Le corsaire rouge. James Fenimore Cooper

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Le corsaire rouge - James Fenimore Cooper

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premier, laissant percer un instant sur ses lèvres un sourire fin et moqueur, dit brusquement:

      –Soyez le bienvenu, sir Hector Homespun.

      Les yeux du tailleur éperdu, car c’était précisément ce pauvre diable qui était tombé dans les filets du Corsaire, roulaient de droite à gauche, parcourant d’un regard mal assuré le mélange d’élégance et d’appareil guerrier qu’il rencontrait partout, et ne manquant jamais de revenir, après chacun de ces coups d’œil avides, pour dévorer la figure qu’il avait en face de lui.

      –Je le répète, sir Hector Homespun, soyez le bienvenu.

      –Que le Seigneur ait pitié du malheureux père de sept petits enfants! s’écria le tailleur. Il y a peu à gagner, vaillant pirate, avec un laborieux et honnête artisan qui est penché sur son ouvrage depuis le lever jusqu’au coucher du soleil.

      –Voilà des expressions indignes de la chevalerie, sir Hector, interrompit le Corsaire en mettant la main sur la petite badine qu’il avait jetée négligemment sur la table, et en touchant légèrement l’épaule du tailleur, comme s’il était sorcier, et que cet attouchement dût détruire le charme qui semblait avoir été jeté sur le tailleur;–prenez courage, honnête et loyal sujet; la fortune a enfin cessé de vous être contraire. Vous vous plaigniez, il n’y a que quelques heures, qu’il ne vous était venu aucune pratique de ce vaisseau; eh bien! maintenant vous êtes en passe de travailler pour tout l’équipage.

      –Ah! honorable et magnanime Corsaire, reprit Homespun, à qui la parole commençait à revenir, je suis un homme perdu, plongé jusqu’au cou dans la misère. Ma vie a été une suite d’épreuves et de tribulations Cinq longues et sanglantes guerres.

      –C’est assezz; je vous ai dit que la fortune commençait à vous sourire: des habits sont tout aussi nécessaires aux gens de notre état qu’au prêtre de la paroisse. Vous ne ferez pas une seule couture qu’elle ne vous soit bien payée. Regardez! ajouta-t-il en poussant le ressort d’un tiroir secret qui s’ouvrit aussitôt et laissa voir un monceau de pièces d’or dans lesquelles des monnaies de presque tous les États de la chrétienté étaient singulièrement mêlées, nous avons les moyens de payer ceux qui nous servent fidèlement

      La vue de ce monceau d’or, qui surpassait de beaucoup non seulement tout ce qu’il avait jamais vu dans sa vie, mais même les idées que son imagination rétrécie avait pu concevoir de trésors immenses, ne laissa pas que de produire son effet sur les sens du brave homme. Après avoir rassasié ses yeux de ce spectacle pendant le peu d’instants que le capitaine voulut bien le laisser en jouir, il se tourna du côté de l’heureux possesseur de tant de richesses, et demanda d’une voix qui avait repris graduellement de l’assurance, à mesure que la vue du tiroir avait opéré sur ses sens:

      –Et que dois-je faire, haut et puissant marin, pour avoir part à –ces richesses?

      –Ce que vous faites tous les jours sur la terre,–couper, bâtir et coudre. Peut-être pourra-t-on essayer de temps en temps vos talents pour quelques costumes de fantaisie ou de mascarade.

      –Ah! ce sont des inventions perfides et diaboliques de l’ennemi, pour entraîner les hommes dans le péché et dans les abominations mondaines! Mais, digne commandant, je pense à Désirée, ma femme inconsolable; quoique vieille et assez difficile à vivre, cependant c’est la compagne légitime de mon cœur et la mère d’une nombreuse famille.

      –Elle ne manquera de rien. Nous avons ouvert ici un asile pour les maris en détresse; ceux qui n’ont pas assez de force pour être les maîtres chez eux, viennent ici comme dans un lieu de refuge. Nous pourvoyons aux besoins de leurs familles par des moyens qui nous sont connus, et tout le monde est content. Ce n’est pas le moindre de mes actes de charité.

