L'Académie des sciences et les académiciens de 1666 à 1793. Joseph Bertrand

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L'Académie des sciences et les académiciens de 1666 à 1793 - Joseph Bertrand

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n’ai pas cru que l’erreur eût de tels priviléges.»

      A l’inconvenance d’une telle publication, Hunault avait ajouté le tort beaucoup plus grave d’en offrir à Petit la suppression à prix d’argent. L’Académie, non moins émue par la violence des attaques que par le récit de ce procédé malhonnête, voulut infliger à Hunault un blâme public et sévère en lui enjoignant «de n’avoir plus à l’avenir aucun procédé semblable contre M. Petit ni aucun académicien, et elle a cru en cela, dit le président, vous traiter favorablement.»

      L’Académie, dans une autre rencontre, prend au contraire parti pour Hunault et réprouve la conduite d’un confrère qui, gardien trop zélé des priviléges de sa corporation, avait assisté à la saisie de divers objets d’étude et d’enseignement dont la rigueur des règlements lui interdisait la possession et l’usage. «On a parlé, dit le procès-verbal du ’’ mars 1733, de l’affaire de M. Hunault, chez qui les prévôts des chirurgiens, du nombre desquels était M. Rouhault, membre de cette Académie, ont saisi le 9 de ce mois plusieurs cadavres, des squelettes et des instruments d’anatomie. On a prié M. Bignon, président, d’envoyer chercher M. Rouhault pour lui dire le mécontentement que l’Académie avait de sa conduite en cette occasion à l’égard d’un confrère.»

      LES ÉLECTIONS

      Le droit de se recruter elle-même, malgré toutes les divisions dont il devait agiter et troubler l’Académie, fut une des suites les plus heureuses de l’organisation de 1699. Indécise d’abord dans ses choix et comme étonnée qu’on voulût bien la consulter, l’Académie dès le commencement se montra cependant assez bien inspirée; l’honneur d’obtenir ses premiers suffrages échut au médecin Fagon. «On ne pense pas, dit le procès-verbal, qu’il puisse venir aux assemblées, mais on a voulu donner cette distinction à son mérite et à sa personne.» Le début était bon et la distinction justifiée. Fagon, sans être un inventeur, connaissait à fond la botanique et la chimie de l’époque. Directeur du Jardin des plantes où sans discussion et sans contrôle il nommait à tous les emplois, il s’y montra toujours exact, désintéressé et honorable à tous égards, et en remplissant sa charge à la satisfaction de tous, il sut mériter, obtenir et attacher à son nom la sympathie et la reconnaissance durable des naturalistes. L’abbé de Louvois et Vauban, élus tous deux après Fagon, complétèrent la liste des honoraires. Si le temps a affaibli l’éclat emprunté de l’un des deux noms, l’autre, déjà grand par-dessus ses dignités et ses titres, devait être à la lois pour la Compagnie naissante, une force, un appui et un ornement.

      Sur les huit associés étrangers institués par le règlement, trois seulement, Leibnitz, Tchirnauss et Gulhiemini, appartenant à l’ancienne Académie, étaient restés membres de la nouvelle. On leur adjoignit par élection Hartsœcker, les deux frères Bernoulli, Rœmer et Isaac Newton. Viviani compléta la liste sur laquelle ne figura jamais le nom de Denis Papin, ballotté dans la dernière élection avec celui du disciple de Galilée. Deux ans plus tard, l’Académie préférait à Papin l’obscur charlatan Martino Poli. Fontenelle, dans un éloge très-laconique, excuse un tel choix en l’expliquant. Pour récompenser une invention restée secrète et par conséquent stérile, Louis XIV, avec une forte pension, avait accordé à Poli le titre d’associé honoraire de l’Académie. La volonté du roi était alors la règle suprême sous laquelle tout devait plier, et l’Académie, incapable d’opposition ou de résistance, se prêta avec empressement à la formalité d’une élection devenue inutile.

      Martino Poli, pendant deux ans assidu aux séances, n’y apporta que les creuses imaginations des alchimistes. Attaquant la théorie des couleurs de Newton comme inexacte et mal fondée, il allègue qu’à quatre éléments qui composent tous les corps doivent correspondre quatre couleurs seulement: le rouge, couleur du feu; le bleu, couleur de l’air; le vert et le blanc enfin, couleur de l’eau et de la terre.

