La maison d'un artiste, Tome 2. Edmond de Goncourt

Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу La maison d'un artiste, Tome 2 - Edmond de Goncourt страница 16

La maison d'un artiste, Tome 2 - Edmond de Goncourt

Скачать книгу

de Lavallée; le joli petit volume de Ripault, intitulé: «Une journée de Paris, Paris, an cinquième»; une infiniment petite plaquette qui, avec «les Semaines critiques» et le «Nouveau Paris», sont les trois ouvrages à consulter, pour qui veut apprendre les mœurs du Directoire; «les Fragments sur Paris par Meyer, traduits de l'allemand par le général Dumouriez, Hambourg, 1798»; «le Nouveau Diable boiteux, tableau philosophique et moral de Paris, mémoires mis en lumière et enrichis de notes par le docteur Dicaculus de Louvain. Paris, an VII de la République», avec deux estampes d'après Garnerey, gravées par Delignon; «les Matinées a Paris, voyage d'un Allemand à Paris. Lausanne, 1800»; «Paris au xviiie siècle, par Pujoulx, 1801»; le Péruvien a Paris, par Joseph Rosny, 1801; «Lettre d'un mameluck, ou Tableau moral et critique de quelques parties des mœurs de Paris, par J. Lavallée, 1803.»

      De ces livres qui visent à la peinture d'ensemble de Paris, descendons à des livres moins ambitieux, et dont la prétention est seulement d'en esquisser un petit coin. Commençons par le coin, qu'on appelait alors «la capitale de Paris»: le Palais-Royal, et sur lequel il y a tant de brochurettes que leur bibliographie pourrait faire un volume.

      «Almanach du Palais-Royal pour l'année 1785; Paris, chez Royez.» On trouve dans le Palais-Royal aux trois arcades nouvellement bâties, les spectacles des Variétés et des Petits Comédiens du duc de Beaujolais, le café de Foy, le café du Caveau, le café Mécanique, le café de Beaujolais, le café de Valois, le café Polonois, les hôtels garnis de la Reine, de l'Empereur, d'Orléans, de Chartres, de Vauban, de Montpensier, les restaurateurs Huré, de Labarrière, Gautier, Pottel, des bains établis au no 63, deux gaufriers, un confiseur, un distillateur, un bureau de vin qui se charge d'approvisionner les maisons de vins bourgeois, six marchands de draperies et soieries, huit marchands tailleurs, deux marchandes de modes, deux fleuristes, quatre marchandes-couturières, douze bijoutiers, trois libraires, deux marchands de musique, un marchand de tableaux, quatre marchands d'estampes, deux boutonniers, trois opticiens, trois horlogers, deux tabletiers et marchands de cannes, un marchand de papiers peints, deux chapeliers, et Curtius offrant ses talents aux personnes désireuses d'avoir leur portrait en cire.

      Un almanach plus curieux et qu'aucun amateur n'a rencontré complet jusqu'ici, est un almanach dont je possède seulement quatre petites vignettes coloriées: le Marchand de marrons, pl. 3; les Ombres chinoises, pl. 12; les Boutiques de Bois, pl. 53; Vue générale du Jardin, pl. 62.

      «Tableau du Palais-Royal, chez Maradan, 1787»: une description détaillée en place de la sèche nomenclature de l'almanach, avec les changements apportés par les trois années qui se sont écoulées. On y voit le café du Caveau peint avec ses glaces reflétant le jardin, et son pourtour de bustes de Gluck, de Sachini, de Piccini, de Grétry, sous lesquels se juge tout ce qui paraît ou se joue à Paris. Le café Foy se développe dans l'étendue de ses sept arcades, avec ses murs revêtus d'une boiserie précieusement sculptée: le café fréquenté par les gens du bel air, le café qui a la renommée pour les glaces; puis c'est le café Mécanique, où le service se fait au moyen de pieds de tables creux et d'une soupape par laquelle monte une servante à double étage; le café Italien qui a un poêle, en forme de globe aérostatique, surmonté d'un Génie; le café de Chartres, le rendez-vous des gens d'affaires; le nouveau café de la Grotte Flamande, où l'on commence à venir boire de la bière le soir. Parmi les restaurateurs en vogue, le plus fréquenté est Beauvilliers dont les salons sont décorés d'un papier chinois, et où la bouteille de vin le plus ordinaire coûte vingt sols. Là mangent les riches militaires, les jeunes gens les plus qualifiés, les gros joueurs en compagnie de filles élégantes. Et ce sont des descriptions des Variétés, des Ombres Chinoises et des modistes et des bijoutiers et de tout le peuple marchand du Palais.

