Le Cabinet des Fées. Anonyme
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Le Chat devint grand seigneur, et ne courut plus après les souris que pour se divertir.
MORALITÉ.
Quelque grand que soit l'avantage,
De jouir d'un riche héritage
Venant à nous de père en fils,
Aux jeunes gens, pour l'ordinaire,
L'industrie et le savoir-faire
Valent mieux que des biens acquis.
AUTRE MORALITÉ.
Si le fils d'un meunier avec tant de vitesse
Gagne le coeur d'une princesse,
Et s'en fait regarder avec des yeux mourants,
C'est que l'habit, la mine et la jeunesse,
Pour inspirer de la tendresse,
Ne sont pas des moyens toujours indifférents.
Note 1: (retour) Le procureur, the lawyer.
Note 2: (retour) a lot, share.
Note 3: (retour) en se mettant ensemble, in joining themselves together.
Note 4: (retour) qui n'en fit pas semblant, who feigned not to listen.
Note 5: (retour) me faire faire, to order for me.
Note 6: (retour) ne fit pas grand fond là-dessus, did not rely a great deal on this.
Note 7: (retour) pour faire le mort, to make think he was dead.
Note 8: (retour) une garenne, a warren.
Note 9: (retour) M'a chargé, has requested me.
Note 10: (retour) Drôle, the rogue.
Note 11: (retour) d'aller quérir, to go and fetch.
Note 12: (retour) relevaient, increased.
Note 13: (retour) de la promenade, of the party.
Note 14: (retour) chair à pâté, mince-meat.
Note 15: (retour) Courut au-devant, ran to meet him.
Note 16: (retour) Il ne tiendra qu'à vous, it will only be in your power.
CENDRILLON.
Il était une fois un gentilhomme qui épousa en secondes noces une femme, la plus hautaine et la plus fière qu'on eût jamais vue. Elle avait deux filles de son humeur, et qui lui ressemblaient en toutes choses. Le mari avait de son côté une jeune fille, mais d'une douceur et d'une bonté sans exemple: elle tenait cela de sa mère, qui était la meilleure personne du monde.
Les noces ne furent pas plus tôt faites, 1 que la belle-mère fit éclater sa mauvaise humeur: elle ne put souffrir les bonnes qualités de cette jeune enfant, qui rendaient ses filles encore plus haïssables.
Elle la chargea des plus viles occupations de la maison: c'était elle qui nettoyait la vaisselle et les montées, 2 qui frottait la chambre de madame et celle de mesdemoiselles ses filles; elle couchait tout au haut de la maison, dans un grenier, sur une méchante paillasse, pendant que ses soeurs étaient dans des chambres parquetées, où elles avaient des lits des plus à la mode, et des miroirs où elles se voyaient depuis les pieds jusqu'à la tête.
La pauvre fille souffrait tout avec patience, et n'osait se plaindre à son père, qui l'aurait grondée, parce que sa femme le gouvernait entièrement. Lorsqu'elle avait fait son ouvrage, elle s'allait mettre au coin de la cheminée, et s'asseoir dans les cendres, ce qui faisait qu'on l'appelait communément Cendrillon. Cependant Cendrillon, avec ses méchants habits, ne laissait pas d'être 3 cent fois plus belle que ses soeurs, quoique vêtues très-magnifiquement.
Il arriva que le fils du roi donna un bal, et qu'il en pria toutes les personnes de qualité. Nos deux demoiselles en furent aussi priées, car elles faisaient grande figure dans le pays. Les voilà bien aises, et bien occupées à choisir les habits et les coiffures qui leur siéraient le mieux. Nouvelle peine pour Cendrillon; car c'était elle qui repassait le linge de ses soeurs, et qui godronnait leurs manchettes. On ne parlait que de la manière dont on s'habillerait.
--Moi, dit l'aînée, je mettrai mon habit de velours rouge et ma garniture d'Angleterre.
--Moi, dit la cadette, je n'aurai que ma jupe ordinaire; mais en récompense je mettrai mon manteau à fleurs d'or, qui n'est pas des plus indifférent.
On envoya quérir la bonne coiffeuse, pour dresser les cornettes à deux rangs, et on fit acheter des mouches 4 de la bonne faiseuse. Elles appelèrent Cendrillon pour lui demander son avis, car elle avait le goût bon. Cendrillon les conseilla le mieux du monde, et s'offrit même à les coiffer, ce qu'elles voulurent bien.
En les coiffant, elles lui disaient:
--Cendrillon, serais-tu bien aise d'aller au bal?
--Hélas! mesdemoiselles, vous vous moquez de moi; ce n'est pas là ce qu'il me faut.
--Tu as raison, on rirait bien si on voyait un Cendron aller au bal.
Une autre que Cendrillon les aurait coiffées de travers; mais elle était bonne, et elle les coiffa parfaitement bien. Elles furent près de deux jours sans manger, tant elles étaient transportées