LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur. Морис Леблан

Чтение книги онлайн.

Читать онлайн книгу LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur - Морис Леблан страница 191

LUPIN - Les aventures du gentleman-cambrioleur - Морис Леблан

Скачать книгу

frisson d’épouvante.

      Sernine voyait distinctement sa pâle figure, ses joues maigres contre lesquelles il serrait ses poings crispés. Une larme coula, une seule, lente et désolée. Les yeux fixaient le vide, des yeux effrayants de tristesse, et qui semblaient voir déjà le redoutable néant.

      Et c’était une figure si jeune ! Des joues si tendres encore, que ne rayait la cicatrice d’aucune ride ! Et des yeux bleus, d’un bleu de ciel oriental.

      Minuit… les douze coups tragiques de minuit, auxquels tant de désespérés ont accroché la dernière seconde de leur existence !

      Au douzième, il se dressa de nouveau et, bravement cette fois, sans trembler, regarda la corde sinistre. Il essaya même un sourire – pauvre sourire, lamentable grimace du condamné que la mort a déjà saisi.

      Rapidement il monta sur la chaise et prit la corde d’une main.

      Un instant il resta là, immobile, non point qu’il hésitât ou manquât de courage, mais c’était l’instant suprême, la minute de grâce que l’on s’accorde avant le geste fatal.

      Il contempla la chambre infâme où le mauvais destin l’avait acculé, l’affreux papier des murs, le lit misérable.

      Sur la table, pas un livre : tout avait été vendu. Pas une photographie, pas une enveloppe de lettre ! Il n’avait plus ni père, ni mère, plus de famille… Qu’est-ce qui le rattachait à l’existence ? Rien, ni personne.

      D’un mouvement brusque, il engagea sa tête dans le nœud coulant et tira sur la corde jusqu’à ce que le nœud lui serrât bien le cou.

      Et, des deux pieds renversant la chaise, il sauta dans le vide.

      – 5 –

      Dix secondes, vingt secondes s’écoulèrent, vingt secondes formidables, éternelles…

      Le corps avait eu deux ou trois convulsions. Les jambes avaient instinctivement cherché un point d’appui. Plus rien maintenant ne bougeait…

      Quelques secondes encore… La petite porte vitrée s’ouvrit.

      Sernine entra.

      Sans la moindre hâte, il saisit la feuille de papier où le jeune homme avait apposé sa signature et il lut :

      « Las de la vie, malade, sans argent, sans espoir, je me tue. Qu’on n’accuse personne de ma mort.

      « 30 avril. – Gérard Baupré. »

      Il remit la feuille sur la table, bien en vue, approcha la chaise et la posa sous les pieds du jeune homme. Lui-même il escalada la table, et, tout en tenant le corps serré contre lui, il le souleva, élargit le nœud coulant et dépassa la tête.

      Le corps fléchit entre ses bras. Il le laissa glisser sur le long de la table, et, sautant à terre, il l’étendit sur le lit.

      Puis, toujours avec le même flegme, il entrebâilla la porte de sortie.

      – Vous êtes là tous les trois ? murmura-t-il.

      Près de lui, au pied de l’escalier de bois, quelqu’un répondit :

      – Nous sommes là. Faut-il hisser notre paquet ?

      – Allez-y !

      Il prit le bougeoir et les éclaira.

      Péniblement les trois hommes montèrent l’escalier en portant le sac où était ficelé l’individu.

      – Déposez-le ici, dit-il en montrant la table.

      À l’aide d’un canif il coupa les ficelles qui entouraient le sac. Un drap blanc apparut qu’il écarta.

      Dans ce drap, il y avait un cadavre, le cadavre de Pierre Leduc.

      – Pauvre Pierre Leduc, dit Sernine, tu ne sauras jamais ce que tu as perdu en mourant si jeune ! Je t’aurais mené loin, mon bonhomme. Enfin, on se passera de tes services… Allons, Philippe, grimpe sur la table, et toi, Octave, sur la chaise. Soulevez-lui la tête et engagez le nœud coulant.

      Deux minutes plus tard le corps de Pierre Leduc se balançait au bout de la corde.

      – Parfait, ce n’est pas plus difficile que cela, une substitution de cadavres. Maintenant vous pouvez vous retirer tous. Toi, Docteur, tu repasseras ici demain matin, tu apprendras le suicide du sieur Gérard Baupré, tu entends, de Gérard Baupré – voici sa lettre d’adieu – tu feras appeler le médecin légiste et le commissaire, tu t’arrangeras pour que ni l’un ni l’autre ne constatent que le défunt a un doigt coupé et une cicatrice à la joue…

      – Facile.

      – Et tu feras en sorte que le procès-verbal soit écrit aussitôt et sous ta dictée.

      – Facile.

      – Enfin, évite l’envoi à la Morgue et qu’on donne le permis d’inhumer séance tenante.

      – Moins facile.

      – Essaie. Tu as examiné celui-là ?

      Il désignait le jeune homme qui gisait inerte sur le lit.

      – Oui, affirma le Docteur. La respiration redevient normale. Mais on risquait gros… la carotide eût pu…

      – Qui ne risque rien… Dans combien de temps reprendra-t-il connaissance ?

      – D’ici quelques minutes.

      – Bien. Ah ! Ne pars pas encore. Docteur. Reste en bas. Ton rôle n’est pas fini ce soir.

      Demeuré seul, le prince alluma une cigarette et fuma tranquillement, en lançant vers le plafond de petits anneaux de fumée bleue.

      Un soupir le tira de sa rêverie. Il s’approcha du lit. Le jeune homme commençait à s’agiter, et sa poitrine se soulevait et s’abaissait violemment, ainsi qu’un dormeur sous l’influence d’un cauchemar.

      Il porta ses mains à sa gorge comme s’il éprouvait une douleur, et ce geste le dressa d’un coup, terrifié, pantelant

      Alors, il aperçut, en face de lui, Sernine.

      – Vous ! murmura-t-il sans comprendre… Vous !…

      Il le contemplait d’un regard stupide, comme il eût contemplé un fantôme.

      De nouveau il toucha sa gorge, palpa son cou, sa nuque… Et soudain il eut un cri rauque, une folie d’épouvante agrandit ses yeux, hérissa le poil de son crâne, le secoua tout entier comme une feuille ! Le prince s’était effacé, et il avait vu, il voyait au bout de la corde, le pendu !

      Il recula jusqu’au mur. Cet homme, ce pendu, c’était lui ! C’était lui-même. Il était mort, et il se voyait mort ! Rêve atroce qui suit le trépas ? Hallucination de ceux qui ne sont

Скачать книгу