Port-Tarascon: Dernières aventures de l'illustre Tartarin. Alphonse Daudet
Чтение книги онлайн.
Читать онлайн книгу Port-Tarascon: Dernières aventures de l'illustre Tartarin - Alphonse Daudet страница 9
«Quel exemple il nous donne, messieurs!» déclamait Tartarin, ajoutant toujours:
«Imitons-le… Pas d'emballemain!» C'est vrai que lui-même avait l'air très calme, très simple aussi, sans le moindre «flafla», au milieu de tous ses administrés en costume, seulement le grand cordon de l'Ordre en sautoir sur sa redingote.
Du pont du Tutu-panpan, on voyait les colons venir de loin, par groupes, apparaître à des tournants de rue, puis déboucher sur le quai, enfin reconnaissables et salués par leurs noms:
«Ah! Voilà les Roquetaillade!…
—Té! Monsieur Franquebalme!»
Et des cris, des bravos enthousiastes! On fit entre autres une ovation à l'antique douairière comtesse d'Aigueboulide, quasi centenaire, quand on la vit monter lestement à bord, en mantelet de soie puce, la tête branlante, portant d'une main sa chaufferette et de l'autre sa vieille perruche empaillée.
La ville se vidait de minute en minute, les rues semblaient plus larges entre les maisons closes, les boutiques à volets fermés, et toutes les persiennes ou jalousies baissées.
Tout le monde à bord, il y eut une minute de grand recueillement, de silence solennel, bercé par le sifflement de la vapeur sous pression. Des centaines d'yeux se tournaient vers le capitaine, debout sur la dunette, prêt à donner l'ordre de déraper. Tout à coup quelqu'un cria:
«Et la Tarasque»…
Vous n'êtes pas sans avoir entendu parler de la Tarasque, l'animal fabuleux qui a donné son nom à la ville de Tarascon. Pour rappeler son histoire brièvement, c'était, cette Tarasque, en des temps très anciens, un monstre redoutable, qui désolait l'embouchure du Rhône. Sainte Marthe, venue en Provence après la mort de Jésus, alla, vêtue de blanc, chercher la bête au milieu des marais, et l'amena en ville, liée seulement d'un ruban bleu, mais domptée, captivée par l'innocence et la piété de la sainte.
Depuis, les Tarasconnais célèbrent tous les dix ans une fête où l'on promène à travers les rues un monstre en bois et carton peint, tenant de la tortue, du serpent et du crocodile, grossière et burlesque effigie de la Tarasque d'autrefois, vénérée maintenant comme une idole, logée aux frais de l'État et connue dans tout le pays sous le nom de «la mère-grand!».
Partir sans la mère-grand, ne leur semblait pas possible. Quelques jeunes gens s'élancèrent et l'amenèrent au quai rapidement.
Ce fut une explosion de larmes, de cris d'enthousiasme, comme si l'âme de la ville, la patrie elle-même respirait en ce monstre de carton d'un si difficile embarquement.
Beaucoup trop grande pour trouver place à l'intérieur du navire, on attacha la Tarasque sur le pont à l'arrière; et là, cocasse, énorme, l'air d'un monstre de féerie, avec son ventre en toile et ses écailles peintes, sa tête dressée au-dessus du bastingage, elle complétait bien l'ensemble pittoresque et bizarre du chargement, semblait une de ces chimères sculptées à la proue des naufs et chargées de présider aux destinées du voyage. On l'entourait avec respect; quelques-uns lui parlaient, la flattaient de la main.
En voyant cette émotion, Tartarin craignit qu'elle n'éveillât dans les coeurs le regret de la patrie quittée, et, sur un signe de lui, le capitaine Scrapouchinat commanda tout à coup, d'une voix formidable:
«Machine en avant!…»
Aussitôt éclatèrent les sonneries de la fanfare, les sifflements de la vapeur, les bouillonnements de l'eau sous l'hélice, dominés par la voix d'Excourbaniès:
«Fen dé brut!… faisons du bruit!…». Le rivage s'enfuit d'un bond; la ville, les tours du roi René, reculèrent dans le lointain, de plus en plus rapetissées, comme brouillées dans la vibrante lumière du soleil sur le Rhône.
Tous, penchés sur les bordages, tranquilles, souriants, indifférents, regardaient la patrie s'en aller, disparaître là- bas, sans plus d'émotion, maintenant qu'ils avaient avec eux la bonne Tarasque, qu'un essaim d'abeilles changeant de ruche au son des chaudrons, ou qu'un grand triangle d'étourneaux en vol vers l'Afrique.
Et, vraiment, elle les protégea, leur Tarasque. Temps divin, mer resplendissante, pas une tempête, pas un grain, jamais traversée ne fut plus favorable.
Au canal de Suez, on tira bien un peu la langue, sous le feu d'un soleil ardent, malgré la coiffure coloniale adoptée par tous à l'exemple de Tartarin: casque de liège recouvert de toile blanche et garni d'un voile de gaze verte; mais ils ne souffrirent pas trop de cette température de fournaise, à laquelle le ciel de Provence les avait dès longtemps acclimatés.
Конец ознакомительного фрагмента.
Текст предоставлен ООО «ЛитРес».
Прочитайте эту книгу целиком, купив полную легальную версию на ЛитРес.
Безопасно оплатить книгу можно банковской картой Visa, MasterCard, Maestro, со счета мобильного телефона, с платежного терминала, в салоне МТС или Связной, через PayPal, WebMoney, Яндекс.Деньги, QIWI Кошелек, бонусными картами или другим удобным Вам способом.