Expérience, force et espoir. Anonyme

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Expérience, force et espoir - Anonyme

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terrible que j’ai demandé à ma femme de « m’interner » légalement. Puis, un matin, seul dans ma chambre, j’ai commencé à tout détruire, les meubles et tout ce qui me tombait sous la main. Désespérée, ma femme a dû employer le moyen que je lui avais suggéré au plus profond de mon désespoir alcoolique. Non disposée à me faire interner dans un asile d’État, tentant une fois de plus de sauver quelque chose de sa vie et de la mienne, elle m’a placé dans un hôpital, espérant malgré tout me sauver.

      J’ai été attaché. Le traitement était pénible – pas d’alcool – seulement du bromure et des potions pour dormir. Les nuits étaient une succession d’agonies physiques et mentales. Il a fallu des semaines pour que je puisse m’asseoir sans bouger pendant quelque temps. Je ne voulais parler à personne, et encore moins écouter. Graduellement, j’ai changé et un jour, j’ai entrepris une conversation avec un autre patient, alcoolique lui aussi. Nous avons comparé nos notes. Je lui ai franchement avoué que j’étais désespéré, que tous mes efforts pour trouver une issue avaient échoué, que mes efforts de volonté n’avaient rien donné (des gens bien intentionnés m’avaient dit « C’est une question de volonté, fais un effort ! » – comme si la volonté était une faculté qu’on pouvait activer et arrêter comme un robinet !).

      Je lui ai dit amèrement : « Être ici pour un rétablissement temporaire n’a pas de sens. Je le sais trop. Je n’entrevois rien d’autre qu’une répétition du passé. Je suis simplement incapable d’arrêter de boire. En sortant d’ici, je quitte la ville. »

      Ma nouvelle connaissance m’a regardé longuement avant de parler. Dans cet endroit le plus inattendu, un homme qui était dans la même position que moi, un autre alcoolique, m’a montré le premier signe d’espoir.

      « Écoute bien, mon ami, » dit-il en me regardant avec dix fois plus de sérieux que tous les bons citoyens et autres personnes bien intentionnées qui avaient fait de leur mieux pour m’aider. « Écoute-moi. Je connais une solution. Je connais la seule réponse. Et je sais que cela fonctionne. »

      Je l’ai regardé avec étonnement. Il y avait plusieurs débiles légers dans l’institution et, même si je connaissais peu de choses sur leur comportement, je savais que même dans une conversation normale, il pouvait se glisser des idées étranges. Cet homme était-il un peu fou, un peu dérangé ? Cet homme, un alcoolique confirmé comme moi, essayait de me dire qu’il connaissait le remède à mon mal. Je voulais entendre sa suggestion, mais je pensais qu’il était un peu « fêlé ». En même temps, j’étais prêt à l’écouter, comme tout homme en train de se noyer tentant de s’agripper à n’importe quoi.

      Mon ami a souri, il connaissait ma pensée. « Oui, a-t-il poursuivi. Oublie que je suis ici. Oublie que je ne suis qu’un autre ‘saoulard’. J’ai déjà connu la réponse

      – la seule solution. »

      Il semblait parler d’un passé récent. Me regardant avec conviction, la voix impressionnante de sincérité, il a poursuivi. « Pendant plus d’un an avant d’arriver ici, j’ai été un homme sobre, totalement abstinent. Je n’étais pas seulement au régime sec, j’étais abstinent ! Et je le serais toujours si j’avais suivi le plan qui m’a permis d’être abstinent pendant tout ce temps. »

      Permettez-moi d’ajouter ici qu’il est retourné à ce plan dont il me parlait et qu’il est abstinent depuis plus d’un an pour la deuxième fois.

      Il m’a brièvement raconté sa vie avant de me parler d’un remède pour l’alcoolisme – le seul qui fonctionne vraiment. Je m’attendais à entendre parler d’un nouveau traitement quelconque, d’une panacée nouvellement découverte dont je n’avais pas entendu parler, de quelque chose qui serait sans doute une combinaison de médicaments et de traitement mental. Mais, rien de cela, ce n’était certes pas un mélange de différents éléments.