      La «Lettre écrite du Palais-Royal aux quatre Parties du Monde, 1785» s'exprime en ces termes: «Ni les vignes de Rome, ni les jardins du Grand-Seigneur, ni les ventes de l'Orient, ni les foires de Beaucaire, ni celles de Sigaglia, n'ont rien qu'on puisse comparer aux variétés de ce Palais vraiment délicieux. Les chagrins y sont suspendus, les haines engourdies, les plaisirs toujours renaissants, les objets variés comme les fleurs d'un parterre, les tableaux mouvants comme ceux d'une optique. Lieu ravissant! Voit qui veut, achète qui peut. Que de jolies marchandises exposées aux regards des promeneurs! Que de précieux colifichets proposés par les femmes les plus engageantes! Que de modes qui naissent et vieillissent dans vingt-quatre heures! Que d'appâts délicatement préparés pour les amateurs et les curieux! Chaque boutique est la niche de l'élégance et du goût.»

      Si nous remontons un peu en arrière, nous trouvons cette brochure au joli titre: les Soirées du Palais-Royal, ou les Veillées d'une jolie femme contenant quatre lettres à une amie, avec la conversation des chaises du Palais-Royal, sous l'arbre de Cracovie, 1762; et cette autre brochure: «Observations sur la destruction de la promenade du Palais-Royal, 1781», et qui commence ainsi: «Milord, vous me demandez s'il n'y a plus de promenade publique dans le jardin du Palais-Royal? Hélas! non. Cette grande allée faite en berceau, la plus belle de l'univers, ce rendez-vous général de Paris et de tous les étrangers, cette salle d'audience que le ciel lui-même avait tapissée de verdure, n'est plus. Des mains sacrilèges, armées de scies, ont détruit, dans quelques jours, un ouvrage que la nature avait mis un siècle à former. M. le duc de Chartres a vendu, pour 1,800 livres, la destruction d'une allée que le public aurait achetée vingt millions.» Et une estampe montre l'allée tombant sous la cognée, dans les pleurs des petites filles et la consternation des nouvellistes.

      A la suite, les livres et les brochures de toutes sortes: «l'Hamadryade du Palais-Royal, par M. de Longueville, tenant un bureau d'écrivain public, dans la galerie communiquant de la Cour des Fontaines à la rue Saint-Honoré, et qui, après avoir rédigé son Hamadryade en 1777, 1778, 1779, 1780, finit par se jeter à l'eau en 1786; les Entretiens du Palais-Royal, 1786, par un missionnaire du Camp des Tartares (Première partie). A Gattières, 1788»; «Extrait des nouvelles à la main du 12 juillet 1787, ou préservatif contre les escroqueries faites ou à faire aux locataires des boutiques du Palais-Royal. Berne, 1788»: brochure dans laquelle il est question de filouteries faites par un sieur Boileau, au détriment du ménage Cuisinier tenant le café du Caveau»; «Réclamations pour les principaux locataires et sous-locataires des bâtiments du Palais-Royal contre M. d'Orléans», factum in-4; «Athenæum, ou idées d'un citoyen sur le nouvel édifice, construit dans l'enceinte du Palais-Royal, 1789»; «Liste des Maisons de jeux, Académies, tripots, banquiers croupiers, bailleurs de fonds, joueurs de profession, honnêtes ou fripons, grecs ou demi-grecs, racoleurs de dupes, avec le détail de tout ce qui se passe dans ces maisons, les ruses qu'on y emploie, et le nom de femmes que l'on met en avant pour amorcer les dupes, par un joueur ruiné. De l'imprimerie de Biribi, 1791»; «l'Écouteur, ou une soirée au Palais de Philippe par l'auteur des Mille et une fadaises, à Cocopolis, l'an III de la Papirocratie»; «Apparition de l'ange consolateur à un moribond au ci-devant Palais-Royal, chez les marchands de nouveautés, an III»; «Détail exact du terrible incendie arrivé au Palais-Egalité dans le Lycée des Arts. Destruction de ce superbe édifice. – La cause de cet évènement malheureux. – Trait héroïque d'un membre du conseil des Cinq-Cents qui a sauvé des flâmes une jeune personne de dix-sept ans. – Courage des pompiers…»; «Révolution en vaudeville des jolies femmes de Paris contre les costumes des Merveilleuses et Incroyables du Palais-Royal», canard contenant une chanson sur l'air des Visitandines, surmontée d'une mauvaise imagerie d'Épinal, représentant des Incroyables et des Merveilleuses; «Voyage autour des Galeries du Palais-Égalité, par S…e, chez Maller, an VIII», avec une vignette représentant la promenade des filles dans les galeries; «le Gros Lot, ou une journée de Jocrisse au Palais-Égalité, par Hector Chaussier, an IX», illustré en tête d'une figure d'Incroyable coloriée; «le Censeur, ou Voyage sentimental autour du Palais-Royal, par Joseph Rosny, an XI.»22

      Du Palais-Royal rayonnons sur le reste de la ville, à l'aide de ces courtes moqueries, de ces petits in-douze ironiques, croquant spirituellement les endroits de Paris, où la vie de la capitale

Скачать книгу


<p>22</p>

Je renvoie les curieux du Palais-Royal aux aspects différents présentés dans l'Histoire de la société française pendant la Révolution, et dans la «Monographie» de De Bucourt.