UKAPISME - Une Gauche perdue. Christopher Ford
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« C'est un parti qui ne vise pas la dictature du prolétariat et de la paysannerie révolutionnaire, mais la dictature d'une section du prolétariat et de son propre parti. Il est, par conséquent, profondément violent et il substitue à la violence prolétarienne contre la bourgeoisie la violence d'un petit groupe. »7
Il s'est révélé être « un parti hypocrite qui viole ses propres principes » et qui ne peut « avoir notre confiance jusqu'à ce qu'il soit transformé au plan de l'organisation et fusionne avec les intérêts du peuple laborieux ukrainien. »8 Ces critiques des Nezalezhnyky de 1918 anticipaient sur certains points celles de Gorter et Pannekoek et du KAPD en Allemagne et celles des oppositions communistes dans le RKP(B) dans les années 1920.9
Le renouvellement de l'UNR [Rada] fut accompagné d'un cours très réactionnaire, les éléments conservateurs se lançant dans les pogroms et dans une répression indiscriminée envers le mouvement paysan et ouvrier10. La classe moyenne et les éléments modérés, favorables à une démocratie parlementaire, furent prisonniers politiquement de ces éléments auxquels ils s'étaient liés11. Les deux conceptions, conseils ouvriers ou parlement, furent débattues au VI° congrès du POSDU, les 10-12 janvier 1919.
Richysky présenta la thèses Nezalezhnyky : la tache était de « transformer la République populaire ukrainienne souveraine et indépendante en une République socialiste ukrainienne souveraine et indépendante. »12 Le pouvoir doit être organisé selon le « principe d'une dictature du prolétariat urbain et rural et de la paysannerie laborieuse et pauvre, organisée en conseils ouvriers-paysans. »13 Sur les questions internationales, tout en défendant l'indépendance de l'Ukraine les Nezalezhnyky demandent :
« a) le rapprochement avec la République soviétique russe, sur la base de la reconnaissance mutuelle de la souveraineté de chaque république socialiste, d'une non-ingérence mutuelle complète dans leurs affaires intérieures, du retrait immédiat des troupes russes du territoire ukrainien (incluant la Crimée), de la non-ingérence dans les affaires intérieures ukrainiennes et, en cas de refus, d'une défense active de la République Socialiste Ukrainienne contre l'attaque impérialiste. »14
La majorité du Comité central avait adopté ces positions ; l'opposition groupait un centre et une aile droite nommé « groupe d'Ekaterinoslav » avec Issak Mazepa, Panas Fadenko et Ivan Romanchenko, rejoint de façon surprenante par Mykola Porsh15. Durant ce congrès, les délégués ne pouvaient dormir dans leur lit de crainte d'être arrêtés16. Après que leur résolution eût été repoussée [par le congrès], les Nezalezhnyky partirent et lancèrent le journal Chervony Prapor (Drapeau rouge) le 22 janvier17. Il comportait une déclaration rédigée par Tkachenko et Richytsky établissant qu'il fallait maintenant passer « de l'attente passive au combat créatif et actif pour la reconstruction de tout l'ordre socio-politique et économique en Ukraine. »18 Réagissant à la crainte suscitée par la domination des « éléments urbains non ukrainiens », il précisait que « le prolétariat n'est pas entièrement étranger » et affirmait que « en Ukraine il peut et doit prendre le pouvoir de concert avec la paysannerie révolutionnaire »19, expliquant que dans la dynamique de la révolution les travailleurs non-Ukrainiens seraient de plus en plus impliqués dans toutes les formes de la vie interne de l'Ukraine et « se débarrasseraient eux-mêmes des vestiges de la vieille Russie en rejoignant le peuple et le prolétariat ukrainien. »
Khrystiiuk estime que les Nezaleznhyky sont restés liés beaucoup trop longtemps au Directoire20, et qu'en pratique leur approche dans la période allant de décembre 1918 à janvier 1920 a combiné des aspects réformistes et des aspects révolutionnaires. Ils n'avaient pas assez de force pour tirer le Directoire à eux, ni pour mettre en oeuvre leur objectif d'un « gouvernement ouvrier-paysan composé des représentants des partis et groupes reconnaissant le pouvoir des soviets. »21 Pour construire cette unité une réunion des socialistes ukrainiens et non ukrainiens s'est tenue mi-janvier avec la participation des Nezaleznhyky, du Bund, du Parti Socialiste Juif Unifié et des mencheviks internationalistes22, qui ne donna pas de résultats concrets et décida seulement de maintenir le contact « pour défendre la révolution ouvrière et paysanne en Ukraine, promouvoir la lutte nationale, corriger la ligne politique et les fautes tactiques des bolcheviks russes en Ukraine. »23
Les Nezaleznyky tentèrent aussi d'utiliser leurs positions [dans le Directoire] pour imposer une politique de paix avec la Russie soviétique24. Yurko Mazurenko fut nommé pour une mission diplomatique à Moscou le 15 janvier 1919.
« Je déclarai que j'irai à la condition que les décrets sur le transfert du pouvoir local aux soviets et que la convocation d'un congrès des soviets (et non d'un « congrès du travail ») soit lancée immédiatement, et que le parti communiste soit légalisé. Je fus, bien entendu, ostracisé par le Directoire. »25
La gauche affirme que la mission fut sabotée par l'aile droite du Directoire qui publia une déclaration de guerre à la Russie des soviets le 16 janvier 191926. Chekhivsky et Vynnychenko démissionnèrent alors en dénonçant le tournant pro-Entente du gouvernement27. Les Nezaleznhyky tournèrent, s'orientant désormais vers l'insurrection pour établir le pouvoir des soviets par la force sur la base des gardes rouges28. Le principal centre insurrectionnel fut la région de Kyiv ; en congrès à Hryhoriv la division Dniprovska se renomma Première Division du Soviet de Kyiv et élut Danylo Zeleny ataman (commandant) avec son Comité révolutionnaire rejoint par les Nezaleznhyky29.
2.2 La République Ukrainienne Socialiste des Conseils (1919)
Le 4 février 1919 le Directoire de l'UNR quitte Kyiv devant l'avancée des forces soviétiques. Chervony Prapor conclut « le rôle positif du Directoire est terminé »30. Yurii Lapchynsky écrit qu'en 1919 le « mouvement communiste et le pouvoir des Soviets en Ukraine sont engagés dans une situation politique totalement différente de la première période. »31