      –C’est une conduite juste et méritoire, honorable capitaine, et j’espère que Désirée et ses enfants ne seront pas oubliés. Assurément l’artisan mérite son salaire, et si je travaille pour vous, forcé et contraint, j’espère que la bonne femme et ses petits ressentiront les effets de votre libéralité.

      –Vous avez ma parole; on aura soin d’eux.

      –Peut-être, équitable gentilhomme, si quelque avance était faite sur ces fonds immenses que je vois rassemblés, l’esprit de ma pauvre moitié serait singulièrement tranquillisé, et ses recherches pour savoir ce que je suis devenu seraient infiniment moins actives. Je connais parfaitement le caractère de Désirée; j’ai d’excellentes raisons pour cela, et je suis identiquement convaincu que tant qu’elle aura la misère en perspective, elle jettera les hauts cris dans Newport. Maintenant que le Seigneur a bien voulu m’accorder un répit, il ne peut y avoir de mal à désirer en jouir en paix.

      Quoique le Corsaire fût loin de croire, comme son prisonnier, que la langue de Désirée pût troubler l’harmonie de son vaisseau, il était dans un jour d’indulgence. Poussant de nouveau le ressort, il prit une poignée d’or, et la présentant à Homespun, il lui dit:

      –Voulez-vous vous engager et prêter le serment d’usage? aussitôt cet argent est à vous.

      –Le Seigneur me soit en aide et me délivre de toute tentation! marmotta le tailleur ébahi; héroïque Corsaire, je crains terriblement la justice. S’il venait à vous arriver malheur, soit de la part d’un croiseur du roi, soit par suite de quelque bonne tempête qui vous jetât à terre, il pourrait y avoir du danger à être contaminé trop intimement avec votre équipage. Tous les petits services que je pourrai rendre, contraint et forcé, seront en ce cas passés sous silence, à ce que j’espère humblement; et je compte trop sur votre magnanimité, honnête et honorable commandant, pour ne pas être sûr que ces mêmes services ne seront pas oubliés dans la répartition de vos justes et légitimes bénéfices.

      –Voilà bien l’esprit de l’état! et il me semble le voir rogner en toute conscience l’habit de sa pratique pour en affubler un de ses sept enfants, dit le Corsaire entre ses dents, en tournant sur ses talons; et il frappa sur le gong avec une force qui ébranla toute la charpente du vaisseau.

      Quatre ou cinq têtes se montrèrent en même temps aux différentes portes de la cabine, et une voix se fit entendre pour demander ce que leur chef avait à leur commander.

      –Qu’on l’emmène dans son hamac! fut l’ordre aussi prompt que subit qui leur fut donné.

      Le pauvre Homespun, qui, soit par frayeur, soit par politique, semblait hors d’état de faire le moindre mouvement, fut enlevé aussitôt de dessus sa chaise et porté jusqu’à la porte qui communiquait avec le tillac.

      –Arrêtez! cria-t-il aux porteurs peu cérémonieux, au moment où ils s’apprêtaient à le transporter à l’endroit qui leur avait été désigné par leur capitaine, j’ai encore un mot à dire. Honnête et loyal rebelle, quoique je n’accepte pas d’entrer à votre service, cependant je ne le refuse pas non plus d’une manière déplacée et irrévérencieuse. C’est une cruelle tentation, et elle me démange jusqu’au bout du doigt; mais nous pourrions faire un traité par lequel nous ne perdrions ni l’un ni l’autre, et auquel la justice ne pourrait trouver rien à redire. Je voudrais, voyez-vous, puissant commodore, emporter un nom honnête au tombeau, et d’un autre côté, je ne serais pas fâché de vivre jusqu’à la fin de mes jours; car après avoir passé sain et sauf, et avec honneur, par cinq longues et sanglantes guerres.

      –Qu’on l’emmène! furent les mots terribles et retentissants qui l’empêchèrent d’en dire davantage

      Homespun

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