      Il m’a parlé d’un groupe d’une trentaine d’hommes de ma ville prêts à me prendre par la main et à m’appeler par mon prénom. Ils seraient mes amis indéfectibles. Il m’a dit qu’ils se réunissaient une fois par semaine pour parler de leur expérience, de la façon dont ils essayaient de s’aider les uns les autres, du temps qu’ils passaient à aider des hommes comme moi.

      « Je sais que cela peut paraître étrange, dit-il. J’ai rechuté, je me suis saoulé après un an d’abstinence, mais je vais retourner à ce groupe. Je sais que ça marche. »

      Démuni, sans aucune confiance en moi ni en personne d’autre, ne croyant absolument pas que cet homme avait vraiment trouvé quelque chose, je lui ai posé des questions. Il fallait que je m’informe avant de devenir fou.

      « Comment fait-on ? Où dois-je aller ? » lui ai-je demandé.

      « Tu ne vas nulle part, dit-il. Quelqu’un viendra à toi. » Il n’a pas donné plus de détails, il n’a presque rien ajouté. Cet après-midi-là, j’ai bien réfléchi. J’ai demandé à une infirmière d’appeler ma femme et lui demander de venir me rendre visite dans la soirée.

      Elle est arrivée pendant les heures de visite. Je sais qu’elle s’attendait à ce que je la prie de me faire sortir le plus rapidement possible de cet endroit. Je n’ai rien fait de cela. Faible, je lui ai raconté la chose. Elle n’a pas été impressionnée.

      « Ça ne marche pas, dit-elle. Si ce programme – et Dieu sait si je comprends quelque chose à ce que tu m’as raconté – si ce programme marche, pourquoi cette personne est-elle de retour ici ? »

      Je ne savais quoi répondre. Je ne connaissais pas assez la chose pour être capable de lui donner une explication. « Je ne sais pas, lui dis-je. J’admets que cela semble étrange, compte tenu de l’état de cet homme, mais pourtant, je sens qu’il y a quelque chose là. De toute façon, je veux en savoir plus. »

      Elle est partie peu convaincue. Pourtant, le lendemain, j’ai reçu une visite. C’était un médecin, alcoolique lui-même. Il m’a parlé un peu plus du programme. Il était aimable et ne m’a pas imposé une façon rigide de surmonter mon problème. Il ne m’a pas parlé de remède religieux universel, ne m’a pas parlé de mon salut. Plus tard, il a demandé à d’autres anciens alcooliques de venir me rendre visite.

      Quelques jours plus tard, mon copain alcoolique a été libéré et peu après, on m’a permis de rentrer à la maison. Par l’entremise de l’homme qui m’avait parlé du programme la première fois, j’ai fait la connaissance de plusieurs autres membres du groupe d’anciens alcooliques. Ils m’ont raconté leur expérience. Plusieurs avaient été des gens fortunés et en vue. Certains étaient même tombés plus bas que moi.

      Le mercredi soir suivant mon congé, je me suis re-trouvé, un peu honteux mais très intéressé, à une réunion dans une maison privée de cette ville. Il y avait une quarantaine de personnes. Pour la première fois, j’ai vu un mouvement que je ne connaissais pas en pleine action. On le sentait. J’ai appris que je pouvais, moi aussi, en faire partie, que je pouvais obtenir l’abstinence et la santé mentale si je suivais quelques préceptes, simples dans leur énoncé, mais qui avaient des conséquences profondes si on les suivait. Au fond de moi, j’ai compris qu’il ne suffisait pas d’y manifester un intérêt que pour la forme. Encore ignorant, encore un peu sceptique, mais très sérieux, j’ai décidé d’essayer honnêtement.

      C’était il y a deux ans. Ça n’a pas été facile. Le nouveau mode de vie était étrange au début, mais je ne pensais qu’à cela. Parfois, les progrès étaient lents ; j’avançais avec hésitation entre les difficultés du chemin. Cependant, chaque

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