Œuvres complètes de lord Byron, Tome 3. George Gordon Byron
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Après avoir séjourné quelques jours dans la capitale de l'Albanie, nous nous rendîmes à son invitation; mais, quoique prémunis de tout ce qui pouvait nous être utile et escortés par un secrétaire du vizir, nous fûmes neuf jours (à cause des pluies) à faire un voyage qui, à notre retour, n'en dura que quatre.
Nous rencontrâmes, sur notre route, deux villes: Argyrocastro et Libochabo, peu inférieures, à ce qu'il nous parut, à Janina, et le pinceau et la plume ne pourraient rendre dignement les beautés des sites qu'offre le voisinage de Zitza et de Delvinachi, village placé sur la frontière de l'Épire et de l'Albanie proprement dite.
Je ne m'étendrai pas sur l'Albanie et ses habitans, parce que cette tâche sera beaucoup mieux remplie par mon compagnon de voyage dans un livre dont la publication précédera probablement celle du mien, et qu'il me conviendrait aussi peu d'imiter que de précéder; mais un petit nombre d'observations sont nécessaires à l'intelligence du texte.
Les Arnautes ou Albanais me frappèrent beaucoup par leur ressemblance avec les montagnards de l'Écosse, dans leur habillement, leur figure et leur manière de vivre. Leurs montagnes même me parurent des montagnes calédoniennes avec un plus beau climat. Le kilt (espèce de jupon que portent les montagnards de l'Écosse) quoique blanc, leurs formes minces et souples, leur dialecte celtique dans ses sons, et leurs habitudes hardies, tout me transportait à Morven. Aucune nation n'est si détestée ni si redoutée de ses voisins que les Albanais; les Grecs les regardaient à peine comme chrétiens, et les Turcs comme mahométans: dans le fait, ils ont un mélange de ces deux religions, et quelquefois ils n'en suivent aucune. Leurs habitudes sont vagabondes et portées au pillage; ils sont tous armés: et les Arnautes aux schawls rouges, les Monténégrins, les Chimariotes et les Gegdes sont perfides. Les autres Albanais diffèrent un peu dans le costume, et essentiellement dans le caractère. Aussi loin que va mon expérience, j'en puis parler favorablement. J'étais accompagné par deux, un infidèle et un musulman, à Constantinople et dans toutes les parties de la Turquie que j'ai visitées, et on trouverait rarement quelqu'un plus fidèle dans le péril et plus infatigable dans le service. L'infidèle se nommait Basilius, le musulman Derwich Tahiri. Le premier était un homme d'un moyen âge, et le second avait à peu près le mien. Basili était expressément chargé par
Lorsqu'on 1810, après le départ de mon ami, M. Hobbouse, pour l'Angleterre, je fus saisi d'une violente fièvre en Morée, ces deux hommes me sauvèrent la vie en repoussant mon médecin, qu'ils menacèrent de lui couper le cou, s'il ne me guérissait pas dans un tems donné. C'est à l'assurance consolante d'une rétribution posthume et au refus absolu d'exécuter les ordonnances du docteur Romanelli que j'attribuai ma guérison. J'avais laissé le dernier domestique anglais qui me restait, à Athènes; mon drogman était aussi malade que moi, et mes bons Arnautes me soignèrent avec une attention qui eût fait honneur à la civilisation.
Ils eurent de nombreuses aventures, car le musulman Derwich, étant un fort bel homme, était toujours en querelle avec les maris d'Athènes; de telle sorte que quatre des principaux Turcs me firent une visite de remontrance au couvent où je logeais, parce qu'il avait enlevé une femme du bain, – femme qu'il avait légalement achetée cependant, – chose très-contraire à l'étiquette.
Basili aussi était fort galant à sa manière, et il avait la plus grande vénération pour l'église, en même tems que le plus haut mépris pour les hommes d'église, qu'il souffletait dans l'occasion de la manière la plus hétérodoxe. Cependant il ne passait jamais devant une église sans se signer, et je me rappelle encore les risques qu'il courut en entrant dans Sainte-Sophie, à Constantinople, parce que cette mosquée avait été autrefois consacrée à son culte. Lorsqu'on lui faisait des remontrances sur sa conduite irrégulière, il répondait toujours: «Notre église est sainte, mais nos prêtres sont des voleurs,» et alors il se signait comme il en avait coutume, et il
Quand je fis les préparatifs de mon retour, mes Albanais furent appelés pour recevoir leurs gages. Basili prit les siens avec une démonstration maladroite de regrets de mon départ, et il s'en alla bien vite avec son sac de piastres. J'envoyai chercher de nouveau Derwich, mais on fut quelque tems à le trouver; à la fin, il entra, juste au moment où le signor
Pour ma propre part, quand je me rappelai que, peu de tems avant mon départ de l'Angleterre, un noble personnage, avec qui j'avais été intimement lié, s'excusa de prendre congé de moi, parce qu'il avait à accompagner une de ses parentes chez
Que Derwich me quittât avec quelque regret, je devais m'y attendre: quand le maître et le domestique ont gravi ensemble les montagnes d'une douzaine de provinces, ils ne se séparent qu'à regret. Mais la sensibilité présente de Derwich, en contraste avec sa férocité native, améliora l'opinion que j'avais du cœur humain. Je crois que cette fidélité, presque féodale, est fréquente parmi les Albanais. Un jour, pendant notre voyage sur le Parnasse, un Anglais à mon service apostropha brusquement Derwich dans une dispute concernant mes bagages, et l'Albanais crut que l'autre avait voulu le frapper: il ne dit rien, mais il s'assit, appuyant sa tête sur ses mains. Prévoyant les conséquences qui allaient arriver, nous nous efforçâmes de lui faire comprendre qu'on n'avait pas voulu lui faire un affront. Il ne donna que la réponse suivante: «J'ai été
Derwich excellait dans la danse de son pays, que l'on suppose être un reste de l'ancienne Pyrrhique. Que cela soit ou non, c'est une danse mâle et qui exige une prodigieuse agilité. Elle diffère essentiellement de la stupide Romaïque et de la ronde lourde des Grecs, dont notre compagnie (
Les Albanais en général (je n'entends point les cultivateurs dans les provinces, qui portent aussi ce nom, mais les montagnards) ont une contenance distinguée; et les plus belles femmes que j'aie jamais vues, pour les formes et pour les traits du visage, je les vis
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À peu près le quart d'un liard.