai «l'érection d'un petit fort à Drumsnab,» comme Dugald Dalgetty.»
Note 31: (retour) Vates, en latin, signifie à-la-fois poète et prophète.
Note 32: (retour) Vers de l'Ode sur Waterloo:
Crimson tears will follow yet. (Notes du Trad.)
LETTRE CCCLXXI
Ravenne, 8 mai 1820.
«Comme vous ne m'avez pas r'écrit, intention que votre lettre du 7 courant indiquait, je dois présumer que la Prophétie du Dante n'a pas été jugée meilleure que les pièces qui l'avaient précédée, aux yeux de votre illustre synode. En ce cas, vous éprouvez un peu d'embarras. Pour y mettre fin, je vous répète que vous ne devez pas vous considérer comme obligé ou engagé à publier une composition, par cela seul qu'elle est de moi, mais toujours agir conformément à vos vues, à vos opinions ou à celles de vos amis; et demeurez sûr que vous ne m'offenserez en aucune façon en refusant l'article, pour me servir de la phrase technique. Quant aux observations en prose sur l'attaque de John Wilson, je n'entends point les faire publier à présent; et j'envoie des vers à M. Kinnaird (je les écrivis l'an dernier en traversant le Pô), vers qu'il ne faut pas qu'il publie. Je mentionne cela, parce qu'il est probable qu'il vous en donnera une copie. Souvenez-vous-en, je vous prie, attendu que ce sont de purs vers de société, relatifs à des sentimens et des passions privés. De plus, je ne puis consentir à aucune mutilation ou omission dans l'oeuvre de Pulci: le texte original en a toujours été exempt dans l'Italie même, métropole de la chrétienté, et la traduction ne le serait pas en Angleterre, quoique vous puissiez regarder comme étrange qu'on ait permis une telle liberté au Morgante pendant plusieurs siècles, tandis que l'autre jour on a confisqué la traduction entière du premier chant de Childe-Harold, et persécuté Leoni, le traducteur. – Lui-même me l'écrit, et je le lui aurais dit s'il m'avait consulté avant la publication. Ceci montre combien la politique intéresse plus les hommes dans ces contrées que la religion. Une demi-douzaine d'invectives contre la tyrannie font confisquer Childe-Harold en un mois, et vingt-huit chants de plaisanteries contre les moines, les chevaliers et le gouvernement de l'église, sont laissés en liberté pendant des siècles: je transcris le récit de Leoni.
«Non ignorerà forse che la mia versione del 4º canto del Childe-Harold fu confiscata in ogni parte; ed io stesso ho dovuto soffrir vessazioni altrettanto ridicole quanto illiberali, ad arte che alcuni versi fossero esclusi dalla censura. Ma siccome il divieto non fa d'ordinario che accrescere la curiosità, così quel carme sull'Italia è ricercato più che mai, e penso di farlo ristampare in Inghilterra senza nulla escludere. Sciagurata condizione di questa mia patria! se patria si può chiamare una terra così avvilita dalla fortuna, dagli uomini, da se medesima33.»
Note 33: (retour) «Vous n'ignorez peut-être pas que ma traduction du quatrième chant de Childe-Harold a été confisquée partout, et moi-même j'ai dû souffrir des vexations aussi ridicules qu'illibérales, parce que la censure a trouvé quelques vers à retrancher. Mais comme la défense ne fait d'ordinaire qu'accroître la curiosité, ce poème est plus que jamais recherché en Italie, et je songe à le faire réimprimer en Angleterre sans rien retrancher. Malheureuse condition de ma patrie! si l'on peut nommer patrie une terre avilie par la fortune, par les hommes et par elle-même.»
»Rose vous traduira cela. A-t-il eu sa lettre? je l'ai envoyée dans une des vôtres, il y a quelques mois. Je dissuaderai Leoni de publier ce poème, ou bien il peut lui arriver de voir l'intérieur du château Saint-Ange. La dernière pensée de sa lettre est le commun et pathétique sentiment de tous ses compatriotes.
Sir Humphrey Davy était ici la dernière quinzaine, et j'ai joui de sa société chez une fort jolie Italienne de haut rang, qui, pour déployer son érudition en présence du grand chimiste, décrivant sa quatorzième visite au mont Vésuve, demanda «s'il n'y avait pas un semblable volcan en Irlande.» Le seul volcan irlandais que je connusse était le lac de Killarney, que je pensai naturellement être désigné par la dame; mais une seconde pensée me fit deviner qu'elle voulait parler de l'Islande et de l'Hécla: – et il en était ainsi, quoiqu'elle ait soutenu sa topographie volcanique pendant quelque tems avec l'aimable opiniâtreté du beau sexe. Elle se tourna bientôt après vers moi, et m'adressa diverses questions sur la philosophie de sir Humphrey, et j'expliquai aussi bien qu'un oracle le talent qu'il avait déployé dans la construction de la lampe de sûreté contre le gaz inflammable, et dans la restauration des manuscrits de Pompéïa. «Mais comment l'appelez-vous? dit-elle. –