Le Ciel De Nadira. Giovanni Mongiovì
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Читать онлайн книгу Le Ciel De Nadira - Giovanni Mongiovì страница 13
Donc Umar fit un signe à la servante qui était sur la porte, et qui tenait une grande cruche en terre cuite pleine d’eau.
“ Fais venir Nadira. ”
La servante sortit donc de la pièce.
Les quatre restèrent durant de longues minutes en silence, en attendant que se présenta la jeune fille qui avait généré tant de curiosité chez l’étranger. Nerveusement Umar pris un bout de pain du plat mis au centre, et le plongea dans le miel, le portant ensuite en bouche.
Nadira, qui était restée tout le temps dans sa chambre, après la dernière dispute avec son frère, entra dans la pièce. Elle portait encore ce bel habit vert de l’après-midi, aux finitions jaunes et bleues et comme d’habitude, en présence d’hommes étrangers, elle se couvrait la face.
Jala et Ghadda, perplexes et curieuses, s’approchèrent de la porte.
“ C’est elle, la jeune fille qui a capturé le cœur de ibn al-Ḥawwās ? ” Demanda Salim, en s’adressant à Umar.
“ En personne… ma sœur Nadira. ”
Salim se releva, tandis que les autres deux en le suivant se regardèrent l’un l’autre, perdus dans cette atmosphère devenue subitement enchantée.
Nadira s’arrêta au milieu de la pièce, et fixa Umar en essayant de com-prendre ce que désirait d’elle cet invité, et quel rôle il avait dans tout cela.
“ Viens, jeune fille, approche-toi ! ” lui fit Salim, en mimant l’invitation de la main.
Umar consentit de la tête et elle, comprenant de pouvoir faire confiance, fit deux pas en avant.
Maintenant les yeux de Salim se perdaient dans ceux de la jeune fille, mais il la regarda avec une telle intensité qu’elle dû baisser le regard avec embarras, comme si l’acte d’observer une homme pouvait représenter une vraie menace.
Après quelques secondes Umar intervint :
“ La nuit entière ne te suffira pas pour combler ta vue. ”
Et en s’adressant à Nadira :
“ cela peut suffire, ma sœur. ”
Donc Salim intervint :
“ Non, jeune fille, attend un moment ! Et toi Umar, je deviendrais fou si je ne te demandais pas une chose. ”
“ Dis moi. ”
“ Je ne vois pas d’esclaves noires dans cette maison, pourtant chaque homme qui se respecte en a au moins une. Tu viendras avec moi jusque dans ma ville, tu porteras avec toi tous les hommes que tu voudras, autant que tu en jugeras nécessaire, je remplirai les bras de chacun d’eux, et couvrirai de tout ce qui te sembleras beau, la croupe de chaque cheval ou dromadaire qui tu emporteras…. Et je te donnerai même une esclave noire. Je suis un homme très riche et noble de sang ; ne renonce pas, mon frère ! On dira de toi de grandes choses, et pour sûr une mosquée portera ton nom. ”
Les oreilles de Umar sifflèrent en entendant cette offre excessive, et sa tête devint légère, vide, perdue dans la confusion de ce qu’il lui proposait. Toutefois Umar pensa bien de bloquer toute négociation avant qu’elle ne puisse naître, car il imaginait bien ce pouvait être la nature de la contre-partie.
“ Je ne manquerai pas de respect envers mon Qā’id en permettant que quelqu’un d’autre me rende riche. ”
Nadira sorti alors définitivement de la pièce, tout en restant avec les autres femmes dans un endroit où elle aurait pu entendre tout, sans être vue.
Salim retourna s’asseoir, humilié par ce refus. Se lissant la barbe, il dit lentement :
“ Un jour, quand mon fils était encore un enfant, je le vis jouer avec certains robā’i33 en or ; il les utilisait comme s’il s’agissait de petits blocs de bois, en les empilant et en les laissant tomber. La servante, contrariée, le grondait follement, très intentionnée à les lui faire déposer. Enfin je m’approchai de lui et sortis de mes poches quelques monnaies en verre coloré, je les lui proposais en échange de celles en or. L’enfant accepta promptement l’échange.
Voilà, toi, mon cher Umar, tu es comme cet enfant, disposé à renoncer à une offre en or, et tu te contentes de simples verres colorés. ”
“ Avec le verre coloré les personnes achètent le pain ! ” s’exclama Umar, ennuyé par ce détour ayant l’objectif de le vexer.
“ Tu ne voudras quand même pas rester pour toujours un homme aux verres colorés… Tu as chez toi quelque chose qui vaut plus que de l’or… et crois-moi si je te le dis, ton Qā’id n’est pas du tout en train de te respecter ! ”
“ Ma sœur appartient déjà à Ali ibn al-Ḥawwās ! ” dit Umar en haussant le ton, se redressant et pointant le doigt sur Salim.
“ Le ”Démagogue”, celui qui envoûte son peuple par de simples paroles… a une grande qualité, c’est certain… et moi je ne pourrais faire mieux. Mais comprends-tu, mon frère, ibn al- Ḥawwās n’est capable que d’offrir des paroles ? Uniquement des pièces en verre coloré ! ”
“ il paiera le prix de Nadira quand il pourra l’avoir. ”
“ Moi je t’offre bien plus, et sans même te demander de l’avoir. Sincèrement l’amour charnel me satisfait moins que l’or et le plaisir de le dé-penser. ”
Umar fut déplacé ; était-il possible que cette personne ne comprenait pas ce qu’il pensait depuis le début de cette seconde proposition ?
“ Le dépenser comment, dans ce cas ? ” demanda t-il ?
“ Tu ne penses quand même pas que la beauté de Nadira se limite à ses yeux ? Et cela ton Qā’id doit l’avoir compris aussi, autrement il se serait limité à la regarder.
Ce que ta sœur cache sous son voile doit certainement être digne de ses yeux, j’en suis sûr. Je te demande uniquement de la faire danser pour moi, ce soir, dans cette pièce. ”
Umar sentit un feu qui lui montait aux oreilles. Il défiait sa jalousie comme si son rôle de protecteur de la jeune fille ne valait rien.
“ Jamal, fait don du médaillon que tu portes au cou à mon ami ! ” com-manda Salim à un des siens, croyant encore pouvoir acheter Umar.
Celui-ci se leva et mit le gros médaillon au cou du patron de la maison.
Umar l’approcha donc de sa vue pour mieux l’analyser : il s’agissait d’un objet très coûteux, bien taillé, bien gravé et très lourd.
“ Ainsi tout le monde te remarquera, mon frère !“ commenta Salim, en souriant.“
Toutefois Umar enleva l’héritage et le laissa tomber sur le plat de pain. ” Dans cette maison on a jamais joué de la musique ou dansé ! ”
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Robā’i: monnaie en or utilisée en Sicile durant la période arabe. Équivaut à un quart de dinar, monnaie dorée de référence.