      L’une des places d’associé devint presque immédiatement vacante. Sauveur, résidant à Versailles, dut aux termes du règlement renoncer à l’Académie, en conservant toutefois, avec le titre de vétéran, le droit d’assister aux séances et d’y prendre la parole. «La place qu’avait M. Sauveur d’associé mécanicien étant vacante, dit le procès-verbal, M. le président a représenté qu’elle conviendrait à M. de Lagny, qui est actuellement à un port de mer où il s’attache fort à tout ce qui regarde la mécanique de la marine. La Compagnie a donc résolu de proposer au roi M. de Lagny pour la place de M. Sauveur.»

      Telle était, aux premiers temps de l’Académie, l’influence considérable du président. Élevé au-dessus de ses confrères par son rang, par sa naissance et par le choix direct du roi, il ne pouvait manquer d’être fort écouté; mais il s’absentait souvent, et le vice-président, homme de cour comme lui, se montrait encore moins exact. L’Académie, dès la première année, pria en conséquence l’abbé Bignon de vouloir bien déléguer à l’un de ses membres le droit de présider en son absence. Sur son refus gracieusement motivé, elle nomma elle-même Gallois et Duhamel, qui prirent le titre de directeur et de sous-directeur; mais cette hardiesse ne dura que deux ans, et dès l’année 1702, le roi nomma le directeur et le sous-directeur qui «étaient électifs et ne le seront plus,» dit laconiquement le procès-verbal.

      L’Académie a varié plusieurs fois dans son mode d’élection. Les procès-verbaux des séances, sans rapporter aucun détail, ne donnent pas même le dénombrement des suffrages. Les académiciens eux-mêmes devaient l’ignorer; le président et le vice-président se retiraient en effet avec le secrétaire pour dépouiller le scrutin en présence d’un seul membre pensionnaire désigné par le sort et qui, chargé d’annoncer le résultat, prenait le nom d’évangéliste. Deux fois seulement, des difficultés imprévues soumises à la décision de l’Académie forcent, pour faire connaître le point débattu, à montrer distinctement par des chiffres précis tout le mécanisme de l’élection.

      Le 28 mars 1733, l’Académie ayant été invitée à nommer un associé dans la section de mécanique, on lit au procès-verbal: «La pluralité a été pour MM. Camus et Fontaine.» Mais sur des réclamations, au moins plausibles sans doute, élevées par un troisième candidat, on ajoute huit jours après: «On a fait réflexion qu’il pouvait y avoir eu erreur dans le calcul par lequel M. Camus a eu la pluralité des voix le jour précédent et qu’en ce cas M. Clairaut aurait eu l’égalité; la Compagnie, pour faire cesser toute difficulté, a résolu de demander très-humblement au roi s’il voudrait les nommer tous deux ensemble.» Le titre d’associé n’étant pas rétribué, l’expédient fut aisément accepté, et sans avouer ou nier l’erreur de calcul on sauva tous les droits et tous les intérêts.

      Mais l’interprétation du passage cité reste embarrassée de deux difficultés: Que signifie une erreur de calcul dans le dépouillement d’un vote? Comment cette erreur, en faisant perdre à Clairaut le premier rang, ne lui laisse-t-elle pas même le second? Le règlement de 1716 explique tout d’abord ce dernier point: chaque liste de présentation devait contenir le nom au moins d’un candidat étranger jusque-là à l’Académie; Clairaut et Camus déjà adjoints l’un et l’autre ne pouvaient donc pas composer la liste.

      Quant à l’incertitude sur le dénombrement des suffrages comptés à chaque candidat, le récit détaillé d’une autre élection en fait paraître une cause vraisemblable: «Le 19 janvier 1763, MM. les pensionnaires et associés astronomes ayant proposé à l’Académie pour la place d’adjoint dans la même classe vacante par la promotion de M. Legentil à celle d’associé, MM. Messier, Bailly, Jeaurat et Thuillier, on a procédé suivant la forme ordinaire à l’élection, où il s’est trouvé, en comptant les billets, que M. Bailly avait eu quatorze voix et MM. Messier et Jeaurat chacun treize, mais qu’il y avait un billet qui se trouvait nul parce qu’il ne portait que le seul nom de M. Jeaurat au lieu de deux qu’il devait contenir suivant le règlement. Sur quoi MM. les

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