Président Élu. Джек Марс
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Il y avait autre chose, bien sûr, bien d’autres choses. Des choses plus sombres, des choses nécessitant d’avoir l’estomac solide, des choses non destinées au grand public. Il avait de grands projets. Ils allaient nettoyer ce pays une bonne fois pour toutes. Mais ce n’était pas quelque chose que l’on étale en public, n’est-ce pas ? Du moins pas encore.
Gerry le Requin se leva de son bureau et traversa une enfilade de pièces. Quelques secrétaires se trouvaient sur place, mais la plupart des employés travaillaient ailleurs. Gerry était là non seulement parce qu’il était le stratège en chef, mais aussi parce qu’il était l’homme de main du patron – et il n’aimait pas perdre de vue le vieil homme.
Ils avaient débarqué ici depuis Louisville cet après-midi. Son boss possédait cet… comment appeler ça ? Un appartement ? Sûr, un appartement comportant dix chambres, douze salles de bains, une demi-douzaine de bureaux, une salle de conférence et un réfectoire pour le personnel. Il occupait un étage entier dans l’un des hôtels les plus chers et légendaires au monde. Dans cet hôtel s’était déroulé un épisode de l’histoire de l’Amérique : c’était là où John F. Kennedy donnait ses nombreux rendez-vous galants. C’était l’endroit idéal.
Ils allaient passer la nuit ici, car ils avaient des affaires importantes à régler à Washington DC dès le matin de bonne heure.
Gerry traversa un vestibule d’un pas désinvolte, plaqua sa carte contre un capteur et passa dans les quartiers d’habitation. Le salon de devant était meublé dans le style opulent de l’Ancien Monde, tel le salon d’un manoir victorien.
Un homme aux cheveux blancs se tenait devant une haute fenêtre aux rideaux écartés, en train de contempler la nuit. Il était vêtu d’un costume trois-pièces, bien qu’il soit chez lui et n’ait pas l’intention de sortir. Les chemises à col ouvert n’étaient qu’une mascarade, bien sûr. L’homme aimait jouer à se déguiser comme tout le monde.
Il tenait un verre de Martini qui paraissait minuscule entre ses doigts. Ses mains le trahissaient : malgré sa tenue élégante et sa richesse évidente, il avait les grandes mains noueuses de quelqu’un qui avait grandi en faisant quantité de travaux manuels. Ses mains disaient : trouvez l’erreur dans cette image.
La nuit était glaciale dans la capitale fédérale, et le vent hululait derrière la fenêtre. Le vieil homme fixait les lumières de la ville et l’arrière-plan de la grande expansion urbaine. Gerry savait que même après toutes ces décennies, le campagnard à l’intérieur du vieil homme était encore ébloui par les lumières de la ville.
– Comment se déroule la guerre ? demanda Jefferson Monroe, président élu des États-Unis, avec un léger accent sudiste.
– Magnifiquement, répondit Gerry, qui le pensait vraiment. Elle est dans les cordes et ne sait pas quoi faire. Sa déclaration d’aujourd’hui le montre clairement. Elle ne va pas quitter la présidence ? Ça nous donne la main. Elle s’isole, et l’opinion publique va nous suivre. Si nous jouons finement, nous pourrons la virer de là au plus tôt. Je pense qu’on va faire monter la pression – la pousser à nous céder la présidence en avance, bien avant la conclusion de toute enquête pour fraude électorale. Ensuite, nous annulerons nous-mêmes l’enquête.
Le vieil homme se détourna de la fenêtre.
– Y a-t-il eu un précédent où un président a cédé le pouvoir en avance ?
Gerry le Requin secoua la tête.
– Non.
– Alors comment va-t-on procéder ?
Gerry sourit.
– J’ai quelques idées.
CHAPITRE SEPT
18:47, heure normale de l’Est
Bureau ovale
Maison-Blanche, Washington DC
Elle était seule quand on fit entrer Luke dans la pièce.
Durant un instant, il crut qu’elle dormait. Elle était affalée dans un fauteuil du coin salon. Elle avait l’air d’une poupée de chiffon désarticulée, ou d’une lycéenne avachie avec dédain devant son professeur.
Le nouveau Resolute Desk1 se dressait derrière elle. Les lourds rideaux étaient tirés, masquant les hautes fenêtres. Par terre, au bord du tapis ovale était imprimée une citation :
La seule chose que nous devons craindre est la peur elle-même – Franklin Delano Roosevelt
La phrase s’étirait tout autour du tapis, s’achevant là où elle commençait.
Susan portait un pantalon bleu et un chemisier blanc. Sa veste était suspendue au dossier d’une chaise. Elle avait enlevé ses chaussures, qui gisaient en vrac sur le tapis.
Malgré sa posture, elle avait un regard acéré, qu’elle posa sur Luke.
– Salut, Susan, fit-il.
– Vous avez vu ma conférence de presse ? s’enquit-elle.
Il secoua la tête.
– J’ai cessé de regarder la télé il y a plus d’un an. Je me sens bien mieux depuis. Vous devriez essayer.
– J’ai annoncé au peuple américain que je n’allais pas me retirer.
Luke se retint de rire.
– Je parie que ça passe comme une lettre à la poste. Qu’est-il arrivé ? Vous aimez tellement ce job que vous ne voulez pas le lâcher ? Je suis quasi certain que ça ne marche pas comme ça.
Elle esquissa un petit sourire, qui lui rappela pourquoi elle avait été un super mannequin jadis. Elle était belle. Son sourire pouvait illuminer une pièce. Il pouvait illuminer le ciel.
– Ils ont volé l’élection.
– Évidemment, répliqua-t-il. Maintenant, vous allez la leur reprendre. Ça a tout d’un plan. (Il marqua une pause, puis lui sortit le fond de sa pensée :) Écoutez, je pense que vous feriez mieux de lâcher ce job. Désormais, ils n’auront plus Susan Hopkins pour se défouler. Qu’ils découvrent à quel point ça ira mal sans vous. Ils vous supplieront de revenir.
Elle secoua la tête, et son sourire devint plus lumineux.
– Je ne crois pas que ça marche comme ça.
– Je ne le crois pas non plus, opina-t-il.
Elle laissa échapper un long soupir.
– Où étiez-vous donc, Luke Stone ? Vous auriez dû rester dans les parages. On s’est bien amusé ici, une fois que le chaos s’est un peu calmé. On a fait plein de bonnes choses.
1
Bureau